Les trois grandes contradictions de l'éducation

Les trois grandes contradictions de l'éducation
Sergio De Dios González

Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González.

Dernière mise à jour : 06 octobre, 2018

Niels Bohr déclara que “le contraire d’une petite vérité est toujours faux. En revanche, les contraires des grandes vérités peuvent également être considérés comme vrais “. Cette phrase illustre parfaitement comment, très souvent, la société maintient une série de “grandes vérités” qui se contredisent. Ce phénomène s’appelle “antinomies”. Il s’agit de paires de vérités qui, bien que paressant toutes deux vraies, se contredisent. Nous parlerons dans cet article de 3 antinomies ou contradictions de l’éducation.

L’analyse de ces contradictions de l’éducation nous aide à comprendre, dans une large mesure, les principes qui régissent le système et ses incohérences. Nous percevons ainsi le conflit existant entre ce que nous croyons qu’elle est, ce que nous voudrions qu’elle soit et ce qu’elle est. La dissonance entre ces trois états se traduit par une série d’affirmations contradictoires pour concilier ces divergences.

Les contradictions de l’éducation

Les trois contradictions majeures dans l’éducation sont : (a) L’éducation pour le développement Vs l’éducation pour la culture. (b) L’apprentissage intrapsychique Vs l’apprentissage situationnel. (c) Le savoir local Vs la connaissance sociale. Nous développerons ci-après chacune de ces antinomies en détail.

contradictions de l'éducation

Education pour le développement et éducation pour la culture

La première des contradictions de l’éducation tourne autour des objectifs de cette dernière. De nombreuses personnes pensent que les objectifs sont le développement personnel de l’individu. En d’autres termes, que ce dernier atteigne son potentiel maximal. De sorte que nous puissions par la même obtenir à un développement global de la société. Toutefois, un autre objectif du système éducatif est d’imprégner / incorporer l’individu de culture vernaculaire. En effet, l’école n’est pas seulement basée sur l’instruction. Elle enseigne également une manière d’être et de se comporter.

Il peut a priori sembler que le développement personnel et la transmission de la culture ne sont pas des objectifs contradictoires. Il s’agit en réalité d’aspects irréconciliables. Le problème est que si la culture est elle-même transmise lorsqu’elle est reproduite, il en va de même pour différents objectifs associés, tels que politiques ou économiques.

Par exemple, une société capitaliste et industrialisée est basée sur une force de travail très puissante et une classe moyenne peuplée. Il est donc normal que le système éducatif se concentre sur les travailleurs non qualifiés et semi-qualifiés. Nous parvenons, e n transmettant la culture, à ce que la société reste stable. Et une éducation basée sur le développement personnel rendrait la culture instable. Elle pourrait en effet provoquer un changement social.

Cette contradiction existe parce que la population, dans une large mesure, veut développer et augmenter son potentiel intellectuel. En revanche, la culture établie ne cesse d’être une sorte de friandise étant donné qu’elle nous apporte la sécurité et le sentiment de contrôle. La culture et le développement nous apportent du plaisir et de la satisfaction. L’antinomie se trouve dans la tentative de disposer des deux. Par ailleurs, la poursuite de ces deux objectifs rend le système éducatif inefficace. Cela induit en outre de nombreuses erreurs. Il convient donc de nous demander quel est l’objectif que nous voulons vraiment pour l’éducation.

L’apprentissage dirigé par l’enfant Vs apprentissage situationnel

Une autre des grandes contradictions de l’éducation tient à la façon dont nous enseignons et évaluons les enfants Il existe une forte tendance au sein du système éducatif à classer les enfants selon la leur performance (notes, participation en classe, comparaisons …). Il en résulte l’idée que c’est l’enfant, à travers ses capacités, qui profite des ressources de l’école. A l’inverse, nous croyons également que l’apprentissage est situationnel.  De sorte que nous pensons qu’il sera plus facile pour l’enfant d’utiliser les ressources scolaires si l’environnement le facilite.

La contradiction est ici plus complexe. Considérer l’enfant ou le contexte comme responsable de l’apprentissage est une erreur. Il est vrai que les deux facteurs influenceront l’éducation de l’enfant. Néanmoins, responsabiliser l’un ou l’autre changera radicalement la politique éducative.

contradictions de l'éducation

Si nous nous basons sur l’apprentissage des enfants, la logique est de fournir les ressources en fonction de leurs demandes. Ces demandes dépendront de leur capacité, mais aussi de leur motivation. Les enfants seront en quelque sorte les directeurs de leur propre apprentissage. La perspective changera en revanche si nous offrons un apprentissage situationnel. Dans ce cas, ce sera le contexte éducatif qui dirigera l’apprentissage.

Notre système éducatif prend des mesures des deux points de vue. Cela génère, à l’instar de l’antinomie précédente, de l’inefficacité et des incohérences. Opter pour une position ou une autre peut s’avérer dangereux. Notamment eu égard au contexte politique et économique entourant l’éducation. D’où l’apparition de cette contradiction. Le point d’équilibre que nous recherchons devrait se fonder sur la recherche et les études scientifiques.

Connaissance locale Vs connaissance sociale

La dernière des contradictions de l’éducation est peut-être la moins explicite du débat éducatif. Cette antinomie s’articule autour de la façon dont nous devons juger les façons de penser, les façons de donner / d’accepter un sens, ainsi que les façons d’expérimenter le monde. Si nous prenons un point de vue constructiviste, nous trouverions le relativisme puisque la réalité est construite par un interprète.

 

Nous avons d’un côté la “grande vérité” selon laquelle la connaissance locale est légitime en soi. Et nous préconisons par ailleurs une confluence globale sur l’interprétation de la réalité. Ces deux affirmations sont clairement contradictoires. Si nous cherchons la connaissance globale, le maintien de la connaissance locale des petites sociétés et des groupes l’entraverait.

Un débat très compliqué apparaît ici. En effet, chaque population ou société a développé ses connaissances locales en raison du contexte et du temps dans lesquels elle existe. Ceci lui confère sécurité et contrôle. En revanche, une connaissance globale nous offre un cadre d’action universel. Cela peut nous être très utile pour progresser dans la coopération. Même si cela comporte également de sérieux dangers. Comme pour les autres antinomies, il est essentiel d’effectuer une analyse. Et d’étudier en profondeur afin de déterminer quelle est la meilleure solution à cette contradiction.

 


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