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Le Joker, ou le parfait méchant

7 minutes
Pourquoi aimons-nous tant les méchants ? L'un des méchants les plus connus est l'éternel rival du Batman : le Joker. Sa personnalité sadique, narcissique et sociopathe ne sont que quelques-unes des clés de son succès.
Le Joker, ou le parfait méchant
Gema Sánchez Cuevas

Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas

Écrit par Leah Padalino
Dernière mise à jour : 15 mai, 2023

Le Joker est l’un des méchants les plus reconnus et aimés du grand public. En effet, sa popularité est telle qu’il n’a plus besoin de Batman pour être reconnu. Actuellement, un nouveau film est en cours, où le rôle du Joker sera interprété par Joaquin Phoenix.

Plusieurs acteurs ont donné vie à ce méchant. Et pourtant, le Joker de Heath Ledger se distingue en particulier par sa performance qui lui a valu l’Oscar posthume. Pour autant, nous ne sous-estimons les autres performances de grande qualité, comme celle de Jack Nicholson. Le cinéma a contribué, dans une large mesure, à atténuer l’image du Joker. Et à l’associer à celle du méchant éternel.

“Quand les gens sont sur le point de mourir, ils se montrent tels qu’ils sont. Donc, d’une certaine façon, je connais tes amis mieux que toi.”

-Joker-

L’évolution du Joker

Jusqu’aux années 40, Batman appartenait à la série Detective Comics. Mais à partir de là, le personnage devint indépendant et fut alors le protagoniste d’un comic portant son nom. Comme tout bon super-héros, il avait besoin d’un rival. Commence alors à se dessiner le Joker, dont la paternité a été assez contestée. Ce premier Joker ressemblait à la figure du joker du jeu de poker. D’autre part, il faut souligner qu’au départ, ses intrusions étaient moins élaborées qu’aujourd’hui et qu’on le présentait comme un méchant “classique”.

Puis, au fil du temps, sa popularité a augmenté et il semble qu’il soit devenu une figure essentielle de la bande dessinée Batman. Presque comme si les deux personnages étaient les deux faces d’une même pièce. Le bien et le mal, inséparables, indissolubles.

Some figure

 

C’est en effet cette idée que le scénariste britannique Alan Moore a essayé de transmettre dans le film Batman: The Killing Joke. L’idée, donc, que le héros et le méchant ne sont pas si différents, que la bonté de Batman n’est pas si pure, et que la cruauté du Joker non plus. La plaisanterie meurtrière survient à un moment de crise. À un moment où les vieilles règles éditoriales ne fonctionnent plus, où les vieux commencent à se lasser et où les blagues du Joker perdent leur grâce.

Moore a réussi à marquer un virage radical. Il a en effet mis en scène un Joker différent, qui n’était plus un personnage plat et superficiel et dont l’essence de méchant s’est vue renforcée. Grâce à Moore, le Joker a cessé d’être un personnage secondaire qui, bien que présentant des intrigues intéressantes, était à l’arrière-plan. En conséquence, il était devenu un complément au personnage principal : Batman.

A partir de ce moment, l’intérêt pour le méchant augmente. Du fait de la découverte de son passé sombre et confus, dont on ne sait pas grand chose ou presque. Du fait de voir si la nature du méchant a toujours été là ou, au contraire, si elle est le fruit d’un mauvais jour. En effet, Moore a réussi à trouver les pièces manquantes du puzzle et a tracé les principales caractéristiques de la véritable personnalité du Joker, la raison de sa folie.

Qui est le Joker ?

Son apparence physique est une véritable moquerie pour Batman. Un personnage sérieux et sombre au passé tragique, comparé avec l’apparence d’un circassien excentrique et coloré. Son aspect physique, expliqué de diverses façons tout au long de la bande dessinée, est due à une chute dans un réservoir contenant des résidus chimiques qui défigurent son visage et modifient sa peau. Certains auteurs ajoutent habituellement du maquillage, d’autres expliquent que la couleur de ses lèvres est due au contact avec le résidu.

Dans Batman; The Killing Joke, le Joker se souvient de son passé de différentes manières. Nous voyons des flashbacks, mais nous ne savons pas s’ils sont réels ou non.

