Familles narcissiques : usines à souffrance émotionnelle
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Les familles narcissiques sont de véritables toiles d’araignées. En leur sein, certains membres, en particulier les enfants, se retrouvent pris au piège de la souffrance émotionnelle. Ce types de dynamiques voient toujours apparaître un membre mettant ses propres besoins avant ceux des autres, érigeant ainsi un pouvoir absolu. Ce pouvoir, dans de nombreux cas, sert à boycotter et à manipuler dans un but unique : être nourri, reconnu et approuvé à tous les niveaux.
Les personnes ayant grandi dans un environnement dysfonctionnel présentant ce types de caractéristiques tendent à coïncider lorsqu’il s’agit de refléter une réalité : “d’un regard extérieur tout le monde pensait que ma famille était parfaite, mais de l’intérieur nous vivions en enfer”. Il n’est pas facile de sortir de telles situations, et bien que ce types de liens possèdent souvent leurs propres empreintes et leurs propres particularités, nous pourrions dire que les familles narcissiques présentent un certains nombre de points communs.
Le plus caractéristique est sans aucun doute l’existence d’un ensemble de règles tacites très spécifiques qui se développent au sein de ces foyers toxiques et, surtout, pathologiques. Il s’agit de normes qui sont érigées autour d’une personne et où les autres membres se voient refusés tout droit de veto, toute reconnaissance. Il est dès lors fréquent que les enfants souffrent d’un manque affectif de la part de leurs parents, que cette affection leur soient refusée et qu’ils soient soumis à de mauvais traitements silencieux et permanents.
D’autre part, il est très commun que ce type de dynamiques soient systématiquement passées sous silence dans les ramifications de notre arbre généalogique. En effet, au moment où l’enfant, déjà converti en adulte, parvient finalement à quitter cet environnement dénigrant, il est courant que le père, la mère ou les deux le qualifient de “mauvais fils” pour les avoir abandonnés, pour avoir osé couper ce lien.
“L’enfant qui vit ou a vécu dans une famille narcissique rencontre des difficultés pour démontrer l’abus subi, le manque émotionnel ou le préjudice psychologique subi. Aux yeux des autres, sa famille était parfaite …”
Familles narcissiques et “boucs émissaires”
Sara a 20 ans et étudie la psychologie. Cela fait un an qu’elle ne vit plus avec ses parents et maintenant, de loin, elle essaie de reconstruire sa vie. Prendre du recul et reconstruire des fragments internes pour surmonter le passé et essayer d’avancer. Sa blessure est concentrée dans cette famille narcissique avec laquelle elle dut grandir et où le jeu des forces se réalisait et était partagé entre ses deux parents.
Son père souffrait d’un trouble de la personnalité. Elle sait désormais cela grâce aux études qu’elle mène ; néanmoins, personne n’a jamais osé lui recommander de demander de l’aide à un professionnel. Elle ne le fit pas car le contexte dans lequel elle vivait fit de son possible trouble narcissique une caractéristique terriblement fonctionnelle. La raison ? Sa mère en était l’instrument principal, mais aussi une victime supplémentaire, quelqu’un qui cédait à chacun de ses besoins et qui ne pouvait jamais opposer de limites.
Sara, d’autre part, était le “bouc émissaire”, l’écran de projection d’un père narcissique, le réceptacle de ses frustrations, de ses échecs et de sa colère. Sa sœur aînée, en revanche, était “l’enfant parfait”, c’est-à-dire cttte personne utilisée par le narcissique afin de la modeler à son image et qui, pour une raison quelconque, considérait qu’elle était dotée de davantage de talents que Sara ; la situation l’affecta tellement qu’elle en vain à penser qu’elle avait quelque chose de “défectueux”.
“Il faut toutefois préciser que bien que le “bouc émissaire” dispose de la pire position au sein des familles narcissiques, “l’enfant parfait” ne bénéficie tout de même pas dans d’une meilleure position. Des attentes si élevées sont placées en lui ou elle que la souffrance est également plus que garantie.”
