Titien: biographie du grand peintre de Venise
Relu et approuvé par Psychologue Gema Sánchez Cuevas
Selon les critiques d’art et les historiens, dont Arnold Hauser et Ernst Gombrich, l’impact du travail de Titien fut énorme. De fait, il a été reconnu comme un grand peintre dès son plus jeune âge.
Dans ses portraits, Titien s’est plongé dans le caractère humain et a réussi à le graver sur ses toiles. Ses compositions religieuses couvrent toute la gamme des émotions, du charme de ses jeunes Madones aux profondeurs tragiques de la crucifixion et de la mise au tombeau.
Dans ses peintures mythologiques, il a su capturer la joie et l’abandon du monde païen de l’Antiquité. Dans ses peintures de nus, Vénus (Vénus et Adonis) et les Danaé établissent un standard de beauté physique et d’érotisme jamais égalé.
Titien était célèbre pour sa maîtrise de la couleur ; son travail créatif a eu une profonde influence sur d’innombrables générations futures d’artistes. De grands maîtres, comme Rubens et Nicolas Poussin, lui ont fait un compliment d’imitation.
“Titien est le soleil au milieu des petites étoiles, non seulement parmi les Italiens mais aussi parmi tous les peintres du monde.”
-Giovanni Lorenzo sur Titien, 1950-
Titien, enfance et voyage à Venise
La date exacte de sa naissance est inconnue. Tiziano Vecellio ou Vecelli est né entre 1488 et 1490, à Pieve di Cadore, un village près de Belluno, Italie.
Il y passa les premières années de sa vie. Ses parents étaient Gregorio et Lucia Vecellio, qui avaient cinq enfants, Titien étant l’aîné de ses frères et sœurs.
Son père était un conseiller et un soldat distingué. Il a été surintendant du château de Pieve di Cadore et a également géré les mines locales pour leurs propriétaires.
Nombre de ses parents, dont le grand-père de Titien, étaient notaires. Pour cette raison, il n’est pas surprenant que la famille du peintre était bien établie dans la région.
A l’âge de 10 ans, en compagnie de son frère Francesco, il est envoyé vivre avec son oncle à Venise. Vivant en ville, Titien se découvre rapidement artiste. Dans un premier temps, les deux frères entrent comme apprentis dans l’atelier d’un célèbre mosaïste, Sebastiano Zuccato.
Quelques années plus tard, Titien entre dans l’atelier du peintre vénitien Giovanni Bellini. Dans cet atelier a germé la première génération de peintres de l’école vénitienne : Giovanni Palma di Serinalta, Lorenzo Lotto, Sebastiano Luciani et Giorgio da Castelfranco, dit Giorgione.
Les premières œuvres du maître
On dit que la fresque d’Hercule au palais Morosini fut l’une de ses premières œuvres. Parmi ses travaux de jeunesse, on retrouve La Vierge à l’Enfant (aussi appelé La bohémienne), situé à Vienne, et Le Christ portant sa croix, maintenant situé à la Scuola Grande de San Rocco, à Venise.
En 1508, les fresques du Fondaco dei Tedeschi peintes en collaboration avec un autre disciple de Bellini, Giorgione di Castelfranco, marquent le début de sa carrière. Leur collaboration réussie explique pourquoi il est difficile de distinguer les deux artistes au début du XVIe siècle.
De ces fresques, seuls les contours abîmés survivent aujourd’hui. Dans cette commission, la scène principale assignée à Titien était l’Allégorie de la Justice.
Les deux jeunes maîtres ont également été reconnus comme les deux leaders de la nouvelle école d'”art moderne”. Ce type d’art était associé à une forme de peinture plus souple, c’est-à-dire libérée de la symétrie et des vestiges des conventions hiératiques que l’on retrouve encore dans les œuvres de Giovanni Bellini.
Après la mort précoce de Giorgione en 1510, Titien a continué à peindre dans sa tradition pendant un certain temps. Cependant, son style a rapidement développé ses propres particularités, qui incluront des coups de pinceau audacieux et expressifs.
La première commande indépendante du Titien fut les fresques de trois miracles de Saint-Antoine de Padoue en 1511. Selon plusieurs critiques d’art, la meilleure composition est le Miracle du nouveau-né disculpant sa mère accusée d’adultère.
Formation et notoriété du Titien
L’aîné Giovanni Bellini mourut en 1516, laissant Titien sans égal dans l’école vénitienne. Pendant soixante ans, il fut le maître incontesté de la peinture vénitienne. Titien a succédé à son maître Giovanni Bellini et pour cela, il a commencé à recevoir une pension du Sénat.
“J’ai délibérément évité les styles de Raphaël et Michel-Ange parce que j’étais ambitieux avec une distinction supérieure à celle d’un imitateur intelligent.”
-Titien-
Durant cette période (1516-1530), qui correspond à son stade de maîtrise et de maturité, le style de l’artiste change et se perfectionne. Il est passé de son style “giorgionesque” précoce à des thèmes plus larges et plus complexes et, pour la première fois, a tenté un style monumental.
En 1518, il réalise pour le maître-autel de l’église de Frari son célèbre chef-d’œuvre, L’Assomption de la Vierge, toujours in situ. Cet extraordinaire exemple du colorisme, exécuté à grande échelle et rarement vu en Italie, a étonné tout le monde.
Le nom de Titien brillait de plus en plus fort, il était associé à l’art et la renommée ne tarda pas à venir. En 1521, l’artiste était au pinacle de sa popularité. Bien qu’il était déjà fort célèbre auparavant, à partir de ce moment, les amateurs d’art sont devenus de plus en plus enclins à acheter son travail.
L’une de ses œuvres les plus extraordinaires, Le Martyre de saint Pierre (1530), appartient à cette période et fut malheureusement détruite en 1863. Il ne reste que des copies et des gravures de cette image. Cette œuvre combine une violence extrême et un paysage, principalement composé d’un grand arbre qui est entré en scène et semble accentuer le drame d’une manière qui regarde vers le baroque.
L’artiste poursuit simultanément sa série de petites madones qu’il traite au milieu de beaux paysages qui servent d’images de genre et de pastorales poétiques. C’était aussi la période des grandes scènes mythologiques. Parmi celles qui se distinguent sont les fameuses Bacchanales que l’on trouve au Musée du Prado. Ce sont peut-être les productions les plus brillantes de la culture païenne de la Renaissance.
La vie inhabituelle du peintre
La rencontre du Titien avec l’empereur romain Charles Quint à Bologne en 1530 sera un événement déterminant dans sa vie. A cette occasion, Titien a réalisé un portrait grandeur nature de l’Empereur (aujourd’hui perdu), un exemple précoce d’un genre encore extrêmement novateur à l’époque.
Il devint rapidement le peintre principal de la cour impériale, ce qui lui valut d’innombrables privilèges, honneurs et titres. A partir de ce moment, il fut le peintre le plus prisé de toutes les cours européennes.
L’artiste a su gagner l’admiration et l’estime des puissants non seulement pour la beauté de sa peinture, mais aussi pour sa propre attitude et pour la subtilité conceptuelle avec laquelle il construisait ses tableaux.
La preuve de sa renommée est le grand nombre de portraits signés par Titien qui se trouvaient au sein des collections de personnages puissants. Aucun autre peintre de l’époque n’a peint autant de portraits que Titien, bien que l’on pense que ce sont les élèves du maître qui ont peint ces tableaux.
“Ce ne sont pas les couleurs vives, mais un bon dessin qui rend les personnages beaux.”
-Titien-
Titien a reçu une pension de D’Avalos, marquis de Vasto, et une rente élevée de Charles Quint, du trésor de Milan. Une autre source de profit a été un contrat obtenu en 1542 pour fournir du grain à Cadore. C’était sa ville natale, qu’il visitait presque chaque année, où il était considéré comme généreux et influent.
Titien possédait un village favori sur la colline voisine de Manza, d’où il a fait ses principales observations sur la forme et l’effet du paysage. Le moulin dit de Titien, constamment perceptible dans ses études, est situé à Collontola, près de Belluno.
Vie personnelle
En 1525, il épousa une dame nommée Cecilia, fille d’un barbier. L’union a donné son premier fils, Pomponio, et deux autres d’affilée, dont Orazio, le préféré de Titien, qui est devenu son assistant.
Vers 1526, il se familiarise avec Pietro Aretino et devient rapidement très intime avec lui. Pietro était un personnage influent et audacieux qui apparaît bien étrangement dans les chroniques de l’époque. Titien a envoyé un portrait de lui à Gonzaga, duc de Mantoue.
Après la mort de Cecilia en 1530, Titien se remaria et devint le père d’une fille, Lavinia, mais sa seconde femme mourut aussi. Il déménagea avec ses fils et a demandé à sa sœur Orsa de Cadore de prendre en charge son atelier de peintre.
Titien avait environ 90 ans lorsque la peste qui a éclaté à Venise a conduit à sa mort le 27 août 1576. C’était un homme d’une grande longévité et la seule victime de la peste à Venise à avoir reçu une sépulture ecclésiastique. Titien a été enterré dans l’église de Frari (Santa Maria Gloriosa dei Frari).
Sa tombe se trouvait près de son célèbre tableau, la Madonna di Ca’Pesaro. Aucun monument ne marqua son tombeau jusqu’à ce que, bien plus tard, les souverains autrichiens de Venise chargèrent Antonio Canova de fournir le grand monument qui le décore aujourd’hui.
Ses peintures religieuses étaient de véritables paradigmes d’une peinture dévotionnelle avec une capacité à nulle autre pareille de “bouleverser les sentiments” des fidèles. Sa production mythologique l’a transformé en peintre érotique par excellence, lui donnant le pouvoir de retransmettre certaines émotions.
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