Le pessimiste défensif, anticiper le pire est-il toujours un inconvénient ?
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
“Je suis sûr que ça va mal tourner.” Combien de fois dans notre vie nous sommes-nous dit cette même phrase ? Très probablement, tellement de fois que nous n’avons même pas compté. Assumer des attentes dans lesquelles l’échec, l’erreur, la déception et même la fatalité est présent à notre horizon, est quelque chose de très courant. Peu de caractéristiques définissent autant l’être humain.
Se mettre dans le pire, malgré le fait que rien n’indique que de telles hypothèses se produiront, définit un type de mécanisme défensif orchestré par une éternelle connaissance : l’anxiété. Malgré le fait de vivre dans une société qui nous répète sans cesse “Regardez le côté positif de la vie !”, il y a ceux qui y résistent et placent leurs yeux sur le “côté le plus sombre”.
Cela présente des inconvénients évidents et certains avantages inhabituels qui doivent être clarifiés. Car l’anxiété, après tout, reste un mécanisme qui cherche à garantir notre survie. Ainsi, et même si cela peut nous surprendre, il y a des moments où anticiper le pire nous permet de mettre plus facilement en place des mécanismes d’adaptation pour faire face à n’importe quel avenir…
À certaines occasions, la pensée négative peut masquer certains avantages et même potentiels. Bien que oui, vous devez faire une lecture correcte de cette approche mentale. Nous l’analysons.
Il y a ceux qui voient toujours des nuages à l’horizon, mais au lieu d’être bloqués par la peur, ils méditent sur les mécanismes possibles pour se protéger contre les tempêtes
Le pessimiste défensif, quand l’anxiété est adaptative
Le pessimisme défensif est une stratégie cognitive définie dans les années 1980 par Nancy Cantor, psychologue et présidente de l’Université Rutgers-Newark. C’est un mécanisme par lequel les gens se préparent au pire face à ces situations qui génèrent de l’anxiété. Il est important de clarifier ce dernier détail.
Nous ne parlons pas du pessimiste récurrent, qui utilise un filtre négatif en toute circonstance. Le pessimiste défensif ne voit des résultats négatifs que dans les événements qui suscitent des inquiétudes. Un exemple de ceci est l’étudiant qui a peur d’échouer à ses examens, ou le candidat à l’emploi qui a peur de ne pas avoir de chance dans ledit processus de sélection et de continuer sans emploi.
Maintenant, il y a une nuance intéressante qui différencie ce type de personne. En anticipant d’éventuels effets négatifs, ils développent une attitude visant à améliorer leurs performances. Ils recherchent des stratégies pour faire face à toute situation de défi, de risque ou de menace. Pour le dire simplement, bien qu’ils n’aient pas déclaré de guerre, ils s’y préparent.
Le pessimisme défensif sait contrôler l’anxiété pour qu’elle serve d’avantage et non d’échappatoire à ses projets.
Quand la pensée négative peut nous donner un avantage
S’il y a quelque chose que nous avons intériorisé presque depuis que nous avons l’usage de la raison, c’est que le pessimisme est négatif et que l’optimisme nous sauve la vie. Cependant, au fil du temps, nous découvrons que l’état d’esprit positif ne nous a pas donné le bonheur éternel ni nous a empêchés de plus d’une adversité. Maintenant… Qu’en est-il du pessimisme ?
La psychologue Julie Norem est connue pour ses recherches sur ce sujet. Dans son livre Le pouvoir positif de la pensée négative (2002) il nous parle précisément de ce type de personnalité, celle du pessimiste défensif. Ce sont les aspects les plus intéressants qui ressortent :
- La pensée positive agit parfois comme une stratégie inefficace face aux problèmes.
- La vie moderne est orchestrée par des dizaines de pressions et de défis. Le pessimiste défensif se définit par une anxiété adaptative, qui lui permet de développer une attitude de coping adéquate face aux difficultés.
- Parfois, la pensée négative nous permet d’élucider des scénarios auxquels nous devons nous préparer. Cela nous donne également une certaine dose de réalité en faisant taire la pensée magique et l’idée que tout ira bien.
- Le pessimiste défensif cherche à contrôler cette anxiété qui paralyse. Au lieu de cela, il en profite et est motivé pour agir à tout coup du sort.
Comment appliquer une approche fondée sur le pessimisme pratique ou défensif ?
Le pessimiste défensif, comme nous l’avons déjà souligné, ne se laisse pas emporter par cette négativité qui bloque et entrave toute réalisation, tout progrès. Nous n’avons pas affaire à un type d’attribution dans lequel la personne voit tout de manière défavorable, car elle se sent inutile, peu sûre d’elle et souvent même malheureuse. Dans ce cas, nous avons affaire à une série de personnes proactives qui appliquent une anxiété clairement adaptative.
Pouvons-nous donc bénéficier de cette approche mentale dans notre vie de tous les jours ? En réalité, il sera toujours préférable d’appliquer cette attitude plutôt que ce positivisme aveugle qui laisse tout entre les mains du destin. Voyons quelques clés qui pourraient nous aider.
Pensée préfactuelle
La pensée préfactuelle définit une stratégie cognitive dans laquelle nous imaginons ou réfléchissons aux résultats possibles d’un scénario futur. Cela implique, par exemple, que face à un événement qui suscite en nous de la peur ou de l’anxiété, nous puissions visualiser quels résultats pourraient résulter de nous y exposer. Nous penserions à la fois aux effets positifs et neutres et aux effets négatifs.
Une fois que nous avons délimité ces scénarios défavorables possibles, nous raisonnerions sur la manière dont nous agirions face à ces situations les plus défavorables. Le pessimiste défensif anticipe le pire pour affronter cette adversité imaginée.
Gestion de l’anxiété
Le pessimiste pratique sait tirer parti de l’anxiété et le fait en profitant de l’activation psychophysiologique qu’elle procure. Il est motivé, adopte une attitude proactive et cherche des solutions aux éventuels problèmes au lieu d’être bloqué par eux, même s’ils ne se sont pas produits. Comme l’explique la psychologue Julie Normal dans une étude classique de 1983, l’anxiété agit comme un mécanisme de motivation dans ces cas.
Car, bien qu’on l’oublie parfois, l’anxiété adaptative cherche à faciliter notre bien-être en nous permettant de faire face aux risques et menaces de notre environnement. Par conséquent, une étape cruciale est de savoir comment réguler cet ensemble d’émotions et de sensations que cet état génère en nous. Le but est de dominer l’anxiété et de la mettre en notre faveur, en l’empêchant de nous dominer.
Clarifier les buts et objectifs
Le pessimisme défensif est fondamentalement une stratégie cognitive dans laquelle les gens imaginent des obstacles à leur propre succès afin d’agir en conséquence. Cela non seulement revient à leur estime de soi et à leur image de soi, mais leur permet également d’améliorer leur capacité à réussir.
Ceci nous permet de comprendre un autre aspect décisif de cette approche mentale. On peut imaginer le pire avant cet événement qui génère de l’anxiété, mais il est clair à tout moment, ce que vous voulez réaliser. C’est vrai, par exemple, que donner une conférence me fait peur et je pense que je pourrais me ridiculiser. Mais je ne laisse pas la peur me bloquer car je sais ce que je veux : surprendre le public.
Pour conclure, il suffit de se focaliser, encore une fois, sur un fait bien précis. Parfois, avoir une pensée négative ou anticiper un échec qui ne s’est pas encore produit n’est pas quelque chose de pathologique. C’est notre mental qui nous incite à la préparation, à la proactivité et à la non-capitulation. Les peurs ne doivent pas nous bloquer, elles doivent nous inviter à nous dépasser.
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- Norem, Julie & Cantor, Nancy. (1986). Defensive Pessimism. Harnessing Anxiety as Motivation. Journal of personality and social psychology. 51. 1208-17. 10.1037/0022-3514.51.6.1208.
- Norem, Julie K., and Shannon Smith, ‘Defensive Pessimism: Positive Past, Anxious Present, and Pessimistic Future’, in Lawrence J. Sanna, and Edward C. Chang (eds), Judgments Over Time: The Interplay of Thoughts, Feelings, and Behaviors (New York, 2006; online edn, Oxford Academic, 22 Mar. 2012), https://doi.org/10.1093/acprof:oso/9780195177664.003.0003, accessed 24 Oct. 2022.
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