Le "manque de temps" est une nouvelle forme de pauvreté
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Le manque de temps génère une souffrance psychologique progressive évidente. C’est un peu comme si nous étions ce lapin blanc dans Alice au pays des merveilles qui court avec une montre. “Je suis en retard pour un rendez-vous très important, il n’y a pas le temps…“.
Le sentiment que nous sommes toujours à court de temps pour quoi que ce soit est un sentiment partagé par la plupart d’entre nous. Dans la vie, il y a des obligations. Nous devons suivre une routine stricte et accomplir une liste de tâches sans fin.
Cependant, cela entrave notre bien-être et notre épanouissement personnel. Parfois, nous sommes même tellement concentrés sur quelque chose que nous ne remarquons plus qu’autour de nous, il y a d’autres solutions, d’autres opportunités et des gens. La vie est un véritable trésor et nous finissons par le perdre de vue de bien des façons.
Nous perdons notre santé à cause de ce manque endémique de repos, de plaisir et de bien-être psychologique que procurent les moments de loisir. Nous perdons notre “quota existentiel” parce que les années passent parfois en un clin d’œil.
Avec elles, ce sont nos rêves et nos expériences qui s’évanouissent. Enfin, ce sont surtout des moments perdus avec les personnes que nous aimons.
Le manque de temps est d’ores et déjà une nouvelle forme de “pauvreté”
Nous avons tous entendu à un moment ou à un autre que le manque de temps n’existe pas, mais que le manque d’intérêt, lui, existe. Il est vrai que cela peut parfois être le cas. Cependant, ces dernières années, nous avons assisté à un scénario aussi complexe que problématique. Cela vaut la peine de s’y attarder un instant.
Tout d’abord, nous vivons dans une société qui conçoit le fait d’être “occupé” comme quelque chose de “productif”. Nous intégrons alors dès le plus jeune âge l’idée que remplir nos journées avec de nombreuses tâches nous rend digne. Plus on fait de choses, plus on parle de vous en bien.
En revanche, on se méfie de l’oisiveté. En effet, ceux qui prennent le temps de se reposer fuiraient leurs responsabilités. Toutes ces idées ont miné notre santé physique et psychologique depuis déjà de nombreuses années.
Ces dernières années, un autre facteur s’est greffé à ce phénomène. Les conditions de travail se sont complexifiées. Le télétravail en est un exemple. Ce mode de travail, encore mal réglementé, nous soumet généralement à des situations de forte pression. Les horaires sont souvent flexibles et ils s’étendent parfois au-delà des heures de travail établies.
Enfin, à tout cela, s’ajoute les responsabilités familiales et ménagères. Le manque de temps devient alors bien vite accablant.
Le sentiment de culpabilité
Le travail occupe une grande partie de nos heures dans la journée. Après ces heures, le temps restant est consacré aux obligations essentielles, telles que faire les courses, s’occuper des enfants ou accomplir d’autres tâches incontournables. Finalement, après tout cela, il ne reste plus que la fatigue et le désir d’aller se coucher et de se reposer.
Lorsque cette dynamique se répète jour après jour, le sentiment de culpabilité finit inévitablement par apparaître. La culpabilité de ne pas s’occuper de nos proches comme nous le souhaiterions, de ne pas avoir plus de temps pour notre partenaire, nos amis, nos enfants, nos animaux domestiques… Mais aussi, la culpabilité de ne pas avoir de temps pour nous mêmes.
Nous regrettons de manquer de temps pour faire ce qui nous plaît. Nous reportons des sorties, des voyages, des cours que nous ne ferons jamais ou encore des livres qui s’accumulent et que nous ne lirons jamais… Toutes ces situations minent l’estime de soi et altèrent l’humeur.
Les réseaux sociaux et la vie que nous aimerions avoir
Le manque de temps devient parfois une véritable souffrance psychologique à travers l’utilisation de la technologie. Bien que nous soyons presque toujours occupés et que nos listes de choses à faire soient remplies, nous trouvons cependant toujours un moment pour passer du temps sur les réseaux sociaux.
Dans ces univers virtuels, on y voit généralement du bonheur, des images de lieux que nous aimerions visiter, des expériences originales, des choses à découvrir, des gens à rencontrer… Ces fenêtres virtuelles peuvent nous motiver à certains moments, mais elles peuvent aussi nous décourager.
Parce que cette réalité n’est pas la nôtre. Parce que nos obligations ne nous permettent pas toujours ces évasions, ces opportunités…
Le manque de temps et la pauvreté personnelle
On peut avoir un excellent emploi et être quand même pauvre. Parce que la pauvreté liée au temps est un autre type de misère émotionnelle, personnelle et psychologique qui est profondément enracinée dans la société actuelle. Réfléchissez un instant, à quoi sert un compte en banque bien remplit si on manque de temps pour s’amuser et se rapprocher des autres ?
Le manque de temps nous prive de bonheur mais aussi de vie. Au Japon, le terme karoshi désigne les personnes qui meurent de surmenage. Mais attention. Elles ne perdent pas tous la vie en raison d’un épuisement professionnel, d’une crise cardiaque ou d’un accident vasculaire cérébral. En fait, beaucoup d’entres elles se suicident.
Comment trouver du temps pour retrouver la vie ?
Le manque de temps nuit à la santé mentale. C’est une situation qui doit changer. Ce qui est complexe, c’est que tout ne dépend pas de nous. La manière dont la société et nos horaires s’articulent ne nous permet pas toujours de concilier travail et vie personnelle, les obligations et les loisirs.
Des travaux de recherche tels que ceux menés par le Dr Therese Macan de l’Université du Missouri nous montrent que, dans ces conditions, même les stratégies de gestion du temps ne sont pas toujours utiles. Cela peut nous permettre de nous libérer d’un certain stress, mais l’épuisement professionnel, par exemple, reste cependant toujours présent.
Il est vrai qu’une profonde redéfinition de notre mode de vie est nécessaire. Toutefois, et dans la mesure du possible, nous pouvons nous aussi réfléchir à certains aspects. Voici quelques idées :
- Faites la différence entre ce qui est urgent et ce qui est important.
- Essayez d’organiser votre journée dès le lever, en essayant de mettre du loisir et du temps de repos dans votre agenda. Il est essentiel de disposer d’une ou deux heures par jour pour faire ce qui nous plaît.
- Apprenez à déléguer des responsabilités.
- Trouvez du temps tout au long de la semaine pour le partager avec votre famille et vos amis.
Pour conclure, gardez cette idée en tête. Le manque de temps est aussi un signe de pauvreté. Pire encore, cette misère émotionnelle et existentielle nous ôte peu à peu la vie.
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- Macan, T. H. (1994). Time Management: Test of a Process Model. Journal of Applied Psychology, 79(3), 381–391. https://doi.org/10.1037/0021-9010.79.3.381
- Rimmer Abi. How do I improve my time management skills? BMJ 2019; 366 :l5322
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