La pauvreté change notre cerveau
Rédigé et vérifié par le psychologue María Vélez
La pauvreté a-t-elle une influence sur le cerveau ? Au cours des 50 dernières années, une grande partie de la recherche sur le cerveau s’est consacrée à l’étude des effets d’un environnement enrichi. Ainsi, on a constaté qu’une stimulation sociale et intellectuelle accrue produit des changements structurels et fonctionnels dans le cerveau.
Face à cela, des études ont récemment commencé à examiner ce qui se passe dans le cas contraire. Ainsi, on a pu observer que le manque de ressources ou la pauvreté modifie également notre cerveau.
Les premières études ont porté sur la manière dont les différences socio-économiques se reflètent dans le comportement et la cognition. D’autres se sont concentrées sur la localisation de différents réseaux, fonctions et structures cérébrales en fonction des niveaux socio-économiques. Malgré cela, on ne sait toujours pas aujourd’hui comment ces différences se produisent précisément.
Cependant, il existe déjà suffisamment de preuves pour affirmer que la pauvreté modifie notre cerveau. Et certains mécanismes ont été proposés.
L’effet de la pauvreté sur le cerveau en développement
Ces résultats ont été constatés principalement dans la population infantile, car le cerveau en développement est plus sensible aux facteurs externes.
Le développement du cerveau est déterminé par des facteurs environnementaux ainsi que par des facteurs génétiques. Par conséquent, le niveau socio-économique peut influencer cette période.
Ainsi, on a constaté que la charge génétique sur le développement de la structure du cerveau et de la cognition est plus élevée chez les personnes de haut niveau socio-économique. Par conséquent, chez celles de faible niveau, les caractéristiques de l’environnement pourraient avoir un poids plus important.
Résultats
Le langage est l’une des compétences les plus étroitement liées au statut socio-économique des enfants. Les recherches sur ce sujet ont montré que les enfants de niveau socio-économique inférieur présentent une moindre spécialisation des zones du cerveau impliquées dans le langage. Ainsi qu’une relation entre la pauvreté et le volume de ces zones.
En termes de mémoire, les enfants les plus pauvres ont un hippocampe plus petit. Cet effet se maintient également jusqu’à 5 décennies plus tard, indépendamment des conditions socio-économiques à l’âge adulte.
D’autre part, l’amygdale est une structure cérébrale liée au traitement des émotions, à l’apprentissage et à la motivation. En ce sens, les enfants entourés d’une plus grande pauvreté présentent une taille plus petite et une activation altérée de cette zone. Cela se traduit par une plus mauvaise régulation émotionnelle.
Dans les fonctions exécutives également (processus cognitifs plus complexes tels que la prise de décision ou la planification), le manque de stimulation et de ressources produit des altérations et des déficits.
Comme dans les processus précédents, les niveaux socio-économiques plus faibles sont liés à de moins bonnes performances des fonctions exécutives. Et à un volume plus faible des zones du cerveau concernées.
Les effets de la pauvreté sur le cerveau des adultes
La plupart des effets de la pauvreté constatés chez les adultes sont dus à un statut socio-économique inférieur lorsqu’ils étaient enfants. Cependant, on peut également constater certains effets indépendamment de l’enfance qu’ils ont vécue.
Par exemple, une étude intéressante publiée dans Science a révélé que la “simple” préoccupation économique affecte les performances cognitives, en particulier les fonctions exécutives.
Dans la recherche, ils se sont divisés en deux groupes sur la base d’un seul critère : la difficulté des opérations arithmétiques. Dans l’étape suivante, les personnes de chaque groupe ont été confrontées à une situation plus ou moins préoccupante sur le plan économique.
Pour la condition facile, les deux groupes ont obtenu des résultats similaires. En revanche, dans cette situation difficile, les personnes qui se préoccupent davantage de leurs finances parce qu’elles ont moins d’argent ont obtenu de moins bons résultats. En d’autres termes, ils ont été moins capables d’inhiber les réactions inappropriées, de sélectionner les réponses appropriées et de conserver les informations pertinentes.
Mécanismes
On ne connaît pas précisément les mécanismes opérant sous la pauvreté pour changer nos cerveaux. Pour autant, il y a plusieurs candidats possibles pour la liste. Ces facteurs agiraient ensemble, s’ajoutant à l’effet négatif de chacun.
- Manque de ressources : les ressources limitées, telles que les livres, les jouets ou les possibilités éducatives, affectent sans aucun doute la quantité et la qualité de la stimulation reçue
- Nutrition : les nutriments jouent un rôle fondamental dans notre cerveau, en particulier dans le développement neurologique. Ainsi, le manque de vitamine B12, d’oméga-3, de zinc ou de fer sont très impliqués dans le développement du cerveau en modulant la plasticité, l’expression des gènes et en régulant la production et la qualité des réseaux neuronaux
- Stress : les enfants et les adultes en situation de pauvreté subissent les effets du stress. L’exposition à des environnements appauvris s’associe à une production accrue de cortisol. Cela a des effets dévastateurs quand produit sur une longue période
- Toxicité pour l’environnement : les personnes de statut socio-économique inférieur ont tendance à vivre dans des régions où la toxicité environnementale est plus importante. Par exemple, les banlieues proches des usines et donc plus polluantes
D’une manière ou d’une autre, la lutte contre la pauvreté ne semble pas être uniquement une question de santé. Nous voyons que cette variable, en tant que générateur d’un contexte aux circonstances très particulières, peut être un obstacle à notre fonctionnement cognitif.
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