Les 5 psychotropes qui ont changé l'histoire
Rédigé et vérifié par Psychologue Cristina Roda Rivera
Les symptômes associés aux maladies mentales proviennent de facteurs biologiques ou environnementaux, mais aussi de modèles de comportement inadaptés. Bien que de nombreux professionnels de la santé mentale pratiquent la psychothérapie, les psychiatres quant à eux ont une formation de médecin. Ces derniers peuvent donc prescrire des psychotropes dans le cadre de leur traitement.
La psychothérapie et les médicaments de type psychotrope s’avèrent tous les deux efficaces dans le traitement de nombreux troubles psychiatriques. Bien souvent, c’est une combinaison des deux méthodes qui fonctionne le mieux.
La naissance de la psychopharmacologie moderne remonte aux années 1950. C’est à cette époque qu’une série de découvertes scientifiques a changé à jamais le cours de la psychiatrie mais aussi la vie de millions de patients.
Bien que certaines des substances psychotropes suivantes ne soient plus couramment utilisés, elles ont radicalement changé le paysage thérapeutique. En effet, elles permettent aujourd’hui à la psychiatrie de traiter des troubles qui étaient autrefois considérés comme incurables. Leurs découvertes comptent parmi les plus grandes avancées de l’histoire de la médecine.
Les médicaments les plus importants dans le domaine de la santé mentale
1. Les psychotropes qui stabilisent l’humeur : Le carbonate de lithium
C’est en 1948 que John Cade, un psychiatre australien, a découvert que le lithium pouvait être utilisé dans le traitement des troubles bipolaires. En effet, le lithium neutralise l’acide urique. Or à l’époque, on croyait que ce dernier était responsable de la démence.
Il s’est avéré que la bipolarité n’a rien à voir avec l’acide urique. Cependant, le lithium est désormais d’une grande aide pour soulager les patients atteints de ce trouble.
C’est ainsi que le lithium est devenu le premier psychotrope moderne. Son efficacité en tant que traitement contre la démence fut démontrée en 1949. Peu avant la découverte de la chlorpromazine. Le lithium est alors devenu le premier médicament spécifiquement destiné à traiter un trouble psychiatrique précis.
Plus de soixante-dix ans après sa découverte, le lithium reste le médicament le plus efficace de toute la psychiatrie. Son taux de succès est de plus de 70% pour les patients souffrant de troubles bipolaires. Il possède également des applications intéressantes dans le traitement de la dépression unipolaire.
La découverte du lithium en tant que traitement efficace contre la bipolarité a marqué le début de la révolution des produits psychotropes en psychiatrie. Pour la première fois dans l’histoire, quelque chose pouvait être fait pour traiter les maladies mentales graves.
2. Les psychotropes pour les psychotiques : la chlorpromazine
La découverte quelque peu accidentelle du lithium en 1948 fut suivie peu après par une autre découverte extraordinaire. Il s’agit du premier médicament antipsychotique au monde.
En 1949, Henri Laborit, un chirurgien militaire français basé en Tunisie, cherchait un moyen de réduire le choc opératoire. Il travaillait sur un antihistaminique, la chlorpromazine. Il a alors découvert que ce dernier avait des effets psychologiques profonds sur les patients lorsqu’il leur en était administré avant une opération.
En 1952, Laborit a réussi à convaincre un psychiatre d’administrer pour la première fois ce médicament à un patient schizophrène.
L’utilisation de la chlorpromazine, le premier neuroleptique au monde, s’est répandue en Europe. Cependant, aux États-Unis, alors “dominés” par la psychanalyse, sa diffusion fut plus timide.
En effet, à cette époque, les psychiatres américains cherchaient des explications psychosociales à la schizophrénie. Il était alors question de la théorie de la “double contrainte” de Gregory Bateson. Dans ce contexte, tout ce qui avait un rapport avec les produits psychotropes ne présentait donc que peu ou pas d’intérêt.
Le groupe pharmaceutique qui produit la chlorpromazine (sous le nom commercial de Thorazine) a choisi de faire sa promotion auprès des institutions gouvernementales. Et ce, au détriment des psychiatres et des écoles de médecine. L’argument alors avancé était que ce psychotrope pourrait permettre aux programmes gouvernementaux en matière de santé mentale d’économiser des sommes d’argent considérables.
