La marque invisible de la maltraitance
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Lorsque les médias parlent de maltraitance il est souvent fait référence au nombre de plaintes ayant été déposées sur une période de temps donnée ou au nombre de personnes ayant été tuées par leurs conjoints. Mais la maltraitance, ce n’est pas seulement cela. Elle implique beaucoup plus pour celleux qui en souffrent, toutes les personnes en étant victimes n’apparaissant pas dans les statistiques (faux positifs et faux négatifs).
Il n’est généralement pas question de coups ou de bleus, encore moins de blessures qui ne se voient pas. En effet, le corps n’est pas le seul à pouvoir être blessé. Lorsque nous sommes dans une situation de maltraitance, il est normal qu’apparaisse un grand malaise psychologique, lequel doit faire l’objet d’un traitement, en commençant par l’expression ce qui est souvent passé sous silence.
Le trouble de stress post-traumatique chez les victimes de maltraitance
Lorsque nous parlons de trouble de stress post-traumatique, nous l’associons habituellement à des catastrophes naturelles, à des vols, à des meurtres ou à des attaques terroristes. Mais non à la maltraitance, alors qu’elle peut également s’appliquer à ce domaine. En effet, ce trouble se caractérise par la ré-expérimentation de l’événement, le malaise et la tentative infructueuse pour oublier, symptômes qui sont souvent observés chez les victimes de la violence fondée sur le genre.
Le syndrome de stress post-traumatique chez ces personnes a des caractéristiques très spécifiques. D’une part, il est normal de revivre les événements traumatisants à tout moment, d’autant que ces derniers ont pour origine le conjoint. Cela maintient les victimes en alerte et surveillance constantes dans la mesure où celui/celle qui leur inflige le mal n’est autre que celui/celle qui est censé-e les soutenir et les protéger.
D’autre part, le traumatisme érode progressivement l’état émotionnel des personnes qui en souffrent dans la mesure où elles mettent souvent des années pour demander de l’aide. En effet, il est fréquent que la victime maintienne sa relation avec l’agresseur-se afin d’éviter une nouvelle agression, de sorte qu’elle perçoit souvent qu’il n’existe pas de solution possible à sa situation (impuissance acquise, abandon).
Le syndrome de la femme maltraitée
Le fait de sentir qu’il n’existe pas de solution à ce qui leur arrive, en d’autres termes, d’entrer dans l’impuissance acquise, peut aussi conduire au syndrome de la femme maltraitée. Cette dernière s’adapte à la situation qu’elle vit et minimise la douleur. Mais ce n’est pas tout, elle déforme également la réalité, niant ou diminuant la gravité du problème dont elle fait l’objet.
En outre, cela peut changer la façon dont elle se perçoit ou dont les autres la perçoivent. En effet, elle peut s’auto-tromper et idéaliser l’agresseur-se, persuadée qu’iel arrêtera de l’attaquer parce qu’iel est amoureux-se d’elle. En fait, elle peut même parvenir à le/la disculper et à se blâmer elle-même pour la situation qu’elle vit, pensant que le traitement dont elle fait l’objet est juste.
La maltraitance et la dépression
Les victimes de maltraitance présentent souvent une faible estime d’elles-mêmes. Elles ont par ailleurs tendance à être isolées, ce qui signifie qu’elles n’obtiennent aucun soutien social ou renforcement émotionnel positif. Tout ceci affaiblit encore plus la victime, ce qui peut l’amener à tomber dans la dépression.
Ce trouble, à son tour, rend difficile la prise de décision et la concentration, outre le fait de produire une détérioration du rendement au travail et une augmentation du sentiment d’insécurité. La femme entre ainsi dans un cercle vicieux duquel il lui en coûte chaque fois davantage d’abandonner la situation de maltraitance.
Mais la dépression présente une autre conséquence : le suicide. Il a été observé dans de nombreuses études que 29% des femmes admises aux urgences pour tentative de suicide étaient victimes de maltraitance. En effet, la probabilité de suicide chez les femmes maltraitées est cinq fois plus élevée que dans la population générale.
L’anxiété associée à la maltraitance
Comme nous pouvons l’imaginer, les troubles anxieux ont également une prévalence plus importante chez les personnes maltraitées que chez celles qui ne le sont pas. En dehors du syndrome de stress post-traumatique susmentionné, il a été constaté que les phobies, l’agoraphobie, le trouble d’anxiété généralisée et le trouble obsessionnel-compulsif sont également très fréquents chez les personnes victimes de maltraitance.
Ce dernier trouble semble intervenir comme une tentative de gestion de l’anxiété face à une situation aussi imprévisible. Apparaissent dès lors des pensées obsédantes relatives à l’agresseur-se, ainsi que des comportements compulsifs pour tenter de réduire l’anxiété générée par ces phrases qui apparaissent dans l’esprit.
“Face aux atrocités, nous devons prendre parti. Le silence stimule le bourreau.”
-Elie Wiesel-
L’agresseur-se exerce son pouvoir et sa force sur sa victime d’une manière qui finit par détruire l’autre, et ce tant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Psychologiquement, la maltraitance laisse une marque sur la personne maltraitée pouvant avoir des conséquences désastreuses. Il est donc important de prêter attention et de fournir une issue possible à la situation dans laquelle ces personnes se trouvent.
Images cordialement fournies par Chris Lawton, de Tertia Van Rensburg et de René Bohmer
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