Quand les amitiés nous déçoivent
Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas
Les amitiés expirent aussi : elles s’éteignent comme la lumière d’une luciole quand on la découvre, comme le premier vent froid qu’apporte l’automne après l’été. Il y a des gens qui nous déçoivent, et la blessure que la perte laisse nous fait mal et nous fâche, cela ne fait aucun doute ; cependant, avec le temps, nous apprenons et commençons à être beaucoup plus sélectifs.
Aussi curieux que cela puisse nous paraître, en matière d’amitié, il se passe la même chose qu’en amour : nous avons les amis que nous pensons mériter. Cela a aussi beaucoup à voir avec l’estime de soi, avec notre capacité à mettre des filtres et à comprendre que les relations, quelles qu’elles soient, sont aussi des entités dynamiques qui changent et mutent comme nos propres identités.
« Un ami est un cadeau que l’on se fait »
-Robert Louis Stevenson-
Désormais, beaucoup de gens affirment que « perdre un amour fait mal, mais perdre une amitié tue ». C’est comme si, en quelque sorte, ce lien fondé sur la complicité, sur cette camaraderie intime et spontanée et sur cette « nutrition » émotionnelle élevée nous conférait une subsistance égale ou supérieure à la relation elle-même.
On peut dire que les études sur l’amitié et ses processus n’abondent pas, pas autant que celles en matière de relation affective et de couple. Les quelques travaux qui existent dans le domaine de la psychologie sociale nous disent cependant quelque chose de très intéressant et parfois frappant : perdre une amitié fait aussi mal que perdre un amour.
L’étude, publiée dans la revue Epidemiology and Community Health, a également souligné que cette sensation était ressentie de manière égale par les hommes et les femmes. Un ami est – pour la plupart des gens – un élément indispensable de notre vie quotidienne, au point qu’il est essentiel à notre bien-être physique et émotionnel.
Des amitiés qu’on ne sait comment rompre
Blanca a 40 ans et a décidé de mettre fin à une amitié qui a duré des années. En fait, elle l’a accompagnée toute sa vie. Elle et Elisa ont grandi ensemble parce que leurs mères étaient déjà amies. Cette fille aux yeux marrons, aux longues jambes et à la voix autoritaire est vite devenue son refuge et son enfer à parts égales.
Quand elles étaient enfants, Elisa l’a forcée à s’impliquer dans des activités qu’elle ne voulait pas. Elle s’est cassé le bras en tentant d’escalader ce mur de l’école avec elle parce qu’elle lui avait dit de le faire, c’est avec elle qu’elle a partagé les premières confidences de ses premières amours. C’est aussi elle qui a « volé » tous les garçons que Blanca a remarqués. Pendant toutes ces années, Blanca a entretenu une amitié codépendante avec une personne manipulatrice, quelqu’un qu’elle ne savait pas comment quitter ou à qui dire « arrête de profiter de moi ».
Il est possible que plus d’une personne s’identifie à ce petit exemple, mais la question clé est : pourquoi est-il si difficile pour nous de mettre fin à des amitiés qui nous apportent plus de problèmes que d’avantages ? Voici quelques explications possibles.
Raisons pour lesquelles nous hésitons à dire « ça suffit » à un ami
La première raison est simple : nous pensons que nous devons être loyal à cette personne ; peut-être parce qu’il y a beaucoup d’expériences partagées, de nombreuses années passées ensemble et de nombreux secrets gardés. Cependant, il y a quelque chose sur lequel nous devons être clairs.
- Dans toute relation, que ce soit en couple ou entre amis, l’équilibre et la réciprocité sont de mise. La fidélité envers quelqu’un n’a pas de sens s’il n’y a pas de respect, s’il n’y a pas de correspondance authentique.
Le deuxième aspect a à voir avec l’idée que nous pouvons changer les autres. On se dit qu’il faut être patient, que ce qui s’est passé aujourd’hui ne se reproduira pas si on les avertit, si on leur dit que cela nous offense, que cela nous fait mal, que cela nous déçoit…
- Un autre aspect assurément inquiétant, qui touche de nombreuses personnes, est de penser que nous avons les amis que nous méritons. On se dit qu’on a tous des « failles », qu’on a tous des défauts et qu’il est parfois normal de faire des erreurs ou de blesser l’autre par inadvertance.
Parfois, la peur de la solitude fait que de nombreuses personnes portent le poids d’amitiés très nocives, épuisantes et toxiques. Ce n’est pas approprié, et il est donc nécessaire de se rappeler ce qui suit : les bonnes amitiés sont celles qui nous rendent meilleurs chaque jour, qui ne cherchent pas à nous changer mais plutôt à nous responsabiliser en tant qu’êtres humains, car nous savons nous-mêmes que nous méritons bien-être, équilibre et bonheur…
La déception dans une amitié implique de prendre une décision
Gretchen Rubin, auteur d’un ouvrage intéressant connu sous le nom de The Happiness Project, explique que beaucoup d’entre nous avançons dans notre vie quotidienne avec le sentiment de dériver. Ce concept est intéressant, car comme l’auteur le décrit lui-même, dériver signifie curieusement prendre la décision de « ne pas décider » de ce que nous voulons et ne voulons pas dans notre propre vie.
« Il y a ceux qui pensent que, pour être amis, il suffit d’aimer, comme si pour être sain, il suffisait d’être en bonne santé »
-Aristote-
Ne pas prendre ou reporter de décisions implique de vivre entouré d’un substitut de bonheur où se rattachent des liens relationnels insignifiants, des personnes qui nous déçoivent sans cesse et que nous gardons toujours à nos côtés. Nous autorisons cela loyauté ou par peur d’être seuls, comme nous l’avons souligné précédemment.
Il faut bien comprendre que ces années d’enfance et d’adolescence où nous n’avons pas appliqué de filtres sont derrière nous. Où nous laissions entrer n’importe qui parce que nous étions avides d’expériences, d’émotions et de nouveautés. La maturité implique avant tout d’être sélectif et de rechercher la qualité dans toutes nos relations.
Les déceptions, si elles sont provoquées délibérément et à plusieurs reprises, nous donnent un indice évident sur la qualité humaine de cette personne. Agissons et prenons une décision, même si cela fait mal, même si cette amitié nous a accompagné pendant la moitié de notre vie ou toute notre vie. Si cela nous fait mal, nous blesse et nous brûle le cœur, ce n’est pas de l’amitié.
Apprenons à être sélectifs, à valoriser les vraies amitiés, les plus magiques et les plus touchantes. Celles qui nous apprennent des choses, qui nous font grandir et que nous faisons grandir, celles qui nous aident à développer la meilleure version de nous-mêmes.
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