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Les trois N de la radicalisation : nécessité, narration et réseau social (network)

4 minutes
Les trois N de la radicalisation : nécessité, narration et réseau social (network)
Sergio De Dios González

Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González

Dernière mise à jour : 13 novembre, 2024

La radicalisation, c’est un processus social et psychologique impliquant un engagement toujours plus fort pour une idéologie politique ou religieuse extrémiste. En d’autres termes, se radicaliser, c’est adopter des croyances politiques ou religieuses qui ne sont pas partagées par la majorité des gens. Or, comment la radicalisation se produit-elle ?

Il existe trois forces psychologiques dont la combinaison peut expliquer la radicalisation. Elles forment les trois N de la radicalisation. La première de ces forces est liée aux nécessités, aux manques qui font naître la motivation d’agir afin d’obtenir quelque chose. La deuxième force est la narration, l’idéologie qui favorise des croyances définissant le monde et établissant comment se comporter. La dernière force, c’est le réseau social (network), ou autrement dit, les personnes qui nous entourent.

Trois cas de radicalisation

Maria voue un amour inconditionnel aux animaux et ne peut pas supporter la cruauté envers eux. Elle s’intéresse aux actions de différents groupes de défense des animaux, mais constate que ces actions n’ont qu’un faible impact sur la société. Un jour, elle ressent le désir de s’engager dans l’action politique et tombe amoureuse du leader de son groupe.

Sa pensée se polarise progressivement et, finalement, tout devient permis pour protéger la vie des animaux. Avec le reste du groupe, Maria sabote le gouvernement ainsi que les installations industrielles qui selon elle ont violé les droits des animaux.

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Depuis tout jeune, Vincent s’intéresse à la philosophie et aux questions socio-politiques. Un jour, ses amis lui parlent d’un mouvement international de protestation sociale qui milite dans les principales villes du monde. Il rejoint alors ce mouvement avec quelques amis. Vincent et ses camarades ont finalement été arrêtés après avoir lapidé les agents de police qui tentaient de contenir la vague de manifestants qui exigeaient une justice sociale.

Lors d’un matin solitaire de janvier, Abu a traversé la frontière turque vers l’Etat Islamique. Il avait le sentiment d’être un homme qui n’avait rien à perdre. Fraîchement divorcé de son épouse et luttant contre une addiction sévère à l’alcool et aux cigarettes, il n’était pas très en forme et définitivement pas apte non plus à se battre, mais la perspective d’un poste d’écrivain pour l’Etat Islamique au sein du califat pouvait lui permettre de laver son “ardoise immorale” et de devenir un bon musulman.

La radicalisation des nécessités

Pour que la radicalisation ait lieu, une nécessité doit apparaître. Cette nécessité a été identifiée comme la recherche d’importance ; les gens veulent marquer la différence, être importants, être quelqu’un. Ainsi, lorsque se présente une opportunité de gagner de l’importance, ou bien lorsque cette dernière se perd et qu’elle se voit menacée, se réveille alors la recherche de sens. Cependant, l’importance peut être gagnée de bien des manières non violentes.

Dans nos exemples précédemment présentés, Maria a perdu de l’importance en se sentant impuissante face à la maltraitance des animaux. Vincent essaie de ne pas perdre son importance et lorsque ses amis rejoignent le mouvement, il le rejoint aussi. De son côté, Abu cherche à gagner de l’importance grâce aux conditions que lui offre l’Etat Islamique.

La radicalisation de la narration

Pour que dans le cadre de la recherche de l’importance, on opte pour des moyens violents, il est nécessaire que la narration ou l’idéologie de la personne permette la violence. De toutes les options que les sujets envisagent pour gagner de l’importance, la violence doit être la première et, de plus, être légitime pour ses croyances. Si l’idéologie ne permet pas la violence, on mettre d’autres moyens en oeuvre et la radicalisation n’aura pas lieu.

Pour en revenir à nos exemples, Maria radicalise sa pensée après avoir intégré le groupe, allant jusqu’à accepter que la violence soit la seule manière de défendre les animaux. Le mouvement que rejoint Vincent soutient et prône le recours à des actes illégaux en faveur de la justice sociale, ce qu’il finit par accepter. Pour Abu, l’idéologie de l’Etat Islamique permet la violence dans le but d’instaurer un califat islamiste.

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La radicalisation du réseau social

Enfin, quelque chose que les trois personnages de nos exemples partagent, c’est qu’ils ne sont pas seuls ; pour que vous soyez important, les autres doivent vous faire sentir important. Le groupe est celui qui, d’une certaine manière, octroie de l’importance aux gens. Par conséquent, le dernier ingrédient pour que se produise la radicalisation, c’est le réseau social. Dans la plupart des cas, les personnes se radicalisent avec d’autres.

Maria est tombée amoureuse d’un homme radicalisé, Vincent s’est radicalisé avec ses amis et Abu a rejoint une organisation terroriste. Chacun d’eux s’est radicalisé d’une manière différente, mais tous ont quelque chose en commun : ils cherchaient à être importants, ils ont accueilli la narration qui justifiait la violence et ont compté sur un groupe qui les accompagnait dans cette radicalisation.

 

Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.