Dans The Batman Adventures: Mad Love, le Joker explique à Harley Quinn un triste passé dans lequel il avait des problèmes avec son père. Cependant, nous avons également découvert que Batman avait raconté une autre version similaire, mais avec quelques variations.

Dans le film Batman (1989) réalisé par Tim Burton avec Jack Nicholson dans le rôle du Joker, ce dernier porte un nom : Jack Napier, et on assiste à la scène de sa transformation en Joker dans la cuve chimique.

Le Joker de Heath Ledger avait un ton plus réaliste, plus proche de celui d’un criminel, d’un tueur en série qui laisse toujours sa marque d’identité à côté de sa victime. Un peu dans le sillage de ses origines des premiers comics.

Some figure

 

Le passé du Joker n’est pas bien clair ni défini. Il existe des versions différentes, qui dessinent toutes diverses possibilités. Le Joker invente habituellement ses histoires et les manipule afin d’atteindre un but, comme dans The Batman Adventures: Mad Love. Nous ne savons pas ce qui est réel, pas non plus ce qui est inventé, mais nous pouvons deviner un passé sombre. Un passé peut-être pas si différent de celui de Batman qui, avec son sadisme, a construit le caractère que nous connaissons aujourd’hui.

Sadique, moqueur, extrêmement intelligent, fou, manipulateur : tel est le Joker, peu importe la version de son passé. En effet, la folie semble être étroitement liée au personnage, qui parvient à la transmettre à ceux qui l’entourent. Comme c’est le cas de Harley Quinn. En effet, bien qu’il soit son psychiatre, il tombe amoureux de lui et de sa folie. Il se trouve que le Joker a quelque chose de charmant, une aura narcissique, égocentrique et cruelle. Mais ce qui est curieux, c’est qu’il est difficile d’éviter de se faire prendre.

Son goût pour les blagues et pour rire de ce dont personne ne rirait. Sa dérision de la vie et de la mort. Ou encore ses plans tortueux mais intelligents et élaborés. Tout autant de facteurs qui font de lui le méchant parfait. Le méchant absolu. Si parfait dans son archétype qu’il réussit à nous faire tomber amoureux.

Le méchant

Ne connaissant pas son passé et même si Moore a essayé de brouiller le bien et le mal, en réalité, le Joker est le parfait psychopathe. Le méchant littéraire ou cinématographique qui est juste, car aucune cause extérieure n’aurait pu le conduire à prendre ce chemin. Il existe de nombreuses versions et les propositions sont différentes. Toutefois, elles coïncident toutes en ce qu’elles dessinent un sociopathe sans scrupules dont le seul objectif est de semer le chaos.

On a essayé de voir le méchant comme tout ce que le héros n’est pas ou ne pourrait être. Si Batman est ordre, Joker est chaos. Si Batman est bon, Joker est mauvais… Cependant, la figure du méchant est beaucoup plus complexe et a été étudiée sous différentes formes. Il existe de nombreux types de méchants et il est difficile d’en faire une classification.

 

L’archétype du méchant se retrouve dans des manifestations artistiques à caractères très divers. Le méchant n’est pas toujours un personnage, il peut aussi être une institution, un groupe, etc. Nous le relions habituellement à des histoires, à la tradition populaire, un lieu où les archétypes sont très clairs, où les personnages sont adaptés et configurés.

Vladimir Propp a fait une étude approfondie de la morphologie de l’histoire. Il y parlait d’une série de 31 points communs ou récurrents dans tous les contes de fées et, bien sûr, faisait référence au méchant et à sa relation avec le héros. Ces fonctions ont servi à la construction d’histoires, à l’étude de la narratologie. Nous les voyons dans les contes de fées. Mais aussi dans des œuvres plus vastes. Même dans le monde de la BD ou du cinéma.

La figure du héros semble essentielle dans la morphologie du conte de Propp. Et de la même manière, chaque héros a besoin d’un méchant, d’un personnage qui tente de le saboter, qui blesse sa famille, qui détruit ses plans et qui contribue à la construction et à la mythification du héros lui-même.

“Il suffit d’un seul mauvais jour pour que l’homme le plus sain d’esprit devienne fou. Voilà la distance qui sépare le monde de l’endroit où je vis : un mauvais jour.”

-Joker-

 


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Propp, V., (1985): Morfología del cuento. Madrid, Akal.


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