Douze hommes en colère : comment un leader peut changer l'opinion d'un groupe
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Douze hommes en colère est une oeuvre dramatique de l’auteur Reginald Rose. Le scénario a initialement été écrit pour la télévision. Il a par la suite été adapté au cinéma et au théâtre.
Reginald Rose est né aux Etats-Unis. Il a passé sa vie à écrire des scénarios, surtout pour la télévision. On y retrouve son intérêt pour des sujets sociaux et politiques controversés et un point de vue clair et précis sur la réalité collective.
Son oeuvre la plus connue est Douze hommes en colère. Il y parle de la complexité de l’être humain. La série télévisée est sortie sur les écrans en 1954. L’auteur l’a ensuite adaptée au théâtre, où elle a connu un grand succès et a été appréciée par le public. En 1957, le réalisateur Sidney Lumet l’a adaptée au cinéma. Ce film représente parfaitement la communion entre la télévision, le théâtre et le cinéma.
Le fil conducteur de cette trame complexe est celui d’un jury composé de douze hommes très différents. Ces derniers doivent parvenir à un accord et décider s’ils considèrent l’accusé coupable ou innocent. Celui-ci est accusé d’homicide. Leur décision aura donc des conséquences importantes.
Face aux douze membres du jury, un magistrat dirige le procès, qui est celui d’un jeune de 16 ans accusé d’avoir tué son père. Les jurés doivent donc en délibérer. Si le jeune homme est considéré coupable, sa sentence sera la peine de mort (chaise électrique) pour un homicide au premier degré.
Alors que le jugement penche sans appel vers une condamnation, l’un des membres du jury doute. Il évoque la notion de “doute raisonnable” (en droit anglo-saxon). Cette notion dit que l’on doit reconsidérer n’importe quelle accusation. La personne qui s’oppose à l’avis de la majorité exposera ses arguments et réclamera un nouveau vote pour voir si quelqu’un d’autre a réfléchi à la question. Vote après vote, les doutes, auparavant dissimulés sous un masque de transparence apparente, commenceront à surgir.
Le groupe décide donc de revoir sa décision et d’étudier le cas plus attentivement. Les jurés débattent des preuves présentées, des déclarations effectuées par les témoins et en tirent de nouvelles conclusions. Lors de cette délibération, ces “douze hommes en colère” affichent leurs peurs et racontent leurs expériences de vie. Ils exposent aussi leur personnalité et détaillent les préjugés qui les poussent à soutenir leurs différents points de vue.
C’est peut-être le côté réellement magique du film : le miroir qu’il place en face de nous pour nous dire que, derrière un bon nombre d’opinions ou de croyances que nous soutenons et défendons, il y a des raisons que nous n’osons pas avouer. Même dans un contexte où l’on retrouve un accusé que nous ne connaissons pas.
12 hommes en colère : les habiletés du leader pour changer un verdict
Le doute raisonnable fait son apparition alors que tous les membres du jury veulent délibérer de manière précipitée et déclarer l’accusé coupable. C’est le résultat du premier vote, un vote rapide et irréfléchi où seul l’un des membres n’a pas donné son accord.
C’est à ce moment que la capacité de leadership du juré qui n’est pas d’accord attire les autres hommes. Peu à peu, ils commenceront tous à douter de la culpabilité du jeune accusé. Ce personnage reflète, à travers son interprétation, les caractéristiques qui définissent un bon leader :
Il sait écouter
Tout au long du film, le protagoniste écoute attentivement chacune des opinions. Il ne tombe pas dans la tentation d’interrompre le discours du reste des membres du jury. Le simple fait d’écouter lui permet de réunir des informations et d’identifier des problèmes. Il peut aussi prendre des décisions et résoudre des conflits.
Grâce à cela, ses collègues se sentent importants et intégrés dans le jury. Cela facilite leur engagement et, petit à petit, ils abandonnent leurs croyances non réfléchies pour s’impliquer dans le débat.
Il est assertif
Les membres du jury veulent en finir le plus vite possible avec le procès. Cependant, notre personnage se démarque et exprime son désaccord. Le fait d’aller contre la majorité n’est pas une chose simple. Il prend le risque, par exemple, que le procès contre l’accusé se transforme en un procès contre sa personne.
Un leader manifeste son opinion réelle, au-dessus de l’inertie du courant social. Il est conscient de sa responsabilité et l’assume, même si cela le place dans une position inconfortable. Par ailleurs, un bon leader est capable de rappeler aux personnes qui l’accompagnent que les décisions d’un groupe ont des conséquences.
Il dirige, coordonne et modère
Le personnage principal modère les discussions entre les membres du jury. Il gère et résout les conflits et fait en sorte que la communication soit fluide et efficace. Une personne qui souhaite convaincre avec des arguments a, dans le film, un bon miroir dans lequel se regarder. Son autorité peut, en outre, émaner d’autres sources, comme un plus grand prestige ou une expérience plus profonde.
Il est honnête
Notre leader, dans le film, n’adopte pas un point de vue “fermé”. Lors du premier vote, il vote “innocent” parce qu’il souhaite qu’un débat se mette en place. Ce sont les circonstances qui le poussent à prendre cette décision. Il est conscient du fait que, s’il ne s’oppose pas à la majorité, le débat n’existera pas.
Ainsi, il est honnête dans sa position. Il ne se ferme pas mais exprime ses doutes. Il ne sait pas si l’accusé est coupable ou innocent : c’est pour cela qu’il veut écouter les arguments des personnes qui ont une opinion fondée. De cette manière, il parvient à éveiller l’implication des autres. Ce n’aurait pas été le cas s’il avait cherché l’affrontement direct. La sincérité du leader est son meilleur outil pour résoudre des doutes ou des conflits qui peuvent naître au cours de la délibération.
Il analyse et résout
Dans le film, on peut voir comment le leader identifie l’opportunité d’apporter de nouvelles preuves. Il parvient de cette façon à semer le doute dans le reste du groupe. Il essaye d’apporter une nouvelle vision des faits avec un grand pouvoir d’analyse.
Face au doute raisonnable qui est invoqué tout au long du film, nous comprenons que n’importe quel verdict doit toujours penser à l’innocence d’un accusé. Cependant, il est difficile de bien discerner le probable du possible et cela laisse au spectateur la liberté de penser à ce qu’il croit le plus opportun.
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