Dynamiques communes des familles narcissiques
Lorsque nous en traçant le portrait, nous pouvons supposer qu’il n’est pas une tâche aisée de quitter ces environnements. Il en est ainsi car le fait d’y avoir grandi suppose d’avoir intégré de nombreux mandats, de nombreux schémas et des rhétoriques destructrices qui ont un impact considérable sur l’esprit des enfants. Voici quelques unes de ces dynamiques :
- Ta famille est la meilleure, ne dis pas au monde extérieur ce qui s’y passe. La famille narcissique prend grand soin de l’image. En effet, l’un des messages qui s’y répète le plus est que “nous n’avons pas de problèmes, nous sommes une famille parfaite”.
- Dysfonctions parentales. Si dans une famille normale, l’objectif des parents est de nourrir émotionnellement les enfants, de leur offrir sécurité, affection et éducation, dans les familles narcissiques les enfants n’ont qu’une obligation : nourrir les parents.
- Manque de communication efficace. Cette donnée est très caractéristiques. La triangulation est le type de communication le plus courant dans les familles narcissiques. En d’autres termes, l’information n’est jamais directe et un comportement passif-agressif clair, basé sur la tension et la méfiance, est appliqué. Par exemple, dans le cas de Sara, notre protagoniste, chaque ordre, souhait ou commentaire émis par son père viendra à elle par l’intermédiaire de sa mère, qui agira comme un intermédiaire et mettra en oeuvre tous ses efforts pour obliger Sara à obéir.
Comment sortir d’un environnement correspondant à une famille narcissique
Mark Twain écrivit dans son livre intitulé Huckleberry Finn que nous ne devons pas à nous définir par les blessures subies au sein de nos systèmes familiaux. Il existe toujours dans un coin de notre cœur une part de notre être propre qui reste aussi “optimiste” que vital, et qui devrait nous permettre de passer du “néant absolu” au bonheur.
Pour y parvenir, pour sortir de cet environnement stérile et vénéneux que supposent les familles narcissiques, il est nécessaire de réfléchir aux dimensions suivantes :
- Comprendre que quelqu’un ayant des antécédents de comportement narcissique ne change généralement pas facilement. Toutefois, il existe des thérapies pour cela, mais très peu de personnes franchissent le pas et admettent que quelque chose en eux ne va pas.
- Essayer de ne pas se sentir coupable de ce que nos proches narcissiques peuvent faire ou ne pas faire. Opposons les protections cognitives suffisantes pour ne pas en arriver à la situation vécue par Sara, et en venir à penser qu’il y a quelque chose en nous “qui ne va pas”.
- Parler de nos émotions ou de ce que nous nous ressentons ne sert à rien face à un narcissique, c’est inutile. Nous pourrions en sortir davantage blessé. Par conséquent, nous devrions nous limiter à utiliser des expressions telles que “je comprends ce que tu me dis, mais je ne permettrai pas que …”, “tu dois comprendre que tu n’as pas le droit de …”, “je te demande que désormais …”. Nous devons établir des limites avec fermeté.
- Trouver des alliés au sein de notre famille ou de notre environnement social, des personnes pouvant nous comprendre et nous soutenir.
- Mettre de la distance avec la famille narcissique. Mettre de la distance ne signifie pas toujours rompre tous les liens, mais plutôt reconnaître avec clarté les situations que nous pouvons gérer, ce que nous pouvons tolérer ou à quelle fréquence nous la verrons.
Pour conclure, vivre dans un environnement où les principes émotionnels sont déformés n’est pas sain ou tolérable, encore moins s’il y a des enfants dans ce contexte dysfonctionnel. Le plus commun est que ces derniers, lorsqu’ils atteignent l’âge adulte, soient le genre de personnes qui ne savent pas dire “non” ou ne comprennent pas qu’elles ont le droit de fixer des limites, de dire clairement ce qu’elles veulent, ce dont elles ont besoin et ce qu’elles ne toléreront pas.
Nous devons par conséquent garder cette information très présente à l’esprit.
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