Apprendre à être antifragile, l'art de nous mouvoir au milieu de l'incertitude
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Chaos, incertitude, instabilité, imprévus, hyperconnexion, solitude, anxiété… Notre société pourrait se définir par ces termes et par bien d’autres adjectifs qui sont désormais omniprésents en temps de crise. Au milieu de toute cette situation, il existe une stratégie de survie : apprendre à être antifragile, une ressource intéressante introduite par l’essayiste libanais Nassim Nicholas Taleb en 2012.
Survivre et fleurir dans un milieu aussi changeant et plein de défis est compliqué – et le terme est faible. On peut cependant y parvenir, et pas que : certaines personnes réussissent même à tirer un grand profit de ces situations adverses.
Lorsque l’on songe à définir ce terme, il est habituel d’utiliser la métaphore de l’hydre, ce serpent mythologique qu’il était impossible de détruire. Quand on lui coupait une tête, deux autres émergeaient de la blessure.
Cette image profile, d’une certaine façon, ces personnalités qui réussissent à réagir en dépit du stress, de la douleur et des difficultés.
Évidemment, il n’y a rien de simple à adopter cette approche. Il faut d’abord traverser une étape de plus grande faiblesse où l’on prend conscience de ce qu’est un échec, ce qui suppose de tomber et de toucher le fond pendant un moment.
Ce n’est que quand nous passons par l’apprentissage de l’adversité que nous parvenons à guérir ces fractures psychologiques en les recouvrant d’un nouveau matériau aussi fort que le graphène pour devenir, selon Taleb, « antifragiles ».
Apprendre à être antifragile : de quoi s’agit-il ?
C’est en 2007 que Nassim Taleb a publié le livre Le Cygne noir pour nous parler de ces faits inattendus et imprévisibles qui ont parfois lieu dans notre monde. D’une certaine façon, ce chercheur et statisticien, mathématicien à l’Université de New York, nous a obligé à prendre conscience de la chose suivante : nous, les personnes, nous sommes habituