Le microbiote dans les addictions
Rédigé et vérifié par le psychologue María Vélez
Les addictions représentent un type de trouble très difficile à traiter en raison de la multitude des facteurs qui influent sur elles. C’est pour cela que les recherches sur leurs mécanismes et leurs possibles traitements ne cessent pas. Aujourd’hui, on sait beaucoup de choses sur les mécanismes qui les produisent. On voit malgré tout apparaître des résultats très intéressants qui peuvent être très importants, comme le rôle du microbiote dans l’abstinence.
Le microbiote est l’ensemble des microbes qui se trouvent dans la bouche, le vagin, la peau ou les intestins. Cet écosystème corporel a déjà été relié à d’autres pathologies comme l’autisme, Parkinson, l’anxiété ou la schizophrénie. Et, apparemment, il contribuerait aussi au développement des addictions.
L’axe cerveau-intestin
On sait actuellement que le tractus digestif bénéficie de son propre système nerveux : le système nerveux entérique. Celui-ci se compose de plus de 500 millions de neurones. Il communique avec le système nerveux central (SNC) en contribuant au fonctionnement et à l’équilibre du cerveau.
La communication entre ces deux systèmes est dynamique et bidirectionnelle. Cela veut dire que le microbiote peut modifier l’activité neuronale du cerveau et vice-versa. L’influence n’est cependant pas directe car le cerveau est protégé par la barrière hémato-encéphalique. Ainsi, les neurotransmetteurs intestinaux agiraient à travers les cellules de la paroi intestinale. Ils conduiraient celles-ci à communiquer avec le système nerveux central.
On a pu découvrir que le système nerveux entérique était capable de produire une grande partie des neurotransmetteurs dont nous bénéficions, comme la dopamine, le GABA ou la sérotonine.
Addictions et microbiote
L’addiction à des substances est due au fait que celles-ci activent le centre de récompense du cerveau, en stimulant la sécrétion de neurotransmetteurs, et surtout de dopamine. Cela produit une sensation très agréable à laquelle le cerveau s’habitue très rapidement, finissant par en demander de plus en plus de doses ou une plus grande quantité.
Comme on l’indiquait précédemment, on sait actuellement que le système nerveux entérique produit également des neurotransmetteurs comme la dopamine. On sait aussi que, quand le microbiote n’est pas équilibré, il est lié à l’apparition de pathologies. C’est pour cela que l’on a mis cet écosystème dans le point de mire des addictions, avec des résultats très frappants.
Microbiote et alcoolisme
En 2014, on a publié une étude dans laquelle on analysait la relation entre les bactéries intestinales et l’addiction à l’alcool. Pour cela, on a regardé s’il existait une altération dans la perméabilité intestinale et le microbiote des personnes qui souffrent d’alcoolisme, et si celui-ci était lié aux symptômes de dépendance.
On a alors découvert que les personnes qui avaient développé le syndrome de l’intestin perméable, qui produit une augmentation de la perméabilité de l’intestin, présentaient des niveaux d’anxiété plus élevés et un syndrome d’abstinence plus intense.
Par ailleurs, la composition du microbiote, tout comme son activité, étaient altérées. Les chercheurs en ont conclu que le microbiote jouait un rôle important dans l’addiction à l’alcool, et plus spécialement dans le risque de rechute.
Addiction à la nourriture
On a également étudié la relation entre l’addiction alimentaire et le microbiote en analysant les selles de personnes saines, leur IMC et des images cérébrales. Pour cela, on s’est centré sur les métabolites, qui se produisent à cause de la dégradation du tryptophane. Il s’agit d’un acide aminé qui est présent dans de nombreux aliments. Après s’être dégradé, il se transforme en sérotonine, influant donc sur l’humeur et le comportement.
Ce processus a deux implications. D’un côté, le tryptophane, une fois qu’il a été dégradé par les bactéries intestinales, s’élimine à travers les selles. De l’autre côté, lors de la dégradation, le tryptophane se transforme en indole, un métabolite impliqué dans l’axe intestin-cerveau.
On a ainsi pu découvrir que l’indole est lié à un plus grand niveau d’obésité et à des ingestions plus incontrôlables, probablement en raison de son influence sur le système de récompense, et plus spécifiquement avec des circuits liés à l’amygdale cérébrale.
Quels traitements pourrait-il y avoir ?
Ces découvertes apportent un point de vue différent sur les addictions, ainsi que de possibles nouveaux traitements. Il faudrait donc espérer qu’en rétablissant l’équilibre de la flore intestinale, on puisse solutionner certains aspects clés des addictions.
Certains chercheurs proposent, par exemple, d’intervenir sur les hormones intestinales. D’autres, en revanche, proposent des traitements qui, même s’ils sont simples et utilisés dans la médecine chinoise, peuvent être très intéressants.
C’est le cas de la transplantation de microbiote fécal. Ce procédé consisterait, pour le dire simplement, à transplanter des selles. On administrerait ainsi les micro-organismes d’un donneur sain dans l’intestin d’un patient récepteur.
Pour le moment, l’efficacité de ce traitement n’a été prouvée que pour la colite récurrente. Son application à d’autres pathologies n’est, pour le moment, qu’une idée. On continue cependant à étudier le rôle du microbiote dans les addictions et d’autres maladies, dans l’espoir de trouver de nouvelles voies de traitement.
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