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Sex Education : une série qui brise les tabous

10 minutes
Aborde-t-on correctement la question des genres sexuels avec les jeunes ? Les films et séries reflètent-ils la réalité ? Sex Education est une série qui ose parler ouvertement des préoccupations des jeunes - et des moins jeunes - en matière de sexualité.
Sex Education : une série qui brise les tabous
Leah Padalino

Rédigé et vérifié par critique de cinéma Leah Padalino

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

Connaissez-vous la série Sex education ? Les séries pour adolescents très populaires auprès des jeunes sont souvent dénuées d’intérêt pour les adultes. Il y a certainement un grand nombre d’exemple à cela même si certaines de ces séries sont meilleures que d’autres.

Dans tous les cas, les jeunes sont friands de séries qui leur sont destinées et ce genre de série est donc largement répandu. Il en existe tant qu’il semble qu’il ne reste pas grand-chose à dire sur le sujet. Pourtant, la série britannique Sex Education semble ici nous démontrer le contraire.

Le problème de ce genre de séries, c’est qu’elles s’appuient sur des personnages qui poussent les stéréotypes à l’extrême. Il y a le sportif, les ados populaires, la jolie fille, le gay, les nerds, etc.

Dans les années 2000, l’arrivée de personnages gay dans ces séries a représenté une nouveauté, mais aujourd’hui, cela ne l’est plus.

Les thèmes abordés eux non plus ne laissent pas beaucoup de place à l’imagination. On y parle d’amour, des problèmes familiaux, du harcèlement à l’école…

Même si Sex Education n’échappe pas non plus à certains clichés, cette série aborde néanmoins un thème inédit pour une série destinée aux adolescents : l’éducation sexuelle.

En outre, la plupart des séries pour adolescents ont la fâcheuse tendance d’être mélodramatiques. Prenez par exemple, 13 Reasons Why, dont la première saison est tirée d’un roman. Cette série traite du thème du suicide, un thème ô combien dramatique.

Ce n’est pas que les idées ne soient pas bonnes. Seulement, on sait que l’adolescence est une période difficile et pleine de changements, alors pourquoi ne pas rire un peu de tout cela ? Pourquoi ne pas rire même de notre propre adolescence ?

Sex Education a raison non seulement de briser les clichés, mais aussi d’aborder l’adolescence sous un angle plus humain et comique.

AVERTISSEMENT : L’article peut contenir des spoilers.

L’autre approche de Sex Education

La série britannique a conquis un bon nombre de téléspectateurs depuis sa première diffusion sur Netflix en mars 2017. C’est une série qui captive les adolescents, mais aussi le public adulte.

Loin de se limiter aux histoires d’amour d’adolescents stéréotypées, elle adopte une perspective différente et le résultat donne une série à la fois amusante, ironique et éducative. Elle porte un regard critique sur notre société et, en particulier, sur comment les questions de sexualité y sont traitées.

Des ados complexes

L’histoire est centrée sur Otis (Asa Butterfield), un adolescent invisible qui passe complètement inaperçu dans son lycée. Cela ne dérange pas du tout Otis. En effet, il aime rester discret et préfère vivre sa vie tranquillement.

Ce n’est pas le cas de son meilleur ami Eric, un jeune homme qui veut se démarquer et devenir populaire. Cependant, Eric est victime de bullying, car il est homosexuel.

Eric est un peu le cliché du garçon gay. Il est d’origine africaine et sa famille est très traditionnelle. Il n’ose donc pas révéler à ses parents sa véritable orientation sexuelle.

Jackson est également un personnage intéressant et atypique. Ce garçon sportif et populaire est issu d’une riche famille homoparentale. Tout semble aller au mieux pour lui dans sa vie.

Cependant, on découvre qu’il est obligé de participer à toutes sortes de compétitions et qu’il est soumis à une énorme pression pour être le meilleur en natation.

Sex Education nous montre donc que l’adolescence est une étape de la vie qui n’est facile pour personne. Les préjugés n’ont parfois rien à voir avec le statut et la position sociale de la famille.

