Le mouvement d'hygiène mentale de Dorothea Dix

Le mouvement d'hygiène mentale de Dorothea Dix
Sara Clemente

Rédigé et vérifié par Psychologue et journaliste Sara Clemente.

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

Son nom n’est pas très connu.  Nous verrons néanmoins certains aspects de la vie de cette femme importante. Dorothea Dix (1802-1887) n’eut pas une enfance précisément heureuse. En effet, issue d’une famille américaine, elle grandit avec un père alcoolique et une mère présentant de graves troubles psychologiques. De sorte qu’elle développa une grande sensibilité pour les personnes les plus défavorisées et ayant des problèmes d’intégration sociale. Elle est la fondatrice du mouvement connu sous le nom d’hygiène mentale.

À 39 ans, elle devint bénévole dans une prison pour femmes présentant des problèmes de santé mentale. Ceci marqua donc le début de ce courant de pensée. Son idée principale était la généralisation d’un traitement psychologique digne de toute personne, même pour les sans-abri. Les conséquences de cette réflexion étaient multiples et essentielles pour mettre en œuvre la thérapie dite morale et changer les conditions sanitaires des centres dans lesquels vivaient les malades mentaux.

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Les “fous” : les exclus de la société

Les personnes qui présentaient des signes de troubles psychiques graves étaient qualifiées de “folles” au début du XVIIIe siècle. Ce, indépendamment de jugement et de raison. Ils étaient donc traités comme des animaux sauvages devant être regroupés et enfermés dans des asiles de fous. Ils étaient souvent moqués et méprisés. Les conditions dans lesquelles ils vivaient étaient inhumaines. Tout comme les traitements dont ils faisaient l’objet : coups, privation de nourriture, isolement ou administration de substances chimiques.

L’un des facteurs ayant contribué à changer cette conviction fut le traitement administré à Jorge III. Connu comme “le roi fou”, le monarque souffrait en effet de porphyrie. Il s’agit d’une maladie pour laquelle les médecins utilisèrent une méthode curieuse : l’ingestion de grandes quantités de lait d’ânesse. Cette procédure donna ainsi naissance à un début d’optimisme social quant à la possibilité d’effectuer des interventions plus thérapeutiques chez les patients ayant des problèmes mentaux.

La thérapie morale : un traitement humanisé et individualisé

Une approche psychosociale des troubles mentaux naquit donc ainsi. Ce fut au cours de la première moitié du dix-huitième siècle, siècle des Lumières tendant notamment à la reconnaissance des droits individuels, qu’émergea la thérapie morale.

Ce terme était associé à “l’émotionnel“, au “psychologique”, et très étroitement lié à l’existence et à l’accomplissement d’un code de conduite. Certains de ses principes de base étaient le traitement des patients hospitalisés de manière naturelle et respectueuse. De faciliter également le contact et l’interaction interpersonnelle, ainsi que l’attention individualisée.

Cette approche permit d’en finir avec l’idée de confinement et d’isolement. L ‘humanité, l’individualisation et les relations sociales était ici prise en compte. Ce fut donc l’émergence de la thérapie morale en Europe et aux États-Unis qui rendit les institutions psychiatriques (asiles) habitables et en fit des lieux destinés au rétablissement des patients.

Déclin de la thérapie morale

Cette perspective thérapeutique déclina après la première moitié du dix-neuvième siècle en raison d’une forte augmentation du nombre de patients fréquentant ces institutions. Cette augmentation avait une double cause. La première est l’augmentation de l’arrivée des immigrants après la guerre civile américaine. La seconde est l’émergence du mouvement d’hygiène mentale de Dorothea Dix. Ce mouvement eut pour conséquence imprévue et directe une augmentation démesurée des hospitalisations.

Dorothea contracta une maladie du poumon lorsqu’elle arriva en Angleterre. Elle fut en contact avec de nombreux théoriciens qui l’aidèrent à apprendre les théories de l’attention aux aliénés. Parmi elles, la thérapie morale, le contraste entre la vie dans la solitude et dans la société, l’élimination des restrictions mécaniques et l’ergothérapie avec les patients.

Elle put en outre vérifier les conditions déplorables dans lesquelles vivaient les détenues lors d’une visite qu’elle réalisa en tant que bénévole d’une prison pour femmes. Elle en fut si choquée qu’elle décida de s’impliquer au maximum. Elle visita donc toutes sortes de centres et d’établissements correctionnels dans le but de connaître en profondeur les abus subis par ces personnes et changer la situation. Son mouvement d’hygiène mentale préconisa dès lors l’élimination de toute forme de préjugé social. Elle parraina en outre la lutte pour la dignité humaine.

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Réforme des institutions mentales

Elle réussit donc à rassembler suffisamment de preuves pour défier la législature du Massachusetts et pour modifier ces terribles conditions d’insalubrité et les mauvais traitements infligés aux malades mentaux. Son livre, Observations sur les prisons et la discipline dans la prison des États-Unis, publié en 1845, contribua à la création d’hôpitaux psychiatriques dans onze États de ce pays.

Dorothea Dix ne fut peut-être pas l’une des figures féminines les plus célèbres de l’histoire. Elle a néanmoins contribué, à travers son dévouement sans faille, à introduire un aspect éthique et moral dans les thérapies psychiques appliquées aux malades mentaux.

Le traitement déplorable de ces patients aurait peut-être continué pendant des décennies sans son implication. Elle est donc connue, avec d’autres personnes ayant également soutenu cette réforme institutionnelle, comme l’une des promotrices d’une nouvelle ère dans l’intervention et le traitement des personnes atteintes de maladie mentale.



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