Peu de temps après, presque tous les grands hôpitaux psychiatriques des États-Unis avaient souscrit à l’utilisation de la chlorpromazine. L’introduction du Thorazine aux États-Unis a contribué au mouvement de désinstitutionnalisation. Ainsi, le nombre de patients hospitalisés est passé d’environ 600 000 en 1952 à 160 000 en 1977.
La chlorpromazine reste l’un des médicaments antipsychotiques les plus efficaces. C’est particulièrement vrai pour les patients gravement malades. Il a des applications bénéfiques dans les situations d’urgence. Avec le lithium, il figure sur la liste des médicaments essentiels publiée par l’Organisation Mondiale de la Santé.
3. Les psychotropes pour traiter les troubles de l’humeur : L’imipramine
La troisième découverte historique qui a marqué les débuts de la psychopharmacologie est celle de l’imipramine. Le premier antidépresseur tricyclique.
Le développement de la chlorpromazine, le premier antipsychotique, était lié à des recherches sur les antihistaminiques. Il en est de même concernant la synthèse de l’imipramine, le premier antidépresseur.
Au début des années 1950, les entreprises pharmaceutiques cherchaient de nouveaux médicaments pour concurrencer la thorazine sur le marché de la schizophrénie.
Roland Kuhn, un psychiatre suisse qui s’intéressait davantage à la dépression qu’à la schizophrénie y est parvenu. Alors employé par la société pharmaceutique Geigy, il a décidé d’agir dans le dos de son employeur qui finançait ses recherches. Il a en effet administré ce composé dans le but de lutter contre la dépression. Les résultats obtenus représentent une révolution pour l’époque.
Quelques semaines seulement après qu’on leur ait administré un traitement à base d’imipramine, les patients de Kuhn souffrant de dépression chronique commencèrent à retrouver de la motivation et de l’espoir. Ils ont très bien répondu à ce nouveau médicament. Ainsi, leurs symptômes dépressifs, autrefois considérés comme incurables, ont disparus.
Avec la découverte de l’imipramine, la psychiatrie avait enfin un traitement biologique efficace pour ses trois principaux troubles. A savoir, la schizophrénie, les troubles bipolaires et la dépression.
Pendant de nombreuses années, l’imipramine a été considérée comme la “référence” dans le traitement de la dépression sévère. Son utilisation régulière a été ensuite largement remplacée par les nouveaux ISRS et IRSN. Elle reste cependant encore aujourd’hui utile dans le traitement des dépressions atypiques et réfractaires.
4. Les psychotropes pour l’anxiété et l’insomnie : Le valium
Le Valium a été découvert par le chimiste Leo Sternbach à Hoffman-La Roche dans le New Jersey en 1963. Il s’agit du deuxième benzodiazépine découverte, après le Librium, en 1960.
Les benzodiazépines sont devenues très populaires dans les années 1960 et 1970 en tant qu’anxiolytiques. Et ce, parce que leurs effets secondaires étaient bien moindres que ceux des barbituriques, la génération précédente de sédatifs.
Une overdose de barbituriques était en effet facilement mortelle. C’est certainement pour cette raison que subsiste la croyance populaire qui veut qu’on puisse “se tuer avec des somnifères”.
Les benzodiazépines ne sont mortelles que dans des cas exceptionnels. Les conséquences d’une overdose sont rarement dramatiques. Cependant, ils sont fortement addictifs. Ce sont à la fois des sédatifs, des anxiolytiques et des hypnotiques. Tout dépend de la molécule en question, de la dose et de sa demi-vie.
5. Les médicaments pour l’humeur: Le prozac
Au cours des 30 dernières années, certainement aucun autre médicament psychiatrique ne s’est fait un nom comme le Prozac (fluoxétine). C’est Eli Lilly and Company qui l’a développé en 1970 avant de la commercialiser aux États-Unis. C’était alors l’un des premiers médicaments de type ISRS.
Depuis l’introduction de Prozac, d’autres ISRS ont vu le jour. Chacun avec une structure chimique légèrement différente et un profil d’effets secondaires distinct. Ils restent cependant similaires dans leur mécanisme de base et leur efficacité. Ces médicaments produisent très peu d’effets secondaires et leur éventail d’actions et d’indications sont très larges.
Parmi les ISRS on peut mentionner la fluoxétine, la fluvoxamine, la paroxétine, la sertraline, le citalopram et l’escitalopram. La découverte de médicaments de type ISRS est une véritable prouesse historique en psychiatrie. C’est aujourd’hui le médicament le plus largement prescrit en cas de dépression clinique, de troubles anxieux ou de troubles obsessionnels compulsifs.
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