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Apprendre à aimer selon les clés d'Erich Fromm

6 minutes
Apprendre à aimer selon les clés d'Erich Fromm
Valeria Sabater

Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater

Écrit par Valeria Sabater
Dernière mise à jour : 15 novembre, 2021

L’amour, selon Erich Fromm, doit être célébré chaque jour comme un acte libérateur et enrichissant. Celui qui parvient à apprendre à aimer de façon mature et consciente comprend que l’amour n’a rien à voir avec des possessions ou des conditions. L’amour est, par-dessus tout, la préoccupation active pour la vie; c’est le soin et le désir ferme de favoriser le développement de ceux que nous aimons.

Il est possible que Fromm lui-même n’ait jamais deviné la transcendance qu’allait avoir son livre L’art d’aimer. Il est également probable que beaucoup de personnes ignorent les conditions dans lesquelles il a donné forme à ce fabuleux travail. Ceux qui ont eu la chance de connaître ce psychanalyste et philosophe humaniste d’origine juive avaient l’habitude de dire que peu de gens ont donné une autre direction à leur vie comme lui l’a fait.

“La réponse mûre au problème de l’existence est l’amour”.

-Erich Fromm-

Jusqu’aux années 50, Fromm était ce grand érudit et psychanalyste marxiste qui, à un moment donné, a voulu s’éloigner des bases théoriques de Sigmund FreudC’était un intellectuel un peu taciturne qui s’est installé aux Etats-Unis à la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Il laissait derrière lui un divorce, le suicide de sa dernière épouse et le souvenir d’une Europe encore fragmentée et en ruines.

Ce fut lors de cette décennie qu’il décida de s’installer au Mexique et de devenir activiste pour la paix et les droits de la femme. Il voulut changer sa perspective des choses, s’ouvrir au monde, au bonheur et à la lutte pour ce qu’il croyait juste. Il se transforma en thérapeute très influent, se lia d’amitié avec le président Kennedy et, pour combler le tout, trouva l’amour auprès d’une femme brillante: Annis Freeman.

Même avec le souvenir amer de ses épouses antérieures, Fromm se fixa un objectif: apprendre à aimer. Il voulait transformer cette étape en la plus belle de son existence et de celle d’Annis Freeman. Et voulait que le reste du monde apprenne aussi à aimer. C’est de là qu’est né son célèbre livre et le bonheur dont il a pu profiter lors des dernières décennies de sa vie.

 

Apprendre à aimer selon Erich Fromm

“Aimer sans savoir aimer blesse la personne que nous aimons”. Cette phrase de Thich Nhat Hanh résume une réalité plus qu’évidente. Nous ne sommes pas souvent maîtres dans cet art, nous sommes plutôt les néophytes d’une réalité dans laquelle nous nous plongeons par hasard, sans trop savoir, en étant emplis de besoins mais en manquant d’outils. Mais si nous nous limitons à aimer comme des enfants et pas comme des adultes, c’est à cause de notre culture.

Nous avons été façonnés à travers une série de schémas culturels dans lesquels l’amour est vu comme une construction aux teintes magiques et idéales. Cet “amour courtois” du Moyen-Age reste présent dans notre tissu social, celui où les chevaliers tombaient amoureux des gentes dames. Nous aimons penser que nous sommes victimes des flèches de Cupidon, que les amants éternels de Vérone de Shakespeare n’ont ressenti que de la passion et que nous sommes tous destinés à quelqu’un grâce au fil rouge du destin.

Erich Fromm, grand psychologue social, a expliqué très clairement dans L’art d’aimer que peu de dimensions exigent autant de responsabilité et de capacité de discernement que l’amour. Car aimer est le travail d’artistes entraînés et pas seulement de rêveurs enthousiastes. Apprendre à aimer demande de la pratique, de la maîtrise et un travail continu. L’effort et les bons gestes ne laissent aucune place au hasard ou à la chance.

Voyons maintenant quelques-unes des clés proposées par Erich Fromm.

