Femmes de sable : le drame du féminicide à Ciudad Juárez
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Femmes de sable est une pièce de théâtre du dramaturge Humberto Robles. Il s’agit d’une proposition testimoniale de femmes qui parlent, sur fond d’horreur, de la torture des féminicides qui ont eu lieu à Ciudad Juárez (Mexique). Femmes de sable met en scène de manière latente la déclaration de dénonciation, créée avec un profond sens humain et soutenant le mouvement des proches des femmes assassinées.
Humberto Robles est écrivain, scénariste et activiste des droits de l’homme au Mexique. En 2007, la presse espagnole dit de lui : “Il est peut-être actuellement l’un des dramaturges mexicains les plus représentés dans les théâtres de la communauté hispano-américaine “. “Il est en outre l’un des auteurs les plus prometteurs de la création théâtrale contemporaine au Mexique, ayant également créé des textes engagés sur les conditions de vie difficiles des femmes mexicaines”.
Son oeuvre, Femmes de sable, lève le rideau sur les multiples meurtres et disparitions de citoyennes mexicaines à travers la voix de quatre femmes (une mère, une cousine, une sœur et une jeune assassinée) qui racontent l’histoire de Natalia, Micaela, Lilia Alejandra et Erendira. Toutes furent victimes des féminicides survenus à Ciudad Juárez. Ces témoignages sont entrecoupés de poésie et de statistiques, de chiffres révélant le faible intérêt du gouvernement mexicain pour mettre fin à ces crimes.
Le nombre total de disparues et assassinées est dévastateur. Le climat de violence continue de croître sans que des mesures concrètes soient prises pour clarifier les données de ce fémicide. Le terme de féminicide fait référence aux crimes de haine, au meurtre de femmes parce qu’elles sont femmes. Il définit des faits de gravité maximale qui se produisent dans un contexte de discrimination et de violence de genre contre des femmes et des filles soumises à une déshumanisation impitoyable.
“Il est apparemment facile de faire disparaître la vie. Le problème est de faire disparaître les morts. Un cadavre s’enterre, un fantôme, non. Tuer ! Et après ? Pourquoi fermer la porte au vivant pendant le jour, si le défunt vient tous les soirs s’asseoir au bord du lit ?”
-Barret-
Femmes de sable : les victimes de Ciudad Juárez
La grande majorité des victimes ont des caractéristiques communes : l’âge (jeunes et adolescentes de 15 à 25 ans) et le peu de ressources économiques disponibles. Ces femmes ont dû, dès leur plus jeune âge, se débrouiller seules et leur unique issue consistait à travailler dans des usines ou des “maquiladoras”.
La “maquiladora” est l’industrie qui produit ou fabrique des produits d’exportation. La plupart des commandes qu’elles reçoivent viennent des États-Unis. Les compagnies sont des filiales américaines qui s’installent au Mexique pour obtenir une main-d’œuvre moins chère.
Ces jeunes femmes travaillent plus de 12 heures par jour pour un salaire minimum. Les conditions de travail sont en outre très précaires. Elles ne bénéficient pas de droits du travail ni de conditions de travail appropriés. De sorte que la disparition d’une femme n’attire pas beaucoup l’attention. Il est en effet considéré comme normal qu’elle ait pu quitter son travail. La chose effrayante, c’est que presque toutes les employées des maquiladoras connaissent un cas de fille disparue.
Croix roses : emblème des disparues
Plus de 20 ans se sont écoulés depuis que le premier cas de disparition a été signalé. Le premier féminicide documenté était celui d’Alma Chavira Farel, 13 ans, dont le corps a été retrouvé le 23 janvier 1993, après avoir été agressée sexuellement et étranglée. L’horreur commença ainsi. Les croix roses furent dès lors le symbole de ce féminicide.
Les proches des victimes peignent, placent ou enterrent des croix roses sur fond noir dans tous les endroits où une disparition est enregistrée. Il s’agit d’un symbole de protestation contre le féminicide. Cependant, les autorités les suppriment généralement ou les font disparaître pour réprimer les dénonciations ou minimiser leur visibilité..
Les croix roses sont également présentent lors des manifestations populaires visant à protester contre ces événements. Elles sont portées par des parents, des amis et des sympathisants de la cause contre le meurtre et la disparition des femmes à Ciudad Juarez. Ils se déplacent dans les rues en portant des croix avec des messages sur lesquels nous pouvons lire “État Féminicide” ou “Pas Une de Moins”. Une croix est placée sur chaque banc, mur ou espace vide.
“Les concentrations sont de plus en plus nombreuses face à l’indignation de la population et une marée rose inonde les rues de Ciudad Juarez réclamant justice.”
L’impunité est présente à chaque fois que nous parlons du fémicide de Ciudad Juárez. La mauvaise gestion, la corruption et la négligence des autorités mexicaines ont conduit la Cour interaméricaine des droits de l’homme à prononcer une condamnation historique. Le Mexique a été condamné pour fémicide pour la première fois en 2009. Mais le gouvernement n’a à ce jour pas été en mesure de réagir ou de faire face à ce type d’abus et de meurtre, lesquels se produisent toujours au quotidien.
Pour les proches des victimes de fémicide, la reconnaissance du crime est la première étape pour atténuer le calvaire qu’elles traversent. Leur voix est leur arme principale.
“Le crépuscule de la disparition baigne tout avec la magie de la nostalgie.“
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