Les blessures de l'autoritarisme mettent le plus de temps à guérir
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
L’humiliation, la dénégation, l’agression, la domination…Les blessures de l’autoritarisme guérissent très lentement, laissent des cicatrices et même nous conditionnent sur certains aspects. Ainsi, l’ombre d’un père ou d’une mère autoritaire, d’un couple dominant ou d’un patron narcissique et tout aussi autoritaire peut nous accompagner pendant des années sous la forme d’un nœud que nous ne savons pas défaire.
Il est toujours important de revenir sur ce sujet, celui de l’autoritarisme. Que ce soit d’un point de vue social ou psychologique, il ne fait jamais de mal de souligner cette dimension qui a causé tant de dommages à notre histoire. Depuis que Theodor Adorno a théorisé pour la première fois sur ce sujet en 1950 dans son livre The Authoritarian Personality, ce domaine n’a fait que progresser et prendre forme grâce à la psychologie sociale et aux nombreux travaux et recherches sur le terrain.
“Les blessures émotionnelles sont le prix à payer pour être indépendant.”
-Haruki Murakami-
Cependant, alors que la littérature sur ce type de profil psychologique devient de plus en plus étendue et fiable, nous n’avons pas encore beaucoup de travail sur l’impact que l’autoritarisme peut avoir. Et nous ne parlons pas seulement de l’effet du rôle parental dans ce contexte. Nous nous référons également aux relations affectives et aux scénarios de travail contrôlés par une figure clairement autoritaire.
Ce sont ces microsphères où une série de dynamiques, qui sont aussi fatigantes que nuisibles, se met en place, et que nous ne savons pas toujours comment gérer. Il s’agit d’un sujet important qui mérite d’être approfondi.
Les blessures de l’autoritarisme, des marques qui persistent
Le poète Luis Cernuda a dit que nous sommes tous des échos de quelque chose. Nous portons tous une voix, un poids, un fardeau qui nous conditionne consciemment ou inconsciemment. Nous savons, par exemple, qu’une enfance d’abus et de maltraitance génère un effet traumatique qui affecte les enfants à tous les niveaux : émotionnel, psychologique, développement…Maintenant, le voile de l’autoritarisme est présent à bien des égards dans notre société et, plus encore, il ne coexiste pas seulement avec nous : nous lui permettons d’exister.
Il y a des mères et des pères qui sous-estiment leurs enfants, les maltraitent et limitent leur développement émotionnel. Il en va de même pour de nombreuses organisations et entreprises. Nous valorisons l’innovation, la créativité et le capital humain, mais il y a encore des gens dans la gestion qui préfèrent la docilité et qui n’hésitent pas à sous-estimer et à contrôler leurs employés.
Le Dr Eric R. Maisel, psychologue et écrivain bien connu de l’Université de Californie, a validé il y a un an un questionnaire pour évaluer les blessures de l’autoritarisme. Cet instrument intéressant nous permet d’explorer l’impact que ces types de dynamiques ont sur les êtres humains. Ainsi, et après avoir appliqué ce test dans de multiples contextes sociaux : universités, centres de santé et entreprises de renom, il a été possible de conclure qu’une grande partie de la population “porte” l’empreinte de cette marque, celle que l’autoritarisme a exercée à un moment de notre vie.
L’impact de l’autoritarisme
L’échelle d’Eric R. Maisel mesure dix dimensions qui peuvent se produire dans n’importe quelle relation de famille, de couple, de travail, etc. Identifier ces caractéristiques nous aiderait à réduire l’impact négatif de l’autoritarisme et à agir de manière adéquate avant que ces conséquences ne s’enracinent dans notre pensée et notre dynamique comportementale.
Les voici :
- Des menaces et le recours à la peur ou au chantage
- Une sous-estimation
- Des règles chimériques (peu claires, dénuées de sens ou variables)
- La haine : cette émotion est toujours présente, elle est projetée sur nous ou sur les autres. L’autoritaire a toujours sa “liste noire”, les gens qu’il déteste et considère ses ennemis
- Ils ont leur propre vérité, leur propre schéma et leur propre conception du monde. Le reste d’entre nous a tort
- Ce sont des contrôleurs, mais le besoin de contrôle de la personnalité autoritaire va bien au-delà. Il aime aussi ridiculiser, humilier
- Une pensée rigide
- Ils sont intrusifs
- Ils se méfient de tout et de tout le monde
- Une absence totale d’empathie
L’anatomie des blessures de l’autoritarisme
Les blessures de l’autoritarisme sont traumatisantes. Elles peuvent changer notre personnalité, conditionner nos choix et même notre apparence. Tout dépendra, sans aucun doute, du temps que nous avons passé en contact avec la figure autoritaire et de la façon dont nous avons mis fin à notre relation avec cette personne.
Voyons donc quel effet ce genre de dynamique abusive et douloureuse peut avoir sur nous :
- Faible estime de soi
- Sentiment que nous n’avons aucun contrôle sur nous-mêmes
- Insécurité
- Stress post-traumatique et anxiété
- Sentiment d’inefficacité
- Frustration et colère accumulée que nous ne savons pas canaliser
Comment guérir les blessures de l’autoritarisme ?
Beaucoup de gens viennent en thérapie après de nombreuses années de travail dans une entreprise. Après avoir quitté ce contrat de travail, ils ressentent le besoin de laisser derrière eux un autre type de contrat : le contrat émotionnel. Cela ne payait qu’avec la souffrance, avec la violation de la dignité et généré par une figure d’autorité qui exerçait abus, contrôle et même humiliation.
La même chose se produit dans de nombreuses relations, où l’un des membres a agi avec la même dynamique. Nous devons donc garder à l’esprit que dans les cas où quelqu’un restreint notre liberté de quelque façon que ce soit, ce qu’il fait est abusif. Il se peut qu’il ne laisse pas de marque physique, il se peut même que notre Code pénal n’enregistre pas certains comportements comme faisant l’objet d’une plainte, mais ce sont des moyens par lesquels nos droits sont respectés et, à ce titre, nous devons nous défendre.
L’intervention psychologique dans ces cas devrait se concentrer sur le rétablissement de l’estime de soi perdue. Ce dont les patients ont besoin, c’est de s’exprimer dans bon nombre de ces situations et de découvrir, comprendre et accepter qu’ils ont effectivement été victimes de violence psychologique. De plus, les thérapies telles que l’EMDR (Reprocessing and Desensitization) sont devenues ces dernières années une stratégie intéressante pour traiter les événements désagréables ou traumatisants, réduire l’anxiété et favoriser la récupération émotionnelle.
Pour conclure, n’oublions jamais l’effet de cette fine pluie d’autoritarisme qui s’installe presque sans que nous le remarquions dans d’innombrables scénarios, tant publics que privés. Les conséquences ont souvent un coût immense.
Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.