L’amour à la voix active

S’il y a bien une chose que nous désirons pendant une grande partie de notre vie, c’est d’être aimés. Nous voulons être appréciés, valorisés, vénérés et validés dans chaque chose que nous faisons, sommes ou avons. Cependant, nous devons comprendre une chose: l’amour à la “voix passive” n’est ni utile, ni mature.

L’amour n’est pas un lieu de repos, c’est un endroit qui se conjugue au présent et à la voix active: s’aimer l’un l’autre, prendre soin de nous, nous respecter, nous valoriser, créer des projets communs… Les bons artistes jouissent d’une maîtrise qui consiste à participer, donner et recevoir, construire et faire partie d’un projet… Une idée de croissance est constamment présente.

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Notre éternelle préoccupation de trouver la personne parfaite

Apprendre à aimer implique aussi d’être conscients d’un autre aspect. Nous nous préoccupons souvent (et excessivement) parce que nous ne trouvons pas cette personne idéale qui entre en syntonie avec tous nos rêves et désirs. Nous nous frustrons parce que nous ne trouvons pas “l’objet” à aimer, sans d’abord penser si nous serons à la hauteur de cet amour.

Nous sommes parfois tellement emplis d’idéalismes et de constructions sorties du romantisme que nous oublions le plus important: l’amour exige du travail. Il implique de savoir affronter les défis qu’implique une relation affective.

L’amour en tant que besoin

Apprendre à aimer implique d’abord de savoir se défaire de tous les besoins. Car celui qui cherche une relation pour soulager ses manques vivra deux choses: il ne sera jamais satisfait et plongera l’autre personne dans un état d’esclavage permanent.

Erich Fromm nous rappelle dans L’art d’aimer qu’une relation affective saine et heureuse doit par-dessus tout constituer un lien hautement productif. Les personnes doivent avoir surmonté leurs vides et leurs dépendances. Il s’agit de faire disparaître l’omnipotence narcissique, le désir d’accumuler et d’exploiter les autres, pour atteindre l’être aimé sans charges et sans peurs et pouvoir nous offrir pleinement.

“La fonction de la nouvelle société doit être de favoriser notre disposition à renoncer à toutes les formes de pouvoir et de possession. Chacun doit parvenir à construire un sentiment d’identité et de confiance basés sur la foi, le besoin de s’attacher, de s’intéresser, d’aimer, de se solidariser avec le monde qui nous entoure, au lieu de se baser sur le désir d’avoir, de posséder, de dominer le monde et de devenir l’esclave de ses possessions.”

-Erich Fromm-

 

L’amour est un acte de créativité

L’amour, selon Erich Fromm, est une énergie. Une impulsion qui nous pousse à nous mobiliser, à nous exprimer, à créer… Cependant, et cela est lié à ce que nous avons dit précédemment, cette force expansive et créatrice n’émerge que quand nos besoins basiques sont comblés.

Fromm souligne dans L’art d’aimer qu’il ne suffit pas de ressentir cette énergie. Souvenons-nous, l’amour ne doit pas être uniquement ressenti: il doit être vécu et avoir une forme. Car la passion authentique, celle qui se nourrit des sentiments, de la maturité et de l’équilibre, comprend que la plus belle des œuvres exige un travail quotidien et un dévouement.

L’amour est comme la musique, la peinture, la charpenterie, l’écriture ou l’architecture. Nous avons besoin d’en connaître la théorie pour ensuite devenir maîtres dans sa pratique. Tout comme un ingénieur extrêmement créatif, nous parviendrons à surmonter chaque difficulté, chaque défi, chaque imprévu avec imagination et efficacité…

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Pour conclure, apprendre à aimer selon Erich Fromm exige de laisser de côté un grand nombre de visions infantiles qui nous définissent souvent (et qu’on nous a enseignées). Nous devons cesser de conjuguer l’amour à la voix passive et de le voir comme cette étincelle qui, à un moment donné, unit deux personnes d’une façon magique. Car l’amour est une substance, une matière, un corps. Une matière première qui nous permet d’édifier, si nous le souhaitons, un grand projet, le plus beau de nos vies…

 

Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.