Phronesis, ou le charme de la sagesse pratique

Un des aspects intéressants de la phronesis est qu’il s’agit d’un concept qui n’a pas de traduction précise. C’est un peu comme savoir lire les situations spécifiques et prendre des décisions judicieuses dans un but louable.
Phronesis, ou le charme de la sagesse pratique
Gema Sánchez Cuevas

Relu et approuvé par Psychologue Gema Sánchez Cuevas.

Écrit par Edith Sánchez

Dernière mise à jour : 18 février, 2023

Phronesis, ou phronēsis, est un concept d’éthique qui était très présent dans la philosophie grecque. Elle fut notamment développée par Aristote dans son Éthique à Nicomaque, où elle fut considérée comme l’une des grandes vertus de l’être humain. Il n’y a pas de traduction exacte pour ce mot, mais on pourrait dire qu’il signifie “sagesse pratique”.

Les Grecs pensaient que la phronesis faisait partie des arts du bien vivre. Celui qui possédait cette propriété était capable de fonctionner dans diverses situations avec un succès complet. Le premier à s’y référer fut Socrate, qui le considérait comme une sorte de somme de toutes les vertus.

Platon fit également allusion à la phronesis dans son Meno. Là, il la définit comme “la compréhension morale” et la considère comme l’attribut le plus important de tous ceux qui peuvent être appris. Cependant, il précisa que cette vertu ne s’enseigne pas, mais est le fruit d’une profonde connaissance de soi.

« Le pouvoir d’atteindre la fin que nous proposons, bonne ou mauvaise, n’est pas la sagesse pratique mais l’habileté. Mais si la fin poursuivie est juste – et la vertu ne peut que nous l’assurer – l’habileté devient sagesse pratique ; si la fin est mauvaise, l’habileté devient simplement un mal habile, et de même que la sagesse pratique implique la vertu morale, de même la vertu morale implique la sagesse pratique.

-Aristote-

Phronesis

Phronesis, une grande vertu

Comme nous l’avons déjà noté, Aristote est celui qui développa le concept de phronesis. Pour lui, c’était une forme de sagesse différente de celle de “sofía”, un mot qui faisait allusion à la connaissance universelle plus typique de la science. Cela deviendrait une sorte de “sagesse théorique”.

Au lieu de cela, la phronesis correspondait à la sagesse matérialisée. Il ne s’agissait pas d’une simple application des connaissances, mais plutôt de la capacité de décider d’atteindre un objectif précis. Aussi la vertu de choisir l’application de la connaissance basée sur le plus grand bien possible, spécifiquement, pour une vie bien remplie. C’était donc une vertu éthique.

La phronesis est également associée à la politique chez Aristote. Dans ce domaine, la sagesse s’applique au bien commun. De même, celui qui possède cet attribut devient le leader idéal pour les communautés et les groupes. Cela implique qu’il y a connaissance, bon sens et prudence dans les décisions qui sont prises.

Le rapport à l’éthique

Aristote souligna qu’il existe trois façons de faire appel au caractère, que les Grecs appelaient “ethos”. Ce dernier mot signifie « coutume » ou « conduite » et renvoie à la manière d’être, en particulier au comportement moral. Les trois composantes de l’éthos sont, selon les Grecs, la phronesis, l’areté et l’eunoia.

L’ areté est la volonté d’excellence. C’est typique des personnes qui sont formées pour penser, parler et agir avec succès. Elle était déterminée par trois vertus : andreía, ou bravoure ; sofrosine, ou équilibre; et dicaiosine, ou justice.

De son côté, l’eunoia faisait référence à la bienveillance envers les personnes. Cela pourrait être un synonyme de noblesse, ou ce que nous appelons aujourd’hui l’empathie. La triade se complète avec la phronesis. Ce ne serait pas le fruit d’une bonne formation de caractère, comme les deux autres, mais de l’expérience. C’est pourquoi Aristote pensait qu’elle ne pouvait pas être présent chez un jeune.

Phronesis

Une vertu de l’intellect

Aristote soulignait que la phronesis était une “vertu d’intelligence”, qui permettrait “de délibérer correctement sur le bien et le mal” afin d’atteindre le bonheur personnel et collectif. Par conséquent, c’était un attribut intellectuel qui était présent dans des faits concrets et non potentiels. Elle suppose des connaissances, non pas universelles, mais ancrées dans un temps et un lieu, c’est-à-dire dans des situations particulières.

Alors que la vertu, ou areté, permet d’établir des fins élevées ou nobles, la phronesis permet de choisir des moyens justes et d’effectuer des démarches appropriées pour les atteindre. Ce n’est pas une capacité, parce que la capacité est suffisante pour faire quelque chose qui est déjà prédéterminé. Dans ce cas, une réflexion pointue est requise avant l’action, et l’action n’est pas répétitive.

Aristote alla jusqu’à dire que la phronesis est une condition nécessaire pour être heureux. De même, une caractéristique fondamentale pour avoir de la crédibilité dans la sphère sociale. Cela implique un esprit entraîné, lucide, mais pratique en même temps, et avec une forte dose de bon sens. Pour la même raison, c’est une vertu propre aux dirigeants et à ceux qui ont la capacité de persuader les autres.

Périclès était considéré comme la matérialisation même de la phronesis. Il était considéré comme un dirigeant doté d’une énorme capacité à persuader et à amener les autres à le suivre, grâce au fait qu’il utilisait des stratégies qui lui permettaient d’obtenir ce qu’il proposait.

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  • Ávila Hernández de P, F. (2008). Frónesis: El arte de hacer con la prudencia, la sabia razón de la convivencia. Frónesis, 15, 13-17.

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