L'eudémonisme, ou la clé du bonheur selon Carl Jung
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
L’eudémonisme, ou “eudaimonia” en grec, signifie avoir bonne fortune, richesse ou bonheur. Il s’agit d’une floraison interne que, selon Carl Jung, nous devrions tous promouvoir tout d’abord au contact de notre propre daimon. Il s’agit d’un génie interne, d’un archétype qui guide nos passions et nos motivations inconscientes, celui qui définit nos essences et que nous devrions écouter plus souvent.
Le besoin d’être heureux abonde à l’excès un peu partout (librairies, réseaux sociaux, messages imprimés sur nos vêtements). Toute publicité télévisée suggère qu’en buvant telle boisson gazeuse ou en possédant tel téléphone portable, nous connaîtrons des sensations nouvelles et merveilleuses. La vision actuelle du bonheur prend un ton presque impératif.
Cependant, selon Taleb, notre monde est extrêmement complexe. Tant et si bien que lorsque nous voyons un cygne noir, nous ne savons pas comment réagir. Nous devenons vulnérables parce que nous ne savons pas comment gérer les événements imprévus et l’incertitude. Par conséquent, nous ne pouvons jamais trouver le bonheur si nous regardons en dehors. Nous devons renforcer notre caractère, notre daimon, comme dirait Carl Jung.
L’eudémonisme et l’importance de se connaître soi-même
James Hillman est l’un des héritiers de Carl Jung. Cet analyste jungien fut l’un des disciples qui a le plus approfondi le concept des archétypes, et notamment de l’idéal du daimon. Dans son livre The Souls Code, il nous rappelle l’importance d’entrer en contact avec ce génie ou “démon” interne afin de construire une vie pleine, un bonheur véritable. Pour mieux comprendre cette intéressante théorie, analysons attentivement ce que le professeur Hillman nous révèle dans son livre.
Qu’est-ce qu’un daimon ?
- Daimon signifie démon en grec. Cependant, loin de revêtir une attribution négative ou maligne, il symbolise en réalité l’entité la plus élevée de l’être humain. Dans l’éthique d’Aristote, daimon était la vertu et la sagesse dans son aspect le plus pratique.
- Carl Jung, quant à lui, explique que le daimon vit dans notre inconscient. Il guide beaucoup de nos actions, il nous pousse, il nous chuchote des idées, il nous inspire et donne une voix à notre intuition. Il est toutefois courant de s’éloigner de cette voix interne dans la société actuelle et face au rythme de vie que nous menons aujourd’hui.
- Une éducation orientée à former des personnes identiques et un marché du travail qui ne valorise pas l’originalité annihile complètement l’opportunité de faire ressortir ce lutin intérieur. Cette entité est pleine de vitalité. Il possède un énorme potentiel et réclame la libération de son impulsion créatrice. Nous n’osons néanmoins pas toujours lui accorder son espace.
Daimon et l’eudémonisme : une question de courage
Dr James Hillman suggère que peu de choses sont aussi décisives que d’apprendre à écouter cet esprit, cette entité magique et colorée qui habite toutes nos motivations. Par conséquent, rien ne peut nous inspirer davantage que cette phrase inscrite dans le pronaos du temple d’Apollon à Delphes : “connais-toi toi-même”.
- Celui qui cesse de regarder à l’extérieur, de regarder ce que les autres veulent, et s’engage finalement dans le voyage de la connaissance de soi, pourra atteindre son daimon.
- Embrasser l’eudémonisme n’est pas toujours facile. En effet, le daimon veut parfois des choses que notre environnement ne comprend pas. Un avocat pourrait ne pas vouloir pratiquer le droit mais devenir artiste. Il se peut que l’artiste célèbre et fortuné ne veuille plus créer, que son daimon lui demande d’effectuer un travail humanitaire. Il se peut que notre daimon réclame une plus grande indépendance, des espaces propres et des libertés que nous n’osons pas demander.
L’eudémonisme exige sans aucun doute de fortes doses de courage. Plus encore, si nous osons écouter cette voix intérieure, ce daimon agité et affamé pour faire des choses, il nous soumettra à diverses punitions. Comme le rappelle Carl Jung, si nous ne sommes pas capables d’écouter les besoins du daimon, notre âme tombera malade. Car aller à l’encontre de nos désirs et de nos motivations engendre le malheur.
Comment cultiver l’eudémonisme ?
Nous savons déjà que rien ne peut être aussi décisif que de favoriser la connaissance de soi. Prendre contact avec nos désirs, nos essences, nos identités et nos valeurs personnelles est sans aucun doute un moyen d’embrasser notre daimon et de le reconnaître. Cependant, il ne suffit pas de prendre contact avec lui, en disant “je sais que tu es là”. Nous devons lui accorder de la liberté, de la liberté créative, de la liberté d’expression.
Cultiver un authentique eudémonisme nécessite de faire des changements. Cela implique de laisser de côté les schémas imposés par l’extérieur et de pouvoir créer notre propre réalité. Nous devons par ailleurs être pleinement conscients de la complexité de notre environnement, où l’imprévu, l’incertitude et les difficultés seront constants. Le daimon veut des choses. Mais pour atteindre l’eudémonisme, nous devons également faire face à des scénarios où il n’est pas facile de s’exprimer, de se réaliser soi-même.
Il convient ici de nous souvenir de ce qu’Emmanuel Kant expliqua une fois : pour être heureux, nous devons apprendre à être intelligents. Autrement dit, nous devons être en mesure de choisir les moyens appropriés pour atteindre le plus grand bien-être personnel. Il est clair qu’une telle entreprise, un tel objectif, est loin d’être facile.
Nous avons toujours recourir à la thérapie jungienne pour cela. Cette approche thérapeutique est précisément orientée vers cette fin, à mettre l’eudémonisme à notre portée en nous aidant à discerner notre singularité et notre potentiel pour atteindre le bonheur que nous voulons, celui qui nous convient.
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