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L'agoraphobie : le problème de la peur de la peur

6 minutes
L'agoraphobie : le problème de la peur de la peur
Sergio De Dios González

Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González

Dernière mise à jour : 27 janvier, 2023
Tout a été dit et écrit sur l’agoraphobie. Malheureusement, elle est souvent très mal comprise, puisqu’on la définit généralement comme la peur des espaces ouverts ou la peur de la foule. Ce n’est pas tout à fait correct, puisque l’agoraphobie se caractérise par l’expérimentation d’une peur de la peur, pas seulement une peur des espaces ouvertes. Selon le Manuel statistique et de diagnostic des troubles mentaux DMS-5, l’agoraphobie se caractérise principalement par deux critères diagnostics :

1. Une peur intense de deux ou plus des situations suivantes :

  • Prendre les transports en commun.
  • Être dans des espaces ouverts (parcs, ponts, rues).
  • Être dans des espaces fermés (théâtres, cinémas, centres commerciaux).
  • Faire la queue ou être au milieu d’une foule.

2. La peur intense face à ces situations, dans la plupart des cas, provoque une crise d’angoisse à laquelle le patient ne peut échapper, et face à laquelle il ne parvient pas à accepter l’aide des autres.

Ces deux phénomènes expliquent pourquoi la source de l’agoraphobie est à rechercher du côté de la peur de la peur. La situation qui génère la peur, qu’il s’agisse de faire la queue ou d’être au cinéma, n’est pas le problème en soi. La personne qui l’expérimente a extrêmement peur de ressentir la peur intense que provoque une crise d’angoisse. Et c’est justement dans les situations décrites ci-dessus qu’une crise d’angoisse est la plus susceptible de faire son apparition.

Dans la suite de cet article, nous allons brièvement vous expliquer le fonctionnement émotionnel de l’agoraphobie, ses causes, ce qui l’alimente et les solutions pratiques qui vont vous permettre, si vous en souffrez, de pouvoir mieux la gérer lorsqu’elle survient.

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L’agoraphobie, bien plus que la peur des espaces ouverts

Lorsqu’une personne souffre d’agoraphobie, comme nous venons de le préciser, elle n’a pas uniquement peur de se retrouver dans un espace ouvert ou dans une foule. Elle craint par-dessus tout d’être victime d’une crise d’angoisse dans ce type précis de situation. Voilà pourquoi elle limite ses sorties dans la rue et qu’elle choisit précautionneusement les lieux où elle sort.

Pour le dire autrement, l’agoraphobie se définit comme la peur de la peur. La plupart des personnes agoraphobes dressent une carte mentale des lieux dans lesquelles elles se sentent en sécurité ou, au contraire, dans lesquelles elles se sentent menacées. Elles choisissent ensuite de se rendre, autant que faire se peut, dans des lieux où elles savent qu’elles ne souffriront pas de crises d’angoisse. Si un patient atteint d’agoraphobie n’a pas d’autre choix que de se rendre dans un lieu qu’il craint, il cherchera bien souvent à s’y faire accompagner par une personne de confiance.

Un agoraphobe peut donc être parfaitement incapable de s’éloigner des lieux dans lesquels il se sent en confiance ou des personnes en qui il a confiance. C’est pour cette raison précise que la peur de la peur est souvent accompagnée de symptômes dépressifs, qui sont le reflet de l’image de soi négative que le patient peut avoir et de la sensation de handicap qu’il expérimente lorsqu’il réalise ses tâches du quotidien.

D’où vient la peur de la peur ?

Dans la majorité des cas, les personnes agoraphobes ont expérimenté, au cours de leur existence, un épisode d’anxiété très intense ou une crise d’angoisse. Comme cette expérience a déclenché une peur très profonde et primitive, via une sur-stimulation de l’amygdale cérébrale, le patient pense qu’il va s’évanouir immédiatement, voire qu’il va mourir. Certaines personnes vont même jusqu’à penser qu’elles deviennent complètement folles ou qu’elles vont perdre le contrôle de leur sphincter, c’est-à-dire qu’elles vont s’uriner dessus.

