Quand les "je devrais" contrôlent nos vies
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Laissez-les partir. Laissez partir les “je devrais”, les “je dois” et toute cette tyrannie psychologique avec laquelle nous mettons des bâtons dans les roues à notre bonheur. Très souvent, ils font partie d’un discours automatique à travers lequel nous nous obligeons à aller plus vite que la vie et sapons notre estime de nous-mêmes en priorisant le “je dois” au lieu du “j’aimerais”.
Ce point de vue peut surprendre, oui. Il est clair que dans notre quotidien, nous sommes plus que confrontés à une infinité d’obligations et de devoirs. Nous sommes des êtres sociaux et notre rôle, en fin de compte, consiste à faire partie de cette machine presque parfaite où personne ne doit perdre le rythme. Au cas où nous le ferions, au cas où nous ne respecterions pas nos obligations, d’inévitables conséquences auraient lieu.
Les “je devrais” sont une façon de concentrer toute notre attention sur des aspects que nous ne désirons pas.
Tout cela, nous le savons parfaitement. Nous avons assez de pression externe sur ce point; il ne faudrait pas rajouter un ingrédient encore plus dévastateur. Parfois, nous sommes tellement obsédés par le “je devrais faire plus d’efforts pour montrer ce que je vaux” ou le “j’aurais dû dire ça et pas ça” ou le “j’aurais dû avoir agi d’une autre façon” que la seule chose que nous parvenons à faire est alimenter une frustration, un blocage ou un découragement.
Les “je devrais”, une tyrannie psychologique très commune
Il existe des devoirs en tous genres mais ceux qui consument et sabotent le plus notre personnalité sont ceux que nous nous imposons d’une façon presque obsessionnelle. Je devrais aller voir mes parents plus souvent, je devrais perdre des kilos, je devrais faire plus d’efforts dans mon travail pour monter en grade, je devrais être plus gentil, je devrais être sociable, je devrais avoir ceci et cela pour pouvoir être plus heureux…
Avec ces dynamiques mentales, nous transformons souvent de supposés désirs ou préférences en obligations ou en devoirs de tous genres. Ainsi, quand nous faisons cela et tombons dans la tyrannie psychologique des “je devrais”, plusieurs phénomènes qu’il convient de souligner se produisent :
- Dans un premier temps, nous créons, en réalité, un fantasme sur la façon (selon nous) dont les choses devraient être <-> Je dois montrer aux autres ce que je vaux car c’est comme ça que les gens sont acceptés, en obtenant une reconnaissance externe. Je dois avoir un bon téléphone portable parce que c’est comme ça que la société fonctionne…
- Dans un second temps, nous centrons également toute notre attention sur ce que nous n’avons pas encore ou ce que nous n’avons pas encore atteint. En faisant cela, nous cessons d’explorer d’autres options, d’autres réalités qui pourraient être beaucoup plus utiles et satisfaisantes <-> Pourquoi nous sentons-nous obligés de maigrir ou d’avoir un corps parfait au lieu de nous accepter tels que nous sommes ?
- Un troisième fait que nous pouvons observer avec ce type de comportements et de points de vue mentaux est une perte totale d’énergie et de ressources. Parfois, nous en arrivons même à culpabiliser parce que nous ne respectons pas nos propres “je devrais” et “je dois”. C’est, sans aucun doute, une triste façon de nous auto-saboter.
Comment nous défaire de nos “devoirs” obsessionnels pour nous sentir plus libres
Les “je dois” et “je devrais” font partie de nos points de vue mentaux. En fait, dans un article très intéressant du “Psychology Today”, on nous indique qu’ils font partie de nos circuits neuronaux, qui constituent une sorte de programmation intégrée dans ces aires les plus profondes et primitives de notre cerveau, comme ce peut être le cas de l’amygdale ou du striatum.
Nous intégrons certaines de ces règles internes dès notre enfance; nous sommes toujours obligés de “faire quelque chose” ou de “respecter quelque chose”, de suivre un rôle social ou une règle inconsciente qui nous privent de bonheur et de liberté. Albert Ellis, de son côté, parle de ce type de tyrannies mentales comme des pensées irrationnelles, c’est-à-dire comme une façon de nous auto-détruire en perdant du temps et en faisant des efforts pour quelque chose qui n’a pas de sens, n’est pas utile ou échappe souvent à notre contrôle.
Voyons maintenant quel genre de stratégie nous pouvons adopter pour affaiblir ces “je devrais”.
Comment travailler les “je devrais”
- Approfondissez ces “je devrais” qui sont intégrés dans votre esprit, ceux qui se trouvent au plus profond de vos pensées. Parfois, ils sont devenus si automatiques que nous n’en sommes même pas conscients. Nous ne nous rendons pas non plus compte que ce sont parfois des phrases imposées par d’autres (famille, société…).
- Confrontez-les : “Je devrais davantage faire plaisir aux autres, je devrais faire des efforts pour ressembler à tout le monde” <-> ai-je vraiment besoin d’être comme les autres pour être heureux ?
- Prenez conscience des pensées absolutistes : “je dois réussir cela ou ma vie est fichue” <-> le monde va-t-il s’arrêter de tourner si vous n’y parvenez pas?
- Gardez une trace de vos pensées pour établir un filtre. Une bonne façon de prendre conscience de notre point de vue personnel et de la dynamique de nos pensées est de les écrire. Commencez un journal intime, notez ce que vous dit votre esprit, ce que ressent votre cœur, ce qui vous préoccupe. Plus tard, et au bout de deux semaines, relisez ces écrits et prenez conscience de votre style de pensée. Vous aurez peut-être besoin de prendre le contrôle de certains aspects.
Pour conclure, nous devons accepter que, d’une certaine façon, nous avons tous navigué à bord de ces “je devrais” au cours de notre vie. Il ne s’agit pas non plus de les effacer entièrement de notre esprit, comme si l’on appliquait un vulgaire dissolvant. En réalité, il faut maintenir un équilibre adéquat, une harmonie parfaite entre les “je devrais” et les “j’aimerais”.
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