Le lien entre la jalousie, la dévalorisation et l'incrédulité
La jalousie apparaît dans une dynamique triangulaire. Contrairement à l’envie, qui met en jeu deux personnes, la jalousie est une triade dans laquelle la deuxième personne impliquée croit qu’une troisième personne (réelle ou imaginaire) forme une alliance avec la première. Cette situation fait parfois naître chez la deuxième personne ses plus “bas instincts de tueur”.
Dans un couple, la personne jalouse est toujours envahie par un sentiment de dévalorisation. A moins bien entendu, qu’elle ait la certitude de savoir que son partenaire est infidèle.
La personne jalouse se méfie. Elle ne se sent pas en sécurité et elle a peur d’être abandonnée. Elle ressent également de la colère. Cela entraîne de l’angoisse et de la tristesse. En réalité, ce n’est pas une situation réelle qui lui fait souffrir, mais ce qu’elle imagine. Concrètement, ce sont ses ruminations mentales, ces idées qui la persécutent.
Les problèmes liés à la jalousie sont l’un des principaux motifs de consultation chez les psychologues. Même si la raison pour laquelle de nombreux patients se rendent à une consultation est autre, la jalousie est souvent présente et détériore la situation.
Une personne jalouse finit par imaginer 1001 idées à propos de la façon dont son partenaire pourrait la trahir. Sa richesse imaginative est telle que, pour justifier son accès de jalousie, elle se raconte des histoires parfois complètement rocambolesques.
Les reproches qu’elle peut faire à l’encontre de son partenaire sont souvent très riches et largement fantasmés. Parmi ceux-ci, on peut, par exemple, aisément entendre les propos suivants :
- “Tu es en retard parce que tu as dû rester debout à bavarder avec ton client..?”
- “Depuis quand es-tu si intéressé par le voisin ?”
- “Que faisais-tu fait si tard au travail ?”
Les amants préservent parfois le couple
Il faut préciser que la troisième personne de cette triade ne provoque pas toujours la destruction du couple. Parfois même, elle l’entretient. Face à l’instabilité du couple, l’amant peut parfois détendre la relation et faire oublier momentanément la crise.
Cependant, ce n’est pas une solution. Un “amant” n’est pas non plus toujours un être de chair et de sang. L’amant peut en effet être le travail, les fêtes de soirée, le sport, la télévision, les matchs de football, les réunions entre amis, les hobbies, les études, etc.
On pourrait compiler un recueil d’histoires de jalousie, mais le mécanisme de la triade implique essentiellement qu’un conjoint soit l’objet de défiance de la part de son partenaire en raison de l’existence d’une troisième personne pouvant être un véritable amant du premier.
Le premier, par cette alliance, se transforme en centre de désir et de valeur du second. Le second est celui qui se dévalorise. S’il y a des valorisés (le premier et le troisième), ils existent tant qu’il y a un dévalorisé (le deuxième). Ce dernier est submergé par divers sentiments, de la toute-puissance à l’impuissance, en passant par le rejet, le dénigrement, l’agression.
La tendance à la jalousie est basée sur la dévalorisation. Une personne jalouse a une faible estime d’elle même. Une personne qui s’aime et qui se sent bien dans sa peau n’a aucune raison de fantasmer sur le fait que son partenaire puisse la tromper.
À moins que le mari ne soit très séducteur avec d’autres femmes. Qu’il ne consacre trop de temps à ses loisirs, au sport, à la télévision. A moins encore que la femme ne flirte avec d’autres hommes, qu’elle sorte beaucoup, ou qu’elle ne consacre beaucoup de temps à son travail. Dans ces cas bien précis, alors oui, il y a de bonnes raisons de soupçonner une infidélité.
Une personne ayant une estime d’elle même suffisamment saine ne pense pas que son partenaire puisse accorder de la valeur à un autre. En effet, elle estime que leur couple est la meilleure chose qui puisse lui arriver, et que les deux partenaires n’ont pas besoin de chercher autre chose en dehors de leur relation.
Il ne s’agit pas de nier, il s’agit de valoriser. Ce sont des concepts et des mécanismes très différents.
En somme, dans ce dynamisme interactionnel, le second fantasme que le premier soit avec le troisième. Cela signifie qu’il valorise, aime, désire, prend en compte le premier. Cela signifie aussi qu’il se place dans un en-deçà relationnel. De ce niveau inférieur naissent des sentiments de dévalorisation et d’insécurité qui minent progressivement son estime de lui-même.
La personne victime de la jalousie est une personne incrédule
Les tentatives de résolution du problème renforcent le tableau. Plus le premier essaie de convaincre le second qu’il se trompe dans ses évaluations, moins il devient crédible. Le second – incrédule et plein de colère – ne doute à aucun moment que le premier soit avec le troisième. Il ne veut donc pas se laisser convaincre par le premier.
Le premier va d’abord le couvrir de compliments afin d’essayer de le valoriser. Mais ces mots ne sont pas crédibles pour le second. Il emmêle et enchevêtre ainsi le reste du système.
