Ce n'est pas parce que l'on s'amuse beaucoup que l'on est heureux-se

Ce n'est pas parce que l'on s'amuse beaucoup que l'on est heureux-se

Dernière mise à jour : 15 janvier, 2017

La discussion à propos de l’idée d’être heureux-se ou malheureux-se peut être sans fin. Le bonheur est un concept trop abstrait et relatif pour pouvoir théoriser à son sujet, sans tomber dans des impasses diverses. Le divertissement est en revanche beaucoup plus simple à comprendre, du moins en apparence. Dans ce concept d’amusement se trouve tout ce qui rompt avec la routine et vous procure de la satisfaction. 

La mauvaise nouvelle, c’est qu’amusement ne rime pas forcément avec bonheur. Quelqu’un peut s’amuser très souvent sans être heureux-se pour autant. Mais cela marche aussi dans le sens inverse : quelqu’un peut ne pas réaliser beaucoup d’activités amusantes et malgré tout être heureux-se.


« Mon bonheur consiste à savoir apprécier ce que j’ai et ne pas désirer avec excès ce que je n’ai pas »

-Léon Tolstoï-


 Mais, pourquoi dire tout cela ? Il s’agit seulement d’une introduction pour en venir à un point qui doit être un motif de réflexion : dans le monde actuel, le divertissement s’est pratiquement converti en obligation. Les personnes malheureuses sont uniquement les bienvenues dans les églises et dans les cabinets de psychologues. C’est pour cette raison-même que le divertissement pourrait bien s’être transformé en un moyen de dissimuler le fait d’être malheureux-se.

L’obligation du divertissement pour paraître heureux-se

Certains l’appellent la « société Coca-Cola ». Vous souvenez-vous que l’un des premiers slogans de cette compagnie appelait au divertissement ? “Profitez !”, disait-il. En montrant des gens souriants et “comblés”, c’est-à-dire entouré de beaucoup d’ami-e-s, voyageant, vivant des aventures, mangeant des choses délicieuses et partageant une vie de couple avec des personnes dignes d’une couverture de revue.

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Au cours des dernières décennies, beaucoup de personnes ont continué à suivre cet ordre. L’un des mots les plus terrifiants dans le monde d’aujourd’hui est “ennui“. Et l’on suppose que le contraire de l’ennui se traduit par le dynamisme à l’excès ainsi que beaucoup de week-ends intenses. « Ce que je préfère chez lui, c’est sa capacité à me faire rire », disent beaucoup de femmes. « Ce que je préfère chez elle, c’est le fait qu’elle ne prenne pas les choses au sérieux », disent les hommes.

On suppose que pour être heureux-se, vous devez prendre les choses à la légère et ressembler aux personnes des publicités de Coca-Cola, ou d’un quelconque dentifrice. Les expressions qui n’afficheraient pas de sourire seraient des mauvaises têtes. Si vous traversez un moment difficile, nombreux-ses seront celleux qui voudront vous aider en vous invitant à une fête ou en vous conseillant de mettre plus de divertissement dans votre vie.

Divertissement et culpabilité

L’obligation de se divertir est si forte que nous finissons parfois par ressentir de la culpabilité quand on en vient à penser que nous ne profitons pas suffisamment, ou que nous n’avons pas les outils émotionnels pour profiter “comme il le faut”.

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Le divertissement, les moments de fête, apparaissent dans l’histoire de l’humanité comme étant reliés au sacré. Chaque culture a réservé des moments spéciaux pour interrompre la vie quotidienne et donner place à un moment de partage avec la communauté. Ils représentaient des moments pleins d’émotion car ils supposaient une joie commune, des expressions artistiques et une rencontre affective avec les autres.

L’éternelle fête actuelle, en revanche, apparaît de plus en plus programmée et rattachée à des fins commerciales. Très souvent, elle trouve son origine dans l’angoisse et pas dans l’intention de célébrer. Mais le plus grave est que lorsqu’elle se transforme en une pratique continue, elle commence aussi à faire partir d’une routine, cette fois-ci de divertissement, qui lui ôte beaucoup d’enchantement.

S’amuser ne signifie pas être heureux-se

Il y eut un temps où l’amusement et la satisfaction étaient vus comme des ennemis de la vertu. Le sexe, principalement, était satanisé et vu comme un domaine où l’être humain pouvait initier un processus vers la décadence. Le plaisir apparaissait comme quelque chose de spécifique à des gens peu évolués, qui avaient perdu la raison et s’en remettaient donc à la satisfaction de leurs instincts.

Grâce aux apports de nombreuses disciplines, avec parmi elles la psychologie, on a compris et développé l’idée selon laquelle, au contraire de ce que pensaient les gens, le plaisir, la satisfaction et le divertissement étaient des composants légitimes d’une bonne santé mentale. Et également que la répression du désir était négative et qu’elle pouvait augmenter fortement les névroses.

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Aujourd’hui, il semblerait qu’il faille faire exactement le contraire : promouvoir l’idée que tout ne peut pas se réduire au divertissement et que les frustrations et les carences jouent aussi un rôle important dans le développement et la croissance émotionnelle. Ce qui est désormais satanisé est tout ce qui n’implique pas de divertissement ou d’amusement. Passer un bon moment n’exclut pas ou ne répond pas aux questions sur le sens de notre existence. S’amuser n’implique pas d’avoir résolu l’énigme du bonheur personnel.


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