L'hyper-rationalisation : quand le doute nous bloque
Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas
L’hyper-rationalisation est un type de doute pathologique qui bloque une personne. Elle est habituelle chez les gens qui sont extraordinairement logiques et rationnels et manquent de spontanéité. Ce problème engendre cependant un grand mal-être chez la personne qui en souffre.
En fait, très souvent, l’émotion et l’intuition jouent un rôle important dans les décisions que nous prenons. Ne pas écouter ces éléments qui font partie de nous signifie ignorer une part essentielle de notre nature.
Quand le doute bloque
Le doute nous rend indécis mais, en de nombreuses occasions, il nous permet aussi d’être sages et prudents. Nous pourrions parler de l’hyper-rationalisation comme étant le produit de l’exploitation de la logique et du rejet de l’intuition. L’être humain peut douter devant une décision : croire ou ne pas croire, faire ou ne pas faire. Lorsqu’une personne hyper-rationalise, elle plonge généralement dans un doute qui finit par la piéger totalement.
Nous sommes des êtres rationnels mais aussi émotionnels. Par conséquent, quand nous nous appuyons trop sur la logique, nous finissons par être inefficaces. L’hyper-rationalisation génère donc de l’anxiété, en renforçant sans le vouloir notre passion pour la logique. Une passion qui nous étouffe.
Qu’est-ce que l’hyper-rationalisation ?
La raison n’est pas un élément naturel; bien souvent, elle n’est même pas réelle. Ce n’est qu’une illusion. Beaucoup des décisions que nous pensons prendre à partir de notre raison ne sont en fait que le produit caché du jugement de nos émotions.
L’hyper-rationalisation n’est rien de plus que la foi en cette illusion, qui se produit particulièrement quand nous avons l’impression de traverser une époque vide de bonnes décisions. Nous nous sentons trahis par ce que nous ne contrôlons pas et nous rattachons à ce que nous pensons contrôler. Nous pouvons donc prétendre être logiques, alors qu’il n’est pas possible de l’être à cause de la quantité d’informations qu’il nous manque.
L’hyper-rationalisation dans le trouble obsessionnel compulsif
Nous retrouvons plusieurs explications autour du trouble obsessionnel compulsif (TOC), comme la “sensation d’inachevé” ou celles “d’expériences pas vraiment correctes”. Elles nous viennent des descriptions classiques de Janet (1903). La sensation d’inachevé ferait référence à une sensation interne d’imperfection. Elle est associée à la perception d’actions ou d’intentions qui n’ont pas réellement abouti (Pitman, 1987).
La sensation d’inachevé n’est pas ressentie que par les personnes souffrant de TOC. Des études réalisées à travers le questionnaire NJRE-Q ont montré que ces sensations sont extrêmement fréquentes au sein de la population non clinique, et plus concrètement chez 99% des étudiants du groupe étudié.
Ces expériences d’inachevé pourrait être considérées comme une tendance générale à manifester un doute ou à remettre en question une expérience (Tallis, 1995). Les recherches psychologiques s’appuient habituellement sur “l’Echelle d’indécision” (Indecisiveness Scale, IS; Frost et Shows, 1993).
Comment vous sentez-vous au moment de prendre cette décision ? Quand la raison nous bloque, nous poser des questions qui se connectent à notre côté émotionnel peut nous aider à prendre de meilleures décisions
Ne pas accepter les erreurs
L’une des principales caractéristiques associées à l’hyper-rationalisation est la difficulté à accepter les erreurs. En d’autres termes, il est nécessaire d’affronter l’idée suivante : dans la vie, on commet toujours des erreurs. Or, les personnes qui hyper-rationalisent n’en sont pas capables.
Parfois, les grandes explications détaillées ou les mots écrasants cachent un désir d’afficher son intelligence. Il faut cependant bien se rappeler que les êtres humains n’ont pas qu’un cerveau pour penser : ils représentent un système composé d’idées, de sensations et d’émotions.
Les principales structures de notre cerveau mettent en général six ans à se former. Cela veut dire que lors des premières années de notre vie, nos décisions sont essentiellement dictées par notre côté le plus intuitif, le côté émotionnel. La logique n’apparaît que par petites doses.
Le livre Penser rapidement, penser lentement écrit par Daniel Kahneman explique très bien le résultat de décennies de recherches sur la dichotomie de la pensée. Pour résumer, l’auteur nous parle de deux façons de penser :
- Système 1 : une façon de penser rapide, instinctive, automatique, subconsciente, stéréotypée et émotionnelle
- Système 2 : une façon de penser plus lente, qui demande des efforts, est peu fréquente, consciente, délibérative et logique
Par opposition à l’hyper-rationalisation, Daniel Kahneman explique ses analyses sur les deux façons différentes de créer la pensée. L’évolution a permis à l’être humain de développer sa capacité à raisonner; cependant, notre côté émotionnel n’a pas perdu de son utilité. Vous imaginez-vous prendre un moment pour faire une liste des pour et des contre alors que vous voyez que quelque chose est en train de brûler sur le feu de votre cuisine ?
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- Carrasco, A., & Belloch, A. (2013). Algo no está bien: una nueva lectura de la duda obsesiva. Psicología Conductual, 21(2), 341-36
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