Engrammes : les marques de l'expérience dans notre cerveau
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Les engrammes sont les traces cérébrales que nous laissent chacune de nos expériences. Ce processus où de petites structures neuronales se forment après une certaine sensation, un événement marquant ou une émotion impossible à oublier, avait déjà été défini par l’hindouisme : il s’agissait des Samskaras, empreintes d’un souvenir de celui qui apprend.
Bien que personne ne doute aujourd’hui de l’existence des engrammes, le mécanisme par lequel ces empreintes se forment reste encore un mystère. Nous savons, par exemple, que lorsque nous vivons une expérience avec une tension émotionnelle élevée, nous générons immédiatement une structure d’interconnexion neuronale stable qui influencera plus tard tout notre fonctionnement mental : les pensées, les émotions et les comportements. Quelque chose d’incontestablement fascinant.
“Le terme d’engramme a été inventé par Richard Semon et étudié plus tard par Anton Pavlov, un scientifique comportementaliste qui réalisa d’intéressant travaux sur l’apprentissage et la mémoire.”
Toutefois, la façon dont cette “empreinte neuronale” déterminera notre comportement est quelque chose que personne ne peut prédire. Par conséquent, et compte tenu de ce subtil mécanisme d’action, certains voient les engrammes comme une sorte de “chips” cérébraux ; autrement dit, comme des enregistrements dans “notre disque dur” nous poussant à réagir d’une certaine manière.
Ce pourrait être eux qui articulent un grand nombre de nos peurs, eux qui nous poussent à réagir de telle manière à certains stimuli – à partir, par exemple, d’une série d’engrammes qui ont été formés pendant notre enfance. Nous parlons d’un sujet intéressant qui mérite d’être approfondi.
Les engrammes ou les empreintes de nos expériences
Nous avons évoque le terme Samskara en introduction. Dans ce contexte philosophique, les Hindous recoururent à un terme permettant de reprendre ce phénomène commun. Nous agissons parfois de manière singulière face à certains événements presque sans savoir pourquoi. Dans ce courant spirituel, les Samskara sont interprétés comme les codes du “karma“, comme des empreintes d’un souvenir qui est intégrée à la fois dans notre corps et dans notre esprit.
Il est par ailleurs curieux de voir que dans différentes disciplines scientifiques, telles que les neurosciences, cette idée possède une histoire presque parallèle. Voyons un exemple : Ana a 5 ans et apprend à faire du vélo. À un moment donné, un gros chien bondit sur elle et lui la mort sérieusement. Maintenant, 20 ans plus tard, Ana n’ose toujours pas faire du vélo. Elle ne craint pas les chiens, mais s’est créé dans son cerveau un engramme où l’acte de pédaler est associé avec effroi et douleur.
Les scientifiques expliquent que les engrammes sont la preuve évidente de la façon dont le conditionnement classique est orchestré dans notre cerveau. Autrement dit, pourquoi nous réagissons parfois de manière déterminée face à des stimuli qui en apparence sont tout à fait “neutres”. Néanmoins, pour que cela se produise, pour qu’un engramme se forme dans notre cerveau, il faut que se produise une activation du système limbique, c’est-à-dire que nous devons ressentir une émotion particulière, révélatrice … intense (positive ou négative).
Les engrammes et nos univers psychiques
Nous savons à l’heure actuelle qu’une grande partie de notre vie psychique est construite sur des engrammes. Lorsque nous voyons une rose, par exemple, nous éprouvons un certain plaisir parce que du manière ou d’une autre nous anticipons son odeur, même si elle ne nous parvient pas. Lorsque nous buvons une tasse de chocolat, cela nous évoque des souvenirs d’enfance, lorsque nous écoutons une musique qui nous est familière, nous éprouvons immédiatement toute une série de sensations de bien-être, de plaisir et de satisfaction.
Les engrammes façonnent notre conscience et, à l’instar des réseaux neuronaux qui se constituent au fur et à mesure de nos expérimentations, sont tels des ancres qui définissent tout ce que nous sommes, ce qui nous fait réagir, vibrer de peur ou de bonheur … Il s’agit de la matière organique et électrique organisée en fonction de nos interactions. Il est néanmoins difficile pour les neurologues de faire la lumière sur la façon dont ce réseau “physique-chimique-neuronal” se met en place, de définir quelles sont les voies synaptiques qui sont développées et quels sont les types de neurones sur lesquelles il s’organise pour former un engramme.
Il s’avère fascinant pour les scientifiques de penser qu’il existe une sorte de cellules nerveuses spécifiques pour cette fonction. Il s’agit, pour le dire ainsi, de structures organiques dont la seule fonction est de façonner une partie de notre conscience, de construire notre psyché, de s’organiser en “micro chips” de mémoire où réside de petits morceaux de ce que nous sommes.
De récentes études, telles que celles menées par les neurologues Michele Pignatelli, Tomás J. Ryan et Susumu Tonegawa, nous révèlent quelque chose d’important. Lorsque nous naissons, notre cerveau est déjà génétiquement pédisposé pour que les engrammes commencent à s’activer quelques secondes après notre venue au monde. C’est comme si chacun de nous disposait d’un ordinateur qui, du fait d’être “allumé”, commence à installer son propre software.
Pour que cette programmation soit la plus optimale, la plus résistante mais aussi agile et efficace, il est nécessaire que nos premières expériences, celles de l’enfance, soient suffisamment stimulantes et positives. Dès lors, nos premiers engrammes neuronaux constitueront des fondations chargées d’énergie, les empreintes de souvenirs et d’apprentissages motivants pour maximiser notre développement.
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