Les impasses des personnes jalouses
D’autre part, le mécanisme de la jalousie a tendance à créer des impasses et à ne pas donner de réponses. On observe des prophéties auto-réalisatrices : les hypothèses de la personne jalouse se réalisent.
- Par exemple, si le premier dit que ces accusations ne sont pas vraies et qu’elle rejette les allégations du second, ce dernier se dira qu’il ment.
- Si le premier ne répond pas, le second pensera que s’il ne dit rien c’est qu’il a quelque chose à cacher.
- Et s’il répond d’abord par une caresse ou un je t’aime, il sera soupçonné de séduction et d’esquive.
En somme, quelque soit la réponse du premier, elle ne fera donc que confirmer l’hypothèse initiale du second. Il n’existe pas de bonne réponse. Rien ne sera crédible pour la personne qui souffre de jalousie.
Une épouse jalouse et peu sûre d’elle fantasme que son mari porte son regard sur sa nouvelle secrétaire. Elle ne le perd pas de vue. Elle commence à l’appeler avec insistance au bureau.
Ensuite, elle commence à contrôler son emploi du temps de manière obsessionnelle. Quinze minutes de retard pour arriver à la maison peuvent déclencher une crise sentimentale avec des revendications et des accusations d’infidélité.
La situation se répète au fil du temps. Il se sent tellement opprimé dans sa relation qu’il commence à chercher à l’extérieur des moments de répit. Il arrive à la maison de plus en plus tard. Puis, il traîne au travail. Il prend une bière avec ses amis. Il prévoit de dîner avec ses vieux copains de fac.
Tout ce temps passé loin de chez lui est un terrain propice aux fantasmes de sa femme. Cela ne fait que confirmer sa certitude. Son mari la trompe. Elle s’est transformée en une “sorcière” hostile qui lui donne du fil à retordre. N’oublions pas qu’un des recours de la personne dévalorisée et blessée est de dévaloriser à son tour l’autre.
Jalousie, disputes et violence
La jalousie entraîne des disputes et des confrontations. Les partenaires croient qu’ils essaient de se retrouver par la communication, mais ce n’est pas le cas. Physiquement, ils sont très proches, mais intérieurement, ils sont très éloignés. Si éloignés qu’ils doivent se crier dessus pour se parler.
Malgré leurs efforts, ils continuent à donner des ordres, à avoir des exigences concernant leur partenaire. Cependant, ce dernier ne peut pas les satisfaire. La frustration s’installe alors chez les deux partenaires. Et dans cet affrontement pathologique, la distance ne fait que se creuser.
Et c’est ainsi que le couple navigue entre rivalités et épreuves, jalousies et projections, rationalisations et contaminations, entre idéaux et désillusions, entre manques et besoins. Avec un tel fardeau, ils sont épuisés et tendus. Elle et lui se retrouvent au beau milieu d’une véritable bataille rangée.
Quand la violence s’invite dans la relation
La violence peut s’immiscer dans la relation lorsque par exemple, après une escalade, les mots viennent à manquer et que l’un des interlocuteurs est plongé dans l’impuissance la plus aiguë. Il peut alors tenter de dominer la situation en utilisant la force physique.
Une fois la violence verbale et physique mise en place, l’agresseur se sent coupable. La victime lui pardonnera certainement, et il y aura une période de calme apparent et de complicité. Cependant, à un moment donné, un nouveau cercle de violence se déclenchera. L’agresseur a recours “aux mains” de plus en plus facilement.
Prenons un exemple. Avec toute les réprimandes qu’il subit, le mari continue à essayer de s’échapper en passant toujours plus d’heures au travail. Cela incite sa femme à exercer davantage de pression sur son époux. Il s’agit d’un cercle vicieux qui se durcit. Les deux conjoints sont devenus deux “pauvres choses” dévalorisées.
Un matin, il arrive au travail et une collègue du bureau lui dit : “Bonjour, comme tu es élégant aujourd’hui ! Ses yeux s’illuminent alors et des cœurs apparaissent dans les airs, comme dans un dessin animé. Quelqu’un l’a remarqué. Et ce, sans le discréditer ! Cela peut être le début d’une véritable infidélité née d’un fantasme. Il s’agit d’une prophétie auto-réalisatrice.
La jalousie est une insulte à la confiance. Une invitation aux mensonges. Dans les couples fonctionnels, la communication fluide permet de montrer ses propres vulnérabilités. On ne blâme pas l’autre en raison de ses propres faiblesses.
Néanmoins, c’est aussi l’espace ou l’on montre et ou l’on valorise son partenaire mais aussi sa propre personne. Il s’agit de se voir dans les yeux de l’autre, et de voir le regard de l’autre sur soi. Valoriser pour être valorisé.
“La jalousie est toujours l’instrument qui détruit à coup sûr la liberté intérieure et élimine dans le couple tout bonheur possible.”
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