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Je suis fatigué d'être fort, est-ce un problème ?

5 minutes
Ce n'est pas grave si vous êtes fatigué d'être fort. Accepter que vous ne pouvez pas tout gérer et que vous avez touché le fond est la première étape pour recommencer. Accepter ses limites et sa vulnérabilité est un exercice de santé et de bien-être.
Je suis fatigué d'être fort, est-ce un problème ?
Valeria Sabater

Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

“J’en ai marre d’être fort, de pouvoir tout faire, de prétendre que rien ne me fait mal, ne m’épuise ou ne me dérange.” Peut-être qu’en ce moment plus d’un se sent identifié à cette situation. Ce sont des expériences vitales très courantes qui accompagnent ceux qui se voient, par exemple, avec la pression de se charger de nombreuses responsabilités.

Dans la plupart des cas, vous n’êtes pas fort pour vous-même, mais pour les autres. Nous ne voulons pas inquiéter nos parents à propos de tous les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Nous ne voulons pas non plus que nos enfants se rendent compte que nous sommes épuisés, que le travail va mal et que les factures s’enchaînent. Parfois, nous semblons même être d’accord avec nos partenaires.

Se montrer capable de tout est un mécanisme de survie pour ne pas attirer l’attention, pour ne pas brouiller notre image de personne infaillible, courageuse, invulnérable. Cependant, il arrive toujours un moment où la vérité éclate. Tôt ou tard, notre environnement est témoin de nos fractures internes, de l’épuisement, de la souffrance…

Le monde brise n’importe qui. Beaucoup sont forts dans les endroits brisés. Mais ceux qui ne cassent pas meurent.

Ernest Hemingway

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Que puis-je faire si je suis fatigué d’être fort ?

Ce fait peut nous surprendre, mais derrière la personne obsédée par le fait d’être forte et de pouvoir tout faire, se cachent deux émotions fondamentales : la culpabilité et la honte. La culpabilité est ressentie quand on ne peut pas accomplir tout ce qui est proposé. Et elle a honte de ce que les autres pourraient penser en révélant cette faillibilité.

Des travaux de recherche comme ceux menés à l’Université du Massachusetts montrent que notre esprit est dominé par de multiples distorsions cognitives qui renforcent ces deux états émotionnels. Le “devrait” dont nous parlait Albert Ellis nourrit l’autocritique et cette croyance inflexible qui nous pousse à être efficaces, productifs et parfaits.

Ainsi, lorsque nous identifions soudainement une limite à nos forces, la peur et la contradiction surgissent. Vous sentez que vous avez moins de valeur en tant que personne quand vous tombez, quand vous n’en pouvez plus. Vous craignez de décevoir les vôtres. Cela vous fait peur de sentir le voile de la vulnérabilité le faire trembler, l’obliger à s’arrêter et à ralentir…

Souvent, lorsque nous nous apercevons que nous avons atteint la limite et que nous nous sentons épuisés mentalement et émotionnellement, nous nous sentons coupables et alimentons l’autocritique.

Permettez-vous d’être vulnérable ; ne pas être capable de tout, c’est bien

Être fatigué d’être fort n’est pas une brèche dans le caractère ou un signe de notre faillibilité. Prendre conscience de nos limites et toucher le fond est le reflet de notre humanité. Il n’y a rien de mauvais ou d’exceptionnel à cela. L’erreur est dans notre société, qui nous inocule l’idée d’être toujours forts mentalement et super-héros de nos vies.

S’autoriser à être vulnérable, c’est découvrir notre véritable force en tant que personne. Car comme l’écrivain et professeur à l’Université de Houston, Brené Brown, nous l’expliquait en son temps, la vulnérabilité est notre plus grand trait de courage. D’une manière ou d’une autre, quiconque s’accroche au besoin d’être toujours fort et incassable, se coupe des expériences qui donnent un but et un sens à nos vies.

Parfois, il est nécessaire de toucher le fond pour prendre plus d’élan en remontant à la surface. Ce n’est que lorsque nous acceptons nos limites, nos peurs, nos faiblesses, nos besoins et nos insécurités que nous pouvons mieux nous connaître pour assurer notre bien-être.

Être fatigué d’être fort n’est pas un problème, c’est un signal d’alarme

Lorsqu’un coureur franchit la ligne d’arrivée après un marathon, il ne retourne pas à la ligne de départ pour recommencer. De plus, lorsque nous rentrons épuisés du travail, nous ne commençons pas à faire des travaux ou des rénovations. Habituellement, nous prenons une douche et nous nous reposons. Donc, si nous comprenons ces réalités… pourquoi ne comprenons-nous pas que l’épuisement émotionnel est également normal et permis ?

Être fatigué d’être fort et prétendre que tout va bien n’est pas un problème, c’est un signal d’alarme pour que nous nous arrêtions. Quand on se sent dépassé, il est temps d’entamer un dialogue avec soi-même. Regarder à l’intérieur pour savoir ce qui se passe nous permettra de mieux nous adapter aux pressions extérieures. Vous devez assister et répondre à vos propres besoins et le faire, ce n’est pas un acte d’égoïsme.

Nous devons être assez courageux pour explorer nos limites, nos peurs, notre chaleur et nos ténèbres pour découvrir la quantité de lumière que nous pouvons apporter au monde.

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Le concept de “force” doit être reformulé

Il est temps de donner une nouvelle version de ce que signifie être fort. Il est nécessaire d’effacer et d’actualiser ce concept, pour éviter qu’en vertu de cette proclamation nous continuions à perdre notre santé et à nous tourmenter un jour sur l’autre. Fort n’est pas celui qui peut tout, courageux est celui qui se permet de déléguer et connaît ses limites.

Le courage est celui de la personne qui prend conscience de ses souffrances et y travaille. Guts est révélé par ceux qui, au-delà des critiques des autres, se permettent de dire tout haut “Je n’en peux plus, je ne vais pas faire ça”. Tous ces exemples constituent une toile de ce qu’est la force émotionnelle authentique, celle qui, jusqu’à récemment, nous a vendu à tort.

Evitons donc de prolonger inutilement l’inconfort en prétendant que tout va bien, et que l’on peut accepter quoi qu’il arrive. Nous avons tous une part de résistance et il y a des moments où nous en avons tout simplement assez pour nous supporter. Il ne se passe rien non plus pour ces derniers : consacrer du temps et de l’attention à soi est aussi permis, nécessaire et sain.


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