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Frances Farmer, l'actrice de caractère qui fut lobotomisée

5 minutes
Frances Farmer, l'actrice de caractère qui fut lobotomisée
Valeria Sabater

Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater

Écrit par Valeria Sabater
Dernière mise à jour : 15 novembre, 2021

C’était une femme différente, certainement trop audacieuse pour les années 40 où pour être actrice il suffisait d’être belle et obéissante. Frances Farmer osa s’obstiner et fut qualifiée d’hystérique. Elle osa se montrer ferme et réclamer des rôles plus intéressants et fut qualifiée de naïve. Il était trop tard lorsqu’elle décida de s’éloigner de ce monde, c’est à ce moment qu’elle fut qualifiée de “folle”.

Il est fort probable que peu de personne se souviennent ne serait-ce que du nom de Frances Farmer aujourd’hui. Encore une autre figure féminine disparue dans la nébuleuse du temps, derrière ce rideau poussiéreux où s’accumulent nombre d’histoires intéressantes et toujours impitoyables reflètant souvent une époque précise, mais qui méritent d’être évoquées aujourd’hui comme autant d’appels à l’aide auxquels nous sommes resté-e-s sourd-e-s.


“La seule chose que je possède est l’habitude de souffrir.”

-Frida Kahlo-


 Toutefois, le nom de cette actrice est très connu dans le milieu psychiatrique pour diverses raisons : les traitements psychologiques auxquels cette femme fut soumise pendant de nombreuses années reflètent une époque à la fois trouble et terrible, où les femmes, curieusement, étaient souvent les principales victimes directes…
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Frances Farmer, une femme éduquée pour se faire entendre et être célèbre

Nous disposons actuellement d’une vaste documentation sur la vie de Frances Farmer. Sa propre soeur a publié un livre intitulé Look Back in Love, où elle raconte chacune des expériences brutales que la jeune actrice a vécu pendant les années où elle fut internée dans des hôpitaux psychiatriques. Par ailleurs, l’étude intitulée Will There Really Be a Morning? s’interroge sur sa personnalité, son entourage familial et sur le fait de savoir si elle souffrait effectivement de ce que l’on disait, une schizophrénie paranoïaque.

Quoi qu’il en soit, comme souvent dans des cas de cette complexité, il ne faut pas oublier certains éléments : l’éducation et le contexte historique. Le fait que nous disions en introduction que Frances était une femme trop audacieuse pour son époque est dû à une raison très précise : sa mère lui inculqua dès son plus jeune âge à se faire entendre, à donner son point de vue et à systématiquement montrer un esprit critique.

Adolescente déjà, elle apparut dans les journaux locaux de Seattle pour avoir prononcé des discours sur les revendications des femmes ou la non-croyance en Dieu sur la base de l’héritage de Nietzsche. Plus tard, sa mère l’inscrivit à des cours de théâtre dans un but précis, celui de combler un manque personnel, une frustration de sa propre jeunesse : être reconnue dans le milieu cinématographique. Un objectif que Frances atteignit lorsqu’elle était à l’Université et poursuivait l’un de ses principaux hobbies : écrire des articles engagés sur la société de son époque.

Ne parle pas, ne dis rien, obéis

En 1935, après avoir obtenu quelques rôle de cinéma, Frances Farmer atteignit son objectif principal : obtenir un diplôme de journalisme. Néanmoins, avant de se lancer dans cette carrière, sa mère la convainquit de mettre temporairement de côté ses objectifs professionnels et de se focaliser sur le monde cinématographique. Frances accepta et son agent organisa une audition chez Paramount Pictures.

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L’audition ne pouvait être plus facile : revêtir une jolie robe, rester assise et regarder la caméra. Frances Farmer possédait une beauté classique d’où émanait parfois l’audace et la séduction, ce qui était plus que suffisant pour l’industrie cinématographique. Ils lui offrirent un contrat de 7 ans, elle devait juste obéir, apprendre les scripts, se présenter de temps à autre aux fêtes organisées par la direction et garder le silence sur ce qu’elle aurait pu entendre en de telles occasions.

Frances se rebella contre ce milieu. Elle détestait les rôles de femme naïve qui lui étaient offerts. Elle détestait la presse et surtout de devoir suivre un chemin où tout n’était que glamour et mensonge. Elle céda néanmoins. Elle céda sous la pression de sa mère et de ses agents, allant même jusqu’à se marier avec un autre acteur dans le but de renforcer un peu plus son statut de star émergente.

Soif de liberté et camisole de force

Le déclin de la carrière de Frances Farmer a commencé tôt. Elle refusait de jouer certaines scènes, refusait des scripts et ne respectait pas les contrats signés avec ses agents. Le soir elle conduisait en songeant à fuir tout cela, même elle-même.  Elle appuyait sur l’accélérateur vers une fuite impossible qui souvent finissait mal. Elle était très connue de la police de Santa Monica pour accumulation de contraventions pour conduite dangereuse et en état d’ébriété.


“J’ai parfois l’impression d’avoir le coeur gravé dans la pierre.”

-Frances Farmer-


Cependant, tout se compliqua lorsqu’elle frappa l’un des dirigeants d’Hollywood. Elle pris la fuite, pas suffisamment loin, la police la poursuivant au milieu de cris, de coups de pieds et de vaines tentatives pour se débarrasser de tous ces symboles d’autorité la pourchassant, pour finalement parvenir à un accord : l’admettre dans un centre psychiatrique pour apaiser sa colère, son caractère, sa personnalité réactionnaire.

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Toutefois, Lillian Farmer, la mère de Frances, considéra que sa fille n’était pas complètement guérie, qu’elle n’avait pas “tous ses esprits”, et obtint, avec l’aide des dirigeants d’Hollywood, qu’elle soit déclarée incapable mentale et réintégrée dans un centre psychiatrique.

Cinq années dans l’abîme

Frances Farmer fut admise à l’hôpital de Steilacoom, à Washington. Elle y passa 5 années que sa soeur décrira plus tard dans un livre. Aux traitements psychiatriques les plus sévères dont elle fut l’objet, s’ajouta le plus terrible de tous : les abus sexuels et les violences à répétitions. Enfin, comme le raconte l’un des infirmiers du centre, Frances Farmer fut l’objet d’une lobotomie sans autorisation familiale. Le but ? Apaiser sa personnalité, son mauvais caractère, son hystérie …

 

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Par la suite, après ces 5 années d’enfermement, d’abus et de traumatismes, elle ne fut plus jamais la même. Elle apparut dans quelques interview, dans quelques pièces de théâtre, dans certaines séries télévisées où sa simple présence générait un côté morbide et beaucoup d’audience. Cependant elle n’avait plus la même attitude, elle avait perdu sa force, son caractère s’était envolé et sa véritable beauté, celle définissant la vraie Frances Farmer, avait été volée, arrachée

Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.