La dépression est un trouble plus dur que n'importe quelle métaphore
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
La dépression est l’un des troubles mentaux les plus intéressants pour les métaphores. C’est comme si elle nous menait irrémédiablement à la tristesse, la tristesse nous emportant ensuite vers une mer. Ou, plutôt, vers un puits profond et obscur qui n’aurait qu’une porte de sortie lointaine. La dépression fait penser en quelque sorte à des chaînes invisibles qui nous emprisonnent.
Elles le sont parce qu’elles nous musellent avec leur poids et non avec leur tension, parce qu’elles se nourrissent de mélancolie et pas d’huile. Leur pouvoir est de nous faire croire que nous sommes petits, maladroits et inhabiles.
“Car il ne me reste qu’une chose tremblotante/ Qui ne pourra jamais rien devenir/ À part un oiseau aux ailes brisées/ Te fuyant en vain.
Je ne puis te donner l’amour/ Depuis si longtemps donné/ L’amour qui m’a abattue et terrassée/ Sur la neige aveuglante.”
-Epuisée. Worn Out, Elizabeth Siddal (1829-1862)-
La dépression vue de l’extérieur
Ceux qui voient la personne dépressive de l’extérieur en arrivent à penser qu’ils la comprennent. Oui, ils le pensent. Ils affirment qu’ils se sont aussi sentis tristes et u’ils ont traversé des moments au cours desquels ils ne voyaient pas d’issue. De ce souvenir, il leur reste la sensation que la patience est une arme dont nous sous-estimons la valeur, que le temps continue de passer même avec la tristesse et même si tout semble immobile et sans importance autour de nous.
Ainsi, ceux qui pensent qu’ils comprennent la personne n’hésitent pas à la motiver parce qu’ils voient sur son visage le même schéma qu’ils ont connu autrefois. Cependant, la dépression est plus qu’une semaine de tristesse ou qu’un deuil qui est ancré en nous. La dépression est un trouble qui nécessite l’intervention d’un professionnel et, en réalité, peu de métaphores reflètent sa dureté.
Ce n’est pas uniquement un tunnel obscur et sans sortie, c’est aussi un tunnel dans lequel l’air manque et où l’on ne peut respirer. Un espace où la personne ne peut pas se déplacer et se sent coupable. C’est une situation au cours de laquelle règne l’impuissance du “vouloir” et de ne “pas pouvoir”. Un lieu où les questions mordent et où tout ce qui se trouve hors de l’interrogation est vu comme une menace.
Un lieu où le courage est terni et où les yeux sont protégés par une vitre de larmes qui ne sortent pas toujours. Une vitre qui magnifie le négatif et devient opaque face aux opportunités. Au final, nous parlons d’un endroit où la motivation est nécessaire mais où les outils et les facultés émotionnelles le sont encore plus.
Un lieu où les questions mordent et où tout ce qui se trouve hors de l’interrogation est vu comme une menace.
La dépression rend les victimes coupables
Une personne souffrant de dépression n’est pas seulement une personne triste. En fait, elle ne semble pas toujours triste. Même si c’est l’émotion qui ressort le plus dans le stéréotype, ce n’est pas toujours celle qui prédomine. Très souvent, et surtout chez les enfants, une chose se produit et beaucoup de gens l’ignorent: cette tristesse se transforme en colère. Cela se passe aussi chez les adultes car même s’ils ont plus d’outils de régulation émotionnelle, il y aura toujours cette lutte et cette sensation de frustration parce que les résultats n’arrivent pas.
Oui, en colère. Une colère se collant aux personnes de l’entourage qui essayent d’aider, anesthésiant toute empathie. Ce visage de la dépression, qui n’est pas facilement reconnaissable, éloigne ceux qui tentent d’apporter leur aide et qui sont fatigués de donner des conseils, des solutions faciles et utiles pour eux, mais que l’autre ne suit pas.
C’est à ce moment que la personne souffrant de dépression peut cesser d’être une victime et devenir la coupable. Ainsi, même si elle continue de souffrir, les autres peuvent croire que la position dans laquelle elle se trouve est très pratique : elle ne travaille pas, elle ne fait rien à la maison et elle passe ses journées à se reposer. À se reposer de quoi ? Si elle ne fait rien…
Comme nous l’avons vu, la dépression est un trouble beaucoup plus complexe qu’une émotion. Il s’agit d’un mal profond face auquel tout le soutien du monde est nécessaire, mais un soutien bien contrôlé, avec intelligence. Si ce n’est pas le cas, la force de cet appui pourra enfoncer encore plus la personne.
C’est pour cela qu’il existe de bons professionnels et que les amis sont nécessaires, mais insuffisants. On peut avoir la sensation que la personne dépressive est comme un sac vide pour les conseils. Si nous voulons aider, ne sous-estimons pas ce trouble, n’en faisons pas des métaphores parce que nous courons le grand danger de les écrire de manière incomplète; cela se transposera sur notre manière d’aider, et peu importe que nous agissions avec la meilleure intention du monde.
Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.