On découvre ainsi Maeve. Cette jeune fille très mature vit dans une caravane sans aucun soutien familiale. Contre toute attente, elle est une étudiante particulièrement brillante.

Bien sûr, beaucoup de ces personnages n’échappent pas aux clichés, mais reconnaissons que l’approche de Sex Education est néanmoins différente de bien d’autres séries.

Des parents qui nous surprennent

Sex Education va au-delà de nombre de préjugés. Le père d’Eric, malgré ses valeurs conservatrices, finira par accepter l’orientation sexuelle de son fils pour l’aimer tel qu’il est.

Ce qui est aussi intéressant, c’est de voir comment certains adultes respectables n’échappent pas non plus à certains préjugés. On le voit par exemple avec la propre mère d’Otis. Cette femme indépendante et ouverte est cependant extrêmement autoritaire avec son fils.

Il en va de même pour le Groff, le directeur de l’école. Malgré sa position sociale et son métier éducatif, il laisse néanmoins beaucoup à désirer en tant que père de famille.

Ainsi, tous les personnages connaissent des insécurités et des craintes. Qu’il s’agisse des adultes et des ados. Ils revêtent souvent un masque pour se protéger.

Sex Education traite cependant tous ses personnages avec respect. La série nous les présente avec soin et en détail pour nous aider à saisir la complexité de leurs réalités.

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Parlons de sexe grâce à Sex Education

Au delà du fait que les personnages soient intéressants et qu’ils dépassent certains clichés, ce qui fait de Sex Education une série vraiment originale c’est qu’on y parle de sexe.

Les jeunes sont-ils suffisamment informés à ce sujet ? À une époque où l’information est facilement accessible, on pourrait penser que chaque adolescent sait tout ce qu’il y a à savoir sur le sexe.

Cependant, Sex Education nous révèle l’autre facette de notre société. Celle où le sexe est idéalisé. Pensant que nous savons tout sur ce sujet, certaines questions importantes sont laissées sans réponse.

Otis a appris tout ce qu’il y a à savoir sur le sexe grâce à sa mère. Cette dernière est en effet sexologue. Riche de ces connaissances, il va devenir le sexologue de son lycée. Les scènes de sexe sont assez explicites et, dans le même temps, plutôt comiques.

Nous y voyons des adolescents assez peu sûrs d’eux. Ce qu’ils savent sur le sujet, ils l’ont appris sur Internet. Mais dans la vie réelle, le sexe n’est pas comme à l’écran. Parlons de la première scène de la série. Elle est en effet extrêmement révélatrice. Il s’agit d’un jeune homme qui simule un orgasme. Et oui, il s’agit d’un homme et non pas d’une femme !

Combien de fois le cinéma nous a-t-il montré une femme simulant un orgasme ? Et combien de fois y a-t-on vu un homme en faire de même ? Probablement jamais ou seulement quelques rares fois. Comme si seulement les femmes pouvaient être capables d’une telle simulation.

Cette première scène est donc d’ors et déjà un geste de rébellion. On comprend tout de suite que cette série va nous parler de sexe sans retenue ni tabou.

Comme son nom l’indique, Sex Education, se propose d’être un cours d’éducation sexuelle, mais dispensé cependant avec un certains décalage et avec humour. Bien plus que d’éducation sexuelle, on pourrait donc parler de normalisation ou de sensibilisation au thème.

Les adolescents soumis à leurs hormones doivent faire face à leurs craintes et à leurs insécurités pour apprendre à s’aimer, mais aussi pour apprendre à s’amuser avec leur partenaire.

C’est ce que la série nous révèle à travers cette jeune ado qui ne s’est jamais masturbée. En taclant le tabou de la masturbation féminine, la série nous montre que cette pratique est essentielle afin d’apprendre à connaître son propre corps. C’est ainsi qu’elle sera capable par la suite de prendre du plaisir et de s’amuser avec son futur partenaire.

A travers ses consultations, Otis aborde toutes sortes de sujets mais toujours dans l’idée de briser les tabous et de montrer la réalité. Par exemple, il démystifie la “première fois” que beaucoup s’imaginent comme étant une expérience idyllique et fascinante.

De même, il met en garde contre la pornographie qui montre un idéal difficile à atteindre et très éloigné de la réalité.

Ces deux cas de figure sont énormément trompeurs pour les adolescents et risquent de les conduire à des fâcheuses déconvenues. On ne déclare cependant pas que visionner de la pornographie soit mal en soi : il est question de faire comprendre aux adolescents qu’il ne s’agit là que d’une fiction.

De même, la première fois peut être une belle expérience, mais on rappelle aussi que le sexe s’apprend avec le temps.

Sex Education nous montre aussi les différentes préoccupations de ces jeunes. Otis est, par exemple, expert en sexe de matière théorique, mais il est encore vierge et incapable de se masturber. La série nous montre encore qu’Eric aime se maquiller, se mettre du vernis à ongles et des vêtements de femmes.

Il y a aussi cette jeune fille obsédée par les bandes dessinées érotiques avec des extraterrestres qui cherchent à perdre leur virginité à tout prix. Les personnages sont variés : c’est une excellente illustration de la pluralité de la réalité sexuelle et des différentes expériences sexuelles qui marquent l’adolescence.

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L’adolescence est le moment de l’éveil sexuel, des premières pulsions et des premières expériences. Pour cela, connaître son corps et ses préférences est fondamental. Ce n’est cependant pas si simple en pratique.

Sex Education semble vouloir aborder tous les aspects de la sexualité. On y parle autant de la cyberintimidation, des dangers du net et des contenus qui y sont partagés que de l’amitié entre femmes, de la question des genres et surtout on y rie de tout. La série ose même aborder le thème de l’avortement.

Ainsi, lorsque Maeve tombe enceinte. Elle sait qu’elle est trop jeune pour être mère, sa situation familiale et économique est beaucoup trop précaire et elle n’est pas en mesure de garantir un avenir à un enfant. C’est pourquoi elle décide de se faire avorter.

Aux portes de la clinique, elle rencontre un couple qui manifeste contre l’avortement, mais ils finissent par discuter avec Otis et parviennent à un accord. Même si chacun conserve ses idées et n’est pas prêt à les changer, ils parviennent malgré tout à avoir un discussion dans le respect et l’écoute.

De même, les genres masculins et féminins sont malmenés. Eric souhaite par exemple se travestir pour aller voir la comédie musicale Hedwig and the Angry Inch qui traite du thème de la transsexualité et de travestissement.

Otis est son meilleur ami et, bien qu’il soit hétéro, il n’hésitera pas à se travestir lui aussi pour l’y accompagner. Se travestir n’est alors plus une particularité exclusivement propre aux homosexuels.

Sex Education est une série à voir absolument. Elle s’adresse autant aux adolescents qu’aux adultes. Son ton humoristique permet d’éviter que le spectateur se sente mal à l’aise et de briser la glace en matière sexuelle.

Bien que nous soyons au XXIe siècle, le sexe est encore, d’une certaine manière, tabou. Ce n’est pas un thème que nous abordons tous les jours. De plus, pour de nombreux parents et de nombreux enseignants, il s’agit d’un sujet difficile à traiter avec les jeunes de manière vraiment constructive.

Même les adultes avec une plus grande expérience ne savent pas tout sur le sexe, et il n’est pas facile non plus de se mettre dans la peau de ces ados.

Pour toutes ces raisons, Sex Education est une série particulièrement intéressante : elle brise les barrières sociales et met en avant les vertus de la communication et de la compréhension.

Chacun vit sa sexualité comme il le souhaite, en apprenant et en se découvrant. Enfin, Sex Education ouvre ses bras aux différences, au rire et, surtout, au dialogue.

“Vous êtes ce que vous êtes ; ne laissez personne vous dire le contraire.”

Sex Education

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