Éric Sadin et les enjeux de l'intelligence artificielle
Relu et approuvé par le psychologue Sergio De Dios González
Éric Sadin est un philosophe français qui a suscité un grand intérêt pour ses profondes réflexions sur un phénomène qui nous concerne tous : l’intelligence artificielle. Pour ce penseur, il ne s’agit pas d’une simple avancée technologique mais d’une rupture de la civilisation telle que nous la connaissons. Pour cette raison, il n’hésite pas à dire qu’il s’agit du défi philosophique le plus important du XXIe siècle.
Sadin souligne que l’évolution de la technologie a été exponentielle ces dernières années. Au départ, il s’agissait de traiter l’information de manière fonctionnelle et, surtout, lorsque le volume était très important. Aujourd’hui, selon l’expert, la technologie est capable de « créer des vérités » et de contrôler les actions humaines.
Face à cela, le philosophe attire l’attention sur un fait essentiel : bien que l’intelligence artificielle devienne de plus en plus intelligente, les sujets sur lesquels s’abat son action ne la rejettent pas mais, au contraire, l’accueillent volontiers et même avec fascination. Les dispositifs et leurs fonctionnalités captivent les gens.
« L’intelligence artificielle se présente désormais comme une sorte de surmoi, dotée de l’intuition de la vérité et appelée à guider nos vies en toutes circonstances vers la plus grande efficacité et le plus grand confort imaginables ».
-Éric Sadin-
Eric Sadin et l’intelligence artificielle
Il est important de préciser que Sadin n’est pas un penseur « anti-technologie ». Il s’attache plutôt à analyser l’impact des nouvelles technologies dans le cadre de la civilisation et d’identifier les défis qu’elles posent. L’une de ses préoccupations est le fait que de nombreux appareils n’ont plus pour tâche « d’aider » l’être humain, mais plutôt de le « remplacer ».
Il est évident que la dérive de cette frénésie technologique est susceptible de changer, mais très peu susceptible d’être freinée en raison des avantages concurrentiels qu’elle apporte. Sadin pense que nous sommes proches d’entrer pleinement dans le transhumanisme. Le défi principal, en ce sens, sera la fusion entre le cerveau humain et l’ordinateur, pour donner naissance à une réalité supérieure : la superintelligence.
Dans le cadre du transhumanisme, on s’attend à ce que la vie soit beaucoup plus longue, que nous puissions maintenir une santé physique et mentale pendant de nombreuses années mais, surtout, que nos capacités cognitives soient extraordinairement vitaminées. Jusqu’ici, tout va très bien. Le problème est que cela sera dirigé et contrôlé de l’extérieur de la conscience individuelle. Ce « monde parfait » sera géré par des consciences et des intérêts extérieurs à l’individu.
Les trois dimensions de la « vie algorithmique »
Pour Éric Sadin, il y a trois dimensions impliquées dans ce qu’il appelle la « numérisation de la conscience » ou « la vie algorithmique ». L’une est la dimension ontologique ou liée à l’être ; l’autre est la dimension épistémique ou associée à la production de vérités ; enfin, on retrouve la dimension éthico-politique, qui a à voir avec le comportement humain éthique et le pouvoir.
L’un des grands risques mis en garde par Sadin est le fait que l’intelligence artificielle soit devenue productrice de vérités. Les algorithmes sont capables d’analyser des situations, de tirer des conclusions et de proposer des itinéraires. L’exemple le plus simple est donné par les réseaux sociaux. En fonction de ce qu’une personne consulte ou évalue, les algorithmes décident quelles informations devraient être montrées à chaque utilisateur ou non.
Cela se produit à toutes les échelles, y compris la science. Ainsi, pour Sadin, un nouveau régime s’est inauguré : la vérité algorithmique. Ceci est universel et ne prévoit pas d’exceptions. C’est la première fois dans l’histoire que cela se produit ; ceci correspond à la dimension épistémique et a de nombreuses implications.
Le réel et le neutre
Sadin soutient également que cette nouvelle version du monde conduit à une « disparition du réel ». Pour lui, le réel génère de l’incertitude et fixe des limites. Dans ce nouveau « monde parfait » qui a vocation à se construire grâce aux technologies, l’intelligence artificielle poursuit une fin : éliminer l’incertitude. En d’autres termes, éliminer le réel.
Un autre danger réside dans le fait que toutes ces avancées sont présentées aux yeux du grand public comme « neutres ». C’est comme si, derrière toute cette structure, il n’y avait pas d’autre intention que de faciliter et d’améliorer la vie humaine. Cependant, ce n’est pas le cas. Nous savons déjà que les algorithmes font aussi de nous de bons clients et en électeurs dociles.
En définitive, Éric Sadin nous met en garde contre un fait indiscutable : nous sommes en train de changer de civilisation. Comme toujours, cela comporte des avantages mais aussi des risques. Ceux qui sont implicites dans le monde de l’intelligence artificielle sont suffisamment importants pour ne pas les perdre de vue.
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