Une petite révolution à travers les phrases de Bakounine
Les phrases de Bakounine ont scandalisé ses contemporains et, aussi étrange que cela puisse paraître, continuent à surprendre beaucoup de personnes dans l’actualité. On considère cet homme russe comme le père de l’anarchisme et l’un des plus grands représentants de l’athéisme.
Mijail Bakounine était un philosophe très sympathique, qui aimait nouer de nouvelles amitiés et appréciait la vie bohème. C’était aussi un grand admirateur d’Hegel, qui critiquait les actions despotiques du tsar russe au XIXème siècle. Il n’était pas tellement partisan des idées de Karl Marx, qu’il considérait comme autoritaire.
Dans les phrases de Bakounine, nous retrouvons des réflexions à propos de réalités humaines très variées. Cependant, il est évident que ce philosophe s’intéresse particulièrement au thème du pouvoir. Il remet surtout en question le pouvoir de l’Etat et de la religion. Voici donc quelques-unes de ses affirmations les plus intéressantes.
“Je ne puis me dire libre vraiment que lorsque ma liberté, ou ce qui veut dire la même chose, lorsque ma dignité d’homme, mon droit humain, qui consiste à n’obéir à aucun homme et à ne déterminer mes actes que conformément à mes convictions propres, réfléchis par la conscience également libre de tous, me reviennent confirmés par l’assentiment de tout le monde.”
-Mijail Bakounine-
Il n’y a pas d’autorité infaillible
“Mais je ne reconnais point d’autorité infaillible, même dans les questions toutes spéciales […] Une telle foi serait fatale à ma raison, à ma liberté et au succès même de mes entreprises; elle me transformerait immédiatement en un esclave stupide et en un instrument de la volonté et des intérêts d’autrui.”
Il s’agit de l’une des phrases les plus emblématiques de Bakounine. Elle résume parfaitement son point de vue par rapport au pouvoir. À travers cette affirmation, il déclare son irrévérence éternelle face à tout type d’autorité absolue.
S’il existait une autorité infaillible, la liberté ne serait qu’un mot. Cette autorité se chargerait de signaler ce qui doit ou non être fait. Alors, pourquoi se servir de la raison individuelle si l’autorité dispose déjà de la vérité ?
La pluralité des dieux
“La seule pluralité des dieux à peu près égaux en puissance était une garantie contre l’absolutisme. […] Il n’y avait donc pas dans la mythologie grecque cette contradiction logiquement aussi bien que moralement monstrueuse, que le bien et le mal, la beauté et la laideur, la bonté et la méchanceté, la haine et l’amour se trouvent concentrés dans une seule et même personne, comme cela se présente fatalement dans le dieu du monothéisme.”
Cette phrase de Bakounine peut être choquante pour les personnes croyantes. Au-delà des convictions religieuses, cette affirmation peut être divisée en deux parties. Dans la première, Bakounine expose des similitudes entre le monothéisme et l’absolutisme.
Dans la seconde, il affiche le contraste entre le bien et le mal, comme une contradiction logique. Et moralement déplorable. Il déclare ainsi que le bien et le mal sont des concepts relatifs et qu’ils n’existent jamais à un état pur. La véritable éthique est réfléchie et non imposée.
La liberté est collective
“On voit que la liberté, telle qu’elle est conçue par les matérialistes, est une chose très positive, très complexe et surtout éminemment sociale, parce qu’elle ne peut être réalisée que par la société et seulement dans la plus étroite égalité et solidarité de chacun avec tous.”
À travers cette affirmation, Bakounine fait référence à un point fondamental. La liberté est un bien qui n’existe qu’en société. Un individu isolé ne peut pas parler de liberté car il n’a pas de point de référence à partir duquel il peut devenir libre.
La liberté est sociale car le pouvoir est aussi un phénomène social. Ces deux concepts se complètent et coexistent. On est libre dans la mesure où il y a une auto-détermination qui n’implique pas d’exclusion ou d’isolement.
Une autre phrase de Bakounine sur la liberté
“Je ne suis vraiment libre que lorsque tous les êtres humains qui m’entourent, hommes et femmes, sont également libres.”
Dans cette phrase, Bakounine insiste sur le sens collectif de la liberté. Cela veut dire que lorsque la liberté individuelle se définit dans l’oppression ou l’esclavage d’autres personnes, on ne peut l’appeler liberté au sens strict du terme.
Pour qu’une personne soit pleinement libre, il est nécessaire qu’aucune contrainte n’existe. Les libertés des autres ne doivent pas non plus être restreintes. Ainsi, une société libre est une société où tout le monde peut s’auto-déterminer, sans assujettissement aux autres.
Le devoir sacré
“Je considérais comme le plus sacré des devoirs de me révolter contre toute oppression, quel qu’en fût l’auteur ou la victime.”
La philosophie de l’anarchisme de Bakounine est évidente dans cette phrase. Contrairement à ce que certaines personnes pourraient croire, le père de l’anarchie ne faisait pas la propagande du désordre mais de l’autonomie et de l’auto-détermination.
Le mot anarchie est parfois utilisé de façon confuse. On pense qu’il est synonyme de chaos et de libertinage. Or, dans son essence, ce terme renvoie à la volonté d’abolir toute forme d’autoritarisme.
Liberté politique et liberté économique
“La liberté politique sans égalité économique est une prétention, une fraude, un mensonge; et les travailleurs ne veulent pas de mensonges.”
C’est une idée du XIXème qui, deux siècles après, est encore bien présente. Bakounine nous parle de la profonde relation entre le monde politique et le monde économique, surtout en termes de liberté.
L’égalité économique est l’un des idéaux du socialisme. Plus qu’un absolu, il fait référence à cette idée en parlant de l’abolition des exploiteurs et des exploités. Car quiconque dépend des autres pour survivre n’a pas de véritable liberté politique.
Un coup est un coup
“Mais le peuple n’aura pas la vie plus facile quand le bâton qui le frappera s’appellera populaire.”
On pourrait considérer cette phrase de Bakounine comme l’une de ses plus visionnaires. À son époque, les régimes socialistes ou communistes n’existaient pas. Ils sont apparus un peu plus tard, même si ce n’était parfois que de manière formelle.
Bakounine imagine déjà tout cela et remet en question la capacité de répression de ces régimes prétendument égalitaires. Bien souvent, ce sont des pouvoirs qui agissent au nom du peuple mais qui s’imposent de la même façon que les systèmes qui créent ou maintiennent l’inégalité.
Le point de vue de Bakounine pourrait être considéré comme plus éthique que politique ou économique. Son rejet absolu d’une forme de pouvoir est plus idéal (utopique) que réel. Est-ce réellement à la portée des peuples? Il est tout de même intéressant de le lire et de connaître sa façon de penser.
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- Bakunin, M. A., & Díaz, C. (1975). La libertad. Proyección.
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