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Les Chevaux de Dieu : l'autre visage du terrorisme

6 minutes
Les Chevaux de Dieu : l'autre visage du terrorisme
Gema Sánchez Cuevas

Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas

Dernière mise à jour : 13 novembre, 2024

Dans nos rétines et surtout, dans nos coeurs, réside la tristesse et l’angoisse subies ces derniers mois en raison de l’attentat terroriste qui a eu lieu à Barcelone. Nous sommes nombreux-ses à ne pas comprendre comment certaines personnes peuvent en arriver à commettre de telles atrocités contre d’autres.

Vient ensuite la haine, la soif de vengeance et la rancoeur. Nous jugeons les terroristes, nous voulons les envoyer en enfer et nous pensons que, plus que des psychopathes, iels sont de véritables assassins regorgeant de malveillance envers l’Occident.

La réalité est très différente. Personne ne naît en voulant anéantir un autre peuple, personne ne ressent autant de haine. L’Homme est bon par nature, ou du moins il a la possibilité de l’être. Lorsqu’il nait, il n’est qu’un enfant dont le devoir est de jouer et d’être heureux, mais au fil des années et comme résultat du monde que nous avons créé, il apprend, de manière défectueuse, certaines manières de penser et de se comporter. C’est alors qu’il devient un monstre, alors qu’en réalité il n’est qu’une victime de plus.

Si on ne comprend pas d’où part le terrorisme, on pourra difficilement en finir avec lui. Ce ne sont pas les terroristes qui méritent notre compression, mais c’est le problème qui requiert, pour être résolu, notre intelligence.

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Les chevaux de Dieu

Par les temps qui courent, nous pensons à un roman qui résulte indispensable ; il s’intitule Les chevaux de Dieu, écrit par l’auteur Mahi Binebine. “Les chevaux de Dieu”, c’est ainsi que l’on dénomme ces hommes qui s’immolent par le feu là ou l’imam leur dit de le faire et qui fait référence à la manière dont, fidèles, ils arrivent au paradis et s’entourent de belles houris, au galop, comme le font les chevaux.

Le roman de Bibine est d’un réalisme effrayant. Il raconte la réalité crue d’enfants qui vivent dans un quartier marginal du Maroc, qui sont nés au sein de familles déstructurées, et qui sont conscients qu’ils n’auront jamais le futur auquel ils aspirent au fond mais que la seule chose qui les attend, de même que cela est arrivé à leur grand-père et à leur père, est la misère et le malheur.

Ils rêvent de devenir des stars du foot et jouent tous les jours dans leur quartier pour y arriver. Beaucoup pourraient réussir à réaliser leur rêve, car ils en ont les capacités. Pour le foot, et pour bien d’autres choses, car pour y arriver, la première chose dont ils ont besoin, c’est d’une opportunité.

Ces enfants sans aucun espoir sont détruits, privés de toutes raisons de rester debout. Ils sont conscients que la plus grande chose à laquelle ils puissent aspirer, c’est de vendre des oranges tous les jours dans la rue et prier pour que le bénéfice obtenu puisse leur permettre de manger.

C’est alors qu’arrive l’espoir, la lumière, cette personne qui leur promet, enfin, un sens à leur vie. L’imam, de manière agréable et chaleureuse, met à leur portée, ou du moins leur fait voir qu’est à leur portée, l’opportunité de sortir de la pauvreté. Non seulement il leur promet des espoirs rêvés via de beaux mots qui renforceraient l’estime personnelle de chacun-e, mais il leur garantit aussi le paradis, avec tout ce que cela implique. Il les persuade qu’ils peuvent être utiles et faire quelque chose de grand, que la fin justifie les moyens.

Et c’est là que surgit le terrible paradoxe : pour donner un sens à mon existence, je dois y mettre fin, et ainsi j’atteindrai l’espoir.

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Question de manque d’intelligence ? Non, pas vraiment. Sûrement sont-ils des garçons intelligents qui, s’ils avaient reçu une éducation, seraient allés loin. Le problème, c’est que la formation et la culture brillent par leur absence et qu’il y a longtemps que leurs besoins ne comptent plus pour ceux qui sont au pouvoir.

Lorsque l’être humain se sent désespéré, il est capable de s’attacher à n’importe quelle chose, même si loin de cette situation désespérée il pourrait condamner la même issue pour laquelle il opte alors. L’imam est capable de séduire ces enfants jusqu’à arriver à les mener à mettre fin à leurs jours et à semer la terreur.

Où se trouve donc la solution ?

Si on se fie à ce que nous venons de développer, il semble évident que la solution à ces barbaries sévissant aussi bien en Orient qu’en Occident consiste à fomenter l’intégration de ces enfants, à consacrer du temps, des efforts et de l’argent à leur éducation, de manière à ce qu’ils n’aient pas à faire face au désespoir, et qu’ils ne deviennent alors une proie facile pour les imams.

La solution sur le long terme ne passe pas par le fait de renforcer la sécurité dans certaines zones et d’ignorer le fond du problème : plus on investira dans la sécurité, et plus ils seront en sécurité. Il sera plus facile pour les radicaux de les persuader que nous sommes dans une guerre où ils n’ont pas d’autre choix que de lutter, que le seul exercice de courage qu’ils puissent faire consiste à mettre fin à leurs jours pour en finir avec leurs “ennemis”.

Il faut agir à la source, sur la cause, sur le manque d’opportunités et ainsi, il sera bien plus compliqué que se produise cette captation sectaire. Donnons et facilitons l’accès à la culture, ouvrons une fenêtre d’opportunités au lieu de fermer les volets pour cacher la lumière qui entre.

Si on se sent satisfait-e et heureux-se dans sa vie, il n’y aura aucun sens à attendre que vienne quelqu’un pour nous donner sécurité et certitudes, puisqu’on n’en aura pas besoin.

Combien de fois nous est-il arrivé, à moindre échelle, de nous sentir tellement abattu-e-s que nous nous sommes laissé-e-s porter par nos émotions et que nous avons pris les pires décisions que nous pouvions prendre ? Si nous étions tou-te-s capables de nous mettre à la place de ces enfants que nous jugeons présomptueusement, certainement serions-nous plus à même de trouver la solution à ce qui arrive.

Note d’édition : n’oublions pas que la psychologie a démontré que les circonstances ont un pouvoir énorme. Que les élèves innocents peuvent devenir de véritables tyrans, comme cela s’est produit au cours de l’expérience de la prison de Stanford ou encore de celle des décharges de Milgram.

D’un autre côté, l’intention de cet article est celle d’envisager une réflexion face à ces messages de vengeance qui ont circulé ces derniers mois sur les réseaux sociaux ; compréhensibles en raison de l’impact émotionnel du moment, mais loin d’être une solution qui pourrait mettre définitivement fin à ce type d’attentats.

Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.