Cette peur de la peur ne va aller qu’en s’accentuant et les patients vont adopter tout une série de précautions, afin de diminuer leur niveau d’exposition au risque. Ces précautions prennent généralement la forme de stratégies d’évitement, qui auront pour conséquence une forte dépendance pratique et émotionnelle. Cette dépendance vient, elle aussi, accompagnée de symptôme destructeurs : une perte de confiance en soi et une mauvaise image de soi. L’ensemble de ces facteurs ne font qu’aggraver la peur de la peur.

Si les agoraphobes doivent affronter leur peur de la peur au quotidien, ils se sentent en général protégés lorsqu’ils sont chez eux ou, autrement dit, ils pensent être moins vulnérables, même s’ils peuvent souffrir de crises d’angoisse au sein même de leur foyer. Il a été observé, chez des patients souffrant d’agoraphobie, le développement de comportements de sécurisation qui relèvent parfois du domaine de la superstition, mais qui leur confèrent une grande sensation de sécurité.

Pourquoi la peur ne disparaît-elle pas avec la diminution des crises d’angoisse, dues aux stratégies d’évitement mises en place par les patients ?

La réponse à cette question est parfaitement logique. En évitant de se placer dans des situations potentiellement dangereuses et en se réfugiant dans des lieux sûrs, les agoraphobes n’expérimentent jamais une sensation de paix et de sécurité. La fausse sécurité qu’elles ressentent ne fait qu’aggraver leur peur chaque jour un peu plus. Sans s’en rendre compte, elles développent une réalité qui finit par asphyxier totalement leur liberté et leur indépendance, à cause de leur peur de ressentir à nouveau de la peur.

Nous nous référons ici aux comportements qui maintiennent le problème de la peur de la peur. L’agoraphobie se construit et se développe par un autre biais que celui par lequel elle est arrivée. La plupart des cas d’agoraphobie se développent à cause d’une crise d’angoisse et se poursuivent, non pas par des crises d’angoisse, mais par des stratégies d’évitement et de sécurité.

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Comment surmonter la peur de la peur ?

Le conseil principal que nous pouvons donner aux personnes agoraphobes est d’affronter les peurs dont ils ont…peur. Pour y parvenir, elles ont besoin d’une expérience perceptivo-corrective, qui va leur permettre de rompre les associations situations-lieux-peur. Le moyen le plus adéquat pour réussir cette transition est d’avoir recours à l’aide d’un professionnel.

Différentes focales thérapeutiques peuvent permettre de surmonter la peur de la peur. Cependant, la thérapie ayant le plus démontré son efficacité dans ce domaine est la thérapie cognitivo-comportementale. Cela ne signifie pas, bien évidemment, qu’il s’agit de la seule thérapie qui fonctionne. Pour autant, c’est l’unique qui dispose de preuves empiriques à l’appui de ses méthodes. Dans tous les cas, pour surmonter la peur de la peur, l’aide d’un psychologue, tout du moins dans un premier temps, est nécessaire.

D’un autre côté, si vous souffrez d’agoraphobie, vous pouvez d’ores et déjà tenter de reprendre les rênes de votre existence et commencer à étudier votre cas, afin de bien définir quelles sont vos limites. Vous devez, dans un premier temps, établir une carte mentale de vos zones de sécurité, avant de calculer la distance maximale à laquelle vous pouvez vous éloigner d’elles. Dans un second temps, il va vous falloir essayer de vous éloigner de plus en plus de ces zones de sécurité, afin de commencer à affronter votre peur et à corriger votre comportement.

Pour conclure, gardez à l’esprit que cette peur est quelque chose de fondamentalement irrationnel, voilà pourquoi il vous faut suivre des expériences correctives afin de la surmonter. Si vous vous contentez de lire des livres et de mettre en œuvre quelques stratégies personnelles, vous aurez des difficultés à en finir avec votre agoraphobie. Car votre esprit doit réapprendre qu’avoir peur à ce point de la peur n’est pas un comportement sécure, mais plutôt une conduite dangereuse.

Vous pouvez y arriver !

 


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