Le cerveau d'un menteur fonctionne différemment
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Lorsque quelqu’un ment de façon répétitive, il cesse d’avoir une réaction émotionnelle à ses propres mensonges. Cette absence totale de sentiments rend cette pratique plus facile et devient habituelle. C’est pourquoi les neurologues sont arrivés à la conclusion que le cerveau d’un menteur fonctionne différemment : il s’agit d’esprits habillement entraînés à cet effet.
Nous savons que le cerveau humain se caractérise par sa plasticité. Nous ne serons donc pas surpris d’apprendre que mentir n’est finalement qu’une compétence comme une autre, et que pour maintenir un bon niveau d’excellence, il suffit de pratiquer quotidiennement. Certaines personnes sont passionnées par les mathématiques, le dessin ou l’écriture. Toutes ces disciplines, en elles-mêmes, modèlent des cerveaux distincts basés sur nos modes de vie, nos pratiques habituelles.
La psychologie et la sociologie ont toujours été intéressé par le monde du mensonge et de la tromperie. Cependant, depuis quelques décennies et compte tenu des grandes avancées des techniques de diagnostic, c’est la neuroscience qui nous offre les plus précieuses et inquiétante informations. La raison ? Il est possible que de nombreuses personnes soient surpris si nous disions que la personnalité malhonnête est le résultat de l’entraînement et de l’habitude continue.
Celui qui commence par de petits mensonges en prend l’habitude, induit le cerveau à un état de désensibilisation progressive. Les gros mensonges sont progressivement moins douloureux et deviennent un mode de vie …
Le cerveau d’un menteur et l’amygdale
La plupart d’entre nous sont surpris par certains comportements que nous vivons au quotidien. Nous voyons, par exemple, des politiciens s’accrocher à leurs mensonges, défendre leur honnêteté et normaliser des actes qui sont en soi très répréhensibles et même criminels. Ces dynamiques font-elles parties de leur rôle charge publique ou existe-t-il quelque chose de biologique ?
Tali Sharot, professeur de neuroscience cognitive à l’University College de Londres, dit qu’il existe effectivement une composante biologique, mais également un processus d’entraînement. L’amygdale est incontestablement la structure du cerveau qui est directement liée à ces comportements malhonnêtes. Le cerveau du menteur passerait par un processus sophistiqué d’auto-entraînement où l’individu finirait par mettre de côté toute émotion ou tout sentiment de culpabilité.
Un article très complet publié en 2017 dans la revue Nature Neuroscience détaille cela. Cependant, et pour mieux le comprendre, nous donnerons un exemple. Imaginez un jeune homme qui obtient un poste élevé dans son entreprise. Il recoure à de petits mensonges pour transmettre le leadership et la confiance à ses subordonnés. Ces dissonances, ces petits actes répréhensibles font réagir notre amygdale. Cette petite structure du système limbique liée à notre mémoire et à nos réactions émotionnelles est ce qui limite le degré auquel nous sommes disposés à mentir.
Ce jeune homme finit par transformer l’utilisation des mensonges en une ressource constante. Son travail est dès lors déjà basé sur l’utilisation permanente et délibérée de la tromperie. Lorsque cette approche est habituelle, l’amygdale cesse de réagir. Elle crée une tolérance et n’émet plus aucune réaction émotionnelle. Le sentiment de culpabilité disparaît, il n’existe pas de remords ou d’inquiétude.
Autrement dit, le cerveau d’un menteur s’adapte à la malhonnêteté.
Le mensonge fait travailler le cerveau différemment
Celui qui ment a besoin de deux choses : la mémoire et la froideur émotionnelle. Il s’agit de ce qui nous est indiqué dans l’un des livres les plus complets sur le cerveau d’un menteur : “Pourquoi nous mentons…surtout à nous-mêmes : la science du mensonge”, par le professeur de psychologie Dan Ariely. Il nous invite également à découvrir d’autres processus neurologiques qui ne sont pas moins intéressants sur le sujet.
Une expérience menée par le Dr Ariely lui-même a révélé que la structure du cerveau des menteurs pathologiques dispose de 14% de moins de matière grise. Ils possèdent en outre entre 22 et 26% de matière blanche en plus dans le cortex préfrontal. Qu’est ce que cela signifie ? Fondamentalement, que le cerveau d’un menteur établit davantage de liens entre ses souvenirs et ses idées. Cette plus grande connectivité leur permet de donner de la consistance à leurs mensonges et un accès plus rapide à ces associations.
Toutes ces données nous donnent un indice sur la façon dont se développe la malhonnêteté depuis l’intérieur. A partir des processus cognitifs qui acquièrent graduellement une plus grande solvabilité lorsque nous les pratiquons, alors que notre cerveau cesse également d’inclure la composante émotionnelle à ces actes.
Le Dr. Airely voit dans ces pratiques quelque chose de véritablement effrayant. Le fait que l’amygdale cesse de répondre à certains faits révèle par ailleurs que nous perdons ce qui nous rend en quelque sorte humain. Celui qui ne voit pas que ses actes ont des conséquences pour les autres perd sa noblesse, sa bonté naturelle, laquelle devrait normalement nous définir.
Le cerveau d’un menteur est façonné par un ensemble de motivations obscures. Nous pourrions dire que la personne qui choisit de faire du mensonge un mode de vie possède un certain nombre d’objectifs très précis : désir de pouvoir, de statut, de domination, d’intérêt personnel … Il s’agit de l’idéologie de celui qui décide, à un moment donné, de se prioriser au détriment des autres. Et rien ne peut être plus préoccupant.
Réfléchissons-y.
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