Nous ne perdons personne car personne ne possède personne

Nous ne perdons personne car personne ne possède personne
Sergio De Dios González

Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González.

Dernière mise à jour : 28 mars, 2016

Avoir est devenu une obsession qui découle du capitalisme. Cela est dû au fait que l’on a configuré un imaginaire selon lequel l’essence ce que nous sommes dépend de ce que nous avons.

On parle d’ “avoir” la santé, non pas d’être en bonne santé. On parle d’ “avoir” un conjoint, non pas d’être dans une relation avec quelqu’un. On parle d’ “avoir” du travail, non pas d’être un travailleur. Cependant, personne ne possède rien ni personne.

“Avoir” a pris le dessus sur “être”, de manière à ce que souvent, nous tombons dans la logique d’essayer de nous définir à travers ce que nous acquerrons.

Nous avons même des difficultés d’identité quand nous perdons ce que nous avons eu pendant un moment.

En termes de biens matériels, on peut dire que presque tout ce que l’on possède est temporaire.

C’est-à-dire que nous en avons le fruit et l’usufruit seulement pendant un moment car cela se finit, s’endommage ou se détériore et nous devons nous défaire de cet objet.

En d’autres termes, nous n’avons pas une totale possession des objets qui nous entourent. Il y a des personnes qui ignorent cette vérité et qui prétendent aussi posséder d’autres personnes.

Cela se présente avec une intensité spéciale dans les relations de couple qui dans la plupart des cas se révèlent être une relation d’exclusivité réciproque.

Personne ne possède personne

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Selon plusieurs recherches, la monogamie n’est pas l’un des traits distinctifs de la nature de la race humaine.

L’évolution montre qu’au début de l’histoire, la polygamie prévalait et que la relation d’exclusivité entre deux personnes était le fruit d’un long et complexe processus culturel.

L’être humain s’est rendu compte que la polygamie pouvait être assez problématique pour une société si complexe comme celle qu’il a construit tout au long de l’histoire.

Cependant, pour une grande partie de l’humanité, la règle du seul et unique conjoint du début à la fin de sa vie est quelque chose de rare. En Occident, aujourd’hui, cela est quasiment absurde.

Même si en principe nous savons tous que les choses fonctionnent ainsi, dans presque toutes les relations de couple, on veut aller au-delà du raisonnable.

Il semblerait qu’il existe un idéal auquel on ne doit pas renoncer : rencontrer quelqu’un qui soit “à nous” pour toujours. 

Une bonne partie des mots et des promesses initiées dans une relation vont dans ce sens. “Je serai tien(ne) pour toujours”, “Notre histoire est éternelle” etc.

Parfois, la relation évolue simplement et le couple apprend à établir un équilibre entre les espaces individuels et les espaces partagés. D’autres fois, on ne renonce pas à l’idéal d’ “avoir” l’autre ou croire qu’on le possède.

Etant donné que la relation de couple implique un pacte d’exclusivité entre les deux parties, certains agissent dans ce sens et attendent ou exigent de l’autre qu’il/elle se comporte comme s’ils se possédaient mutuellement.

C’est-à-dire que la personne croit qu’elle possède son conjoint. On perd la frontière qui sépare la correspondance mutuelle des sentiments et l’instrumentalisation de l’autre personne.

On ne perd pas ce que l’on n’a jamais eu

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Établir une relation amoureuse avec une autre personne ne signifie pas que l’un possède l’autre.

Ainsi, on ne peut pas affirmer qu’une personne “perd” une autre, quand la relation se termine. Littéralement, ce que l’on vit comme étant une “perte” amoureuse est plutôt une évolution à l’intérieur d’un processus.

Les sentiments ne sont pas des choses fixes chez les êtres humains. Bien au contraire, que ce soit nos émotions, nos sentiments, nos besoins, nos attentes et tout ce qui forme notre monde intérieur, tout est en mouvement constant.

Nous avons un tempérament et un caractère qui est plus ou moins insistant, mais notre perception face aux objets d’affection et de désir est relativement instable.

Jusque dans les amours les plus durables et intenses, cela arrive. On n’aime pas la même personne, de la même manière à tous les moments de notre vie.

Parfois, on aime plus, parfois moins. Parfois, on n’aime pas et soudain, l’amour apparaît envers une même personne.

On ne peut même pas dire que nous nous possédons nous-mêmes complètement. Alors comment pouvons-nous penser que nous possédons une autre personne ?

Si nous faisons cela, c’est que nous sommes attrapés dans le fantasme de notre propre ego et cela nous empêche de différencier ce qui nous est propre de ce que nous est étranger. Nous finissons par croire que ce sont les mêmes choses.

C’est pour cela que face à une rupture, nous sentons que nous avons “perdu” quelque chose, comme si nous n’avions plus quelque chose qui nous appartenait auparavant.

Nous oublions que ce qui a changé ce sont les sentiments et les motivations, qui généraient avant de l’intimité et qui maintenant réclament de la distance.

L’unique vide que laisse un être humain dans la vie de l’autre est l’illusion qu’il serait là pour toujours.

Ce que l’on perd en réalité est le maintien de cette illusion, mais pas l’autre personne, car personne ne possède personne.

D’où le fait que, face à ces situations de rupture, au lieu de nous vivre comme un être qui a perdu une partie de lui-même, nous devrions penser l’instant comme un processus de guérison intérieure.

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