Le trouble de Taijin Kyofusho, la peur d'offenser les autres
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Le trouble de Taijin Kyofusho donne forme à un type de phobie très particulier. Une personne qui souffre de ce trouble a notamment peur d’offenser les autres via les mots (un commentaire déplacé, par exemple) ou via les gestes. Ce trouble correspond à un type d’anxiété sociale décrite dans les manuels de diagnostics.
Dans les grandes lignes, il est fort probable que l’on associe ce trouble à la culture japonaise. Nous le savons tous, s’il y a bien quelque chose pour laquelle les japonais se démarquent c’est l’importance qu’ils accordent à l’éducation comportementale, au respect absolu et à la politesse soignée au millimètre dans leur vie quotidienne. Mais ce trouble peut affecter tout le monde, toutes cultures confondues.
Derrière le trouble de Taijin Kyofusho, se cache un fort sentiment d’insécurité. C’est ce sentiment qui favorise le désir de perfection obsessionnel et délirant chez la personne atteinte de ce trouble à chaque fois qu’elle s’expose publiquement. Ces personnes désirent tellement avoir un physique et un comportement parfaits qu’elles doutent de tout ce qu’elles disent et font.
La peur de rougir, d’hésiter, de dire quelque chose de peu intelligent et même la peur de sentir mauvais… Ces craintes sont quelques exemples des obsessions qui tourmentent les personnes atteintes du trouble de Taijin Kyofusho.
Ce trouble a été décrit pour la première fois au Japon. En revanche, en Occident, le type de phobie qui se caractérise par la crainte d’offenser les autres ne possède pas de catégorie propre. Ce trouble fait partie des phobies sociales.
Les caractéristiques du trouble de Taijin Kyofusho
Le trouble de Taijin Kyofusho se traduit comme le “trouble de la peur des relations interpersonnelles”. Ce type de phobie sociale a été décrit pour la première fois au Japon, et cela n’est pas par hasard : la culture japonaise met l’accent sur l’importance du groupe face à l’individu, d’où le fait que l’attitude caractéristique de ce trouble ait été rapidement décrite et étiquetée.
Comme nous vous le disions plus haut, ce type de phobie n’est pas propre aux japonais. Néanmoins, pour eux, il s’agit d’un syndrome psychiatrique très connu alors qu’en Occident nous en entendons à peine parler. Ce trouble est quand même inclus dans le “Manuel des diagnostics et statistiques des troubles mentaux (DSM-5) mais non pas dans une catégorie propre : il fait simplement partie des “autres troubles obsessionnels compulsifs spécifiés”.
Les différences entre le trouble de Taijin Kyofusho et la phobie sociale
Bien que l’on entende souvent dire que le trouble de Taijin Kyofusho est grosso modo un type de phobie sociale, il convient de mettre en relief quelques nuances qui le rendent unique.
- Les personnes qui souffrent de phobie sociale sont angoissées et se sentent honteuses lorsqu’elles sont face à d’autres personnes. Les personnes qui souffrent du trouble de Taijin Kyofusho ont peur d’avoir honte ou de déranger les autres simplement par leur présence.
- Le problème de base n’est pas la réaction de la personne lors d’une situation précise. La peur porte sur la réaction des autres lorsque la personne atteinte du trouble s’expose.
- Un autre aspect frappant du trouble est l’apparition de comportements obsessionnels compulsifs. Dans la littérature scientifique, nous avons l’exemple d’une femme américaine ayant été diagnostiquée avec ce trouble. Une étude publiée par l’université des sciences de la santé de Chicago décrit l’obsession particulière de la patiente : regarder les parties génitales des personnes. Les patients atteints de ce trouble sont angoissés à l’idée d’avoir ces comportements obsessionnels compulsifs mais ils ne parviennent pas à les contrôler.
Toutes ces nuances nous montrent la complexité de ce trouble.
Les sous-types du Taijin Kyofusho et autres aspects
Le système de diagnostic japonais montre que ce trouble donne forme à quatre sous-types très communs, lesquels mettent en lumière une phobie spécifique.
- Sekimen-kyofu : la peur de rougir et que l’autre se sente mal à l’aise à cause de cela.
- Shubo-kyofu : la peur de déranger les autres à cause de son physique que l’on juge peu attrayant.
- Jiko-shisen-kyofu : la peur que les autres se sentent menacés lorsqu’on les regarde.
- Jiko-shu-kyofu : la peur de sentir mauvais.
En Occident, d’autres aspects sont également pris en compte.
- Analyser si les caractéristiques sont stables ou transitoires. On sait, par exemple, que ces comportements peuvent apparaître à l’adolescence, puis disparaître avec le temps.
- Le degré de la phobie.
- L’apparition de pensées délirantes, de pensées obsessionnelles compulsives…
- La schizophrénie. Il est fréquent que ce trouble apparaisse chez les patients atteints de schizophrénie.
Le traitement
Il convient de souligner que, d’un point de vue culturel, le trouble de Taijin Kyofusho est très intéressant.
Nous savons que les premiers traitements sont apparus en 1910 avec le docteur Shoma Morita. Sa perspective thérapeutique est la suivante :
- isolement du patient dans des installations spécifiques
- invitation au repos et à la détente
- tenue d’un journal
- activités manuelles telles que la jardinerie
- cours donnés par le docteur Shoma Morita lui-même
À partir des années trente, ce spécialiste modifie certains aspects de son traitement. Il introduit la thérapie de groupe ainsi que l’administration de certains médicaments. À l’heure actuelle, la thérapie Morita est toujours utilisée au Japon.
En Occident, la stratégie varie assez puisque ce trouble est simplement considéré comme une phobie sociale. Il est donc traité de la même façon. Généralement, les spécialistes occidentaux ont recours à la thérapie cognitivo-comportementale basée sur l’exposition. Ils travaillent également l’estime de soi du patient et ils utilisent les techniques de relaxation. Néanmoins, tout dépend de la singularité du patient et de la présence éventuelle d’autres troubles.
Quoi qu’il en soit, il est certain que ce trouble est beaucoup plus reconnu chez les japonais que chez nous.
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