Parlons de Barcelone (et du terrorisme)
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Il est difficile de se mettre dans la peau de celleux qui ont souffert, directement ou indirectement, des récentes attaques terroristes qui ont eu lieu à Barcelone. Et il est encore plus difficile de se mettre à la place des personnes qui vivent le terrorisme au quotidien, loin de nous. Des milliers de personnes en Irak et en Syrie vivent cette situation chaque jour, sans pouvoir imaginer un meilleur futur.
Il est absurde de responsabiliser une religion entière pour les actes d’une minorité infime. Cependant, en voyant les commentaires de nombreuses personnes qui prennent leurs aises sur les réseaux sociaux, nous pouvons comprendre à quelle point cette absurdité est bien réelle.
Les messages haineux se multiplient chaque fois qu’une attaque terroriste se produit. Cependant, pour comprendre ce qu’il s’est passé à Barcelone, il est nécessaire de savoir ce qu’est le terrorisme et de quoi il se nourrit. Les messages de soutien sont nécessaires et bénéfiques dans ces cas, et il est tout aussi important d’être bien informé-e-s et de ne pas générer de haine envers des personnes qui n’ont rien à voir avec ce qu’il s’est produit.
Le terrorisme est une grande menace qui requiert que l’on soit soudé-e-s et non divisé-e-s…
Qu’est-ce que le terrorisme ?
Le premier problème auquel nous faisons face se trouve dans la définition du terrorisme. Actuellement, chaque pays et chaque organisation ont leur propre définition de ce terme. Et si toutes ces explications ont bien quelques points communs, elles ont aussi de grandes différences. On pourrait dire que la définition du terrorisme est politique dès qu’elle touche les intérêts de celui qui le définit.
L’une des fins que devrait poursuivre la politique est l’unification de la définition du terrorisme. Une conceptualisation internationale qui pourrait être utilisée aussi bien par les forces de sécurité que par celleux qui appliquent la loi et le poursuivent dans la rue.
En nous basant sur ces normes, voyons la définition de Boaz Ganor, ex-chef du Mosad israélien qui propose : “le terrorisme est une forme de lutte à travers laquelle la violence est utilisée délibérément contre les civils pour atteindre des objectifs politiques (nationalistes, socio-économiques, idéologiques, religieux, etc.)”. D’après cette définition, chaque attentat contre des personnes civiles qui aurait été réalisé dans un but lié à la politique serait du terrorisme. En revanche, ces attentats où les victimes étaient des membres des forces de sécurité ne seraient pas considérés comme du terrorisme, mais comme une guérilla.
Les intérêts du terrorisme
En ce qui concerne les intérêts du terrorisme, nous devons faire une différence entre deux types de motifs. D’un côté, on retrouve les motifs individuels de chaque personne ou terroriste et, de l’autre, les intérêts de l’organisation terroriste. Pour l’organisation, le plus importante est d’inspirer la peur.
Des attaques comme celles de Barcelone, de Londres ou de Paris, qui peuvent sembler complètement aléatoire et impossible à éviter, cherchent à envoyer un message : personne n’est à l’abri. Face à cela, il est normal que les personnes, qu’elles aient été directement affectées ou non, ressentent de la peur, voire de la terreur. Or, cette terreur peut aussi devenir chronique et irrationnelle.
De cette façon, l’objectif de l’organisation terroriste est d’instaurer une peur chronique qui pousse les personnes à ne plus se sentir en sécurité. L’une des conséquences immédiates est que la population va être d’accord avec les mesures du gouvernement en faveur de la sécurité, en acceptant de payer ces mesures en échange d’une réduction de droits et de libertés. Une autre conséquence probable de l’attentat sera la focalisation de notre regard sur certaines caractéristiques des terroristes, comme la religion : la haine envers celleux qui ont tué des innocent-e-s s’étendra à celleux qui pratiquent cette même religion.
Cela va pousser les gens à mettre la pression sur le gouvernement pour que celui-ci instaure des mesures plus strictes qui limitent les libertés en faveur d’une sécurité non-nécessaire. Une autre conséquence est que cette peur va se concentrer sur certaines personnes. Et plus concrètement sur toutes celles qui ont l’Islam pour religion ou qui ont des origines arabes.
De cette façon, l’organisation terroriste va essayer de légitimer ses actes en les présentant comme une défense noble de celleux qui sont victimes de discrimination, qui sont opprimé-e-s et marginalisé-e-s. La différence entre “nous” et “elleux” va être de plus en plus grande. Les discours haineux vont polariser la société et faciliter le travail de celleux qui recrutent des terroristes.
Les intérêts des terroristes
Les intérêts personnels des terroristes peuvent être multiples. Chaque personne va avoir différentes priorités. Si l’on prend en compte le fait que le terrorisme djihadiste surgit d’une perversion de l’Islam, les intérêts vont maintenir une relation avec les croyances de cette religion. Les terroristes ne vont pas forcément être musulman-e-s, mais on trouvera chez elleux des motivations liées aux bénéfices que peut leur apporter la religion.
Ainsi, certains des “bénéfices” individuels pour les terroristes vont être : obtenir leur entrée au ciel, avoir 72 houris (femmes vierges) qui les attendent au ciel, avoir la possibilité de choisir 70 personnes qui iront directement au ciel quand elles mourront (indépendamment de leurs actions dans leur vie), un grand prestige pour la famille et l’idéalisation du/de la terroriste décédé-e, qui devient un véritable martyr.
Cependant, comme nous l’avons dit, tous les intérêts ne sont pas religieux. Les familles des terroristes reçoivent normalement des quantités d’argent qu’elles ne pourraient pas obtenir d’une autre façon. Les terroristes qui ont participé à un attentat et n’ont pas été capturé-e-s vont jouir d’une grande reconnaissance et auront même davantage de responsabilités dans leur organisation. Finalement, un autre intérêt commun est la recherche de vengeance envers celleux qui pensent qu’iles sont responsables de la situation.
Un mélange de ces intérêts et de quelques autres va définir les motivations individuelles des terroristes qui, comme on l’a vu, ne coïncident pas forcément avec celles de l’organisation.
Recommandations en cas d’attentat
Même s’il est important de connaître les postulats précédents, il est encore plus important de savoir quelles normes d’action suivre. Nous devrions savoir, avant tout, comment réagir en cas d’attentat terroriste, même s’il ne se passe pas dans notre zone géographique. Pour commencer, il est fondamental d’écouter les expert-e-s et les forces de sécurité. Leurs indications sont les premières à suivre.
Faire preuve de soutien à travers les réseaux sociaux peut aussi être bénéfique pour tout le monde. Comme on l’a vu, tenir des discours haineux, criminaliser des communautés entières et soutenir des politiques racistes et intolérantes est précisément ce que les terroristes veulent. Si vous faites tout cela, vous agissez en faveur de leurs intérêts.
De la même manière, partager des images morbides est une autre pratique erronée. En plus de provoquer une peur irrationnelle, ces images peuvent heurter la sensibilité des personnes touchées. Au contraire, partager des informations concernant les mesures à adopter, avec des images qui montrent une unité et une compréhension envers les personnes affectées, aussi bien directement qu’indirectement, sera d’une plus grande aide. Rejeter les pratiques erronées en les dénonçant ou en cessant de les regarder est également une autre bonne idée.
Dans le cas où nous nous trouverions sur les lieux d’un attentat, les recommandations données par les professionnel-le-s sont : s’échapper, se cacher et alerter. Dans un premier temps, il est nécessaire de fuir et de trouver un lieu sûr. Jouer au héros peut être contre-productif. Une fois que l’on a trouvé un lieu sûr, il faut prévenir les forces de sécurité pour leur dire ce qu’il se passe et également prévenir un proche pour lui dire que l’on est à l’abri. Avant d’appeler au secours, il faut être certain-e-s d’être hors de danger. Souvenez-vous : courez, cachez-vous et prévenez la police.
Il y a quelques mois, nous étions tou-te-s Barcelone. Demain, nous serons tou-te-s syrien-ne-s et, après-demain, nous serons tou-te-s afghan-e-s. Peu importe la nationalité, la couleur de peau, l’ethnie ou la religion. Nous sommes tou-te-s uni-e-s contre le terrorisme. Ce n’est que de cette façon que nous gagnerons des allié-e-s et perdrons des ennemi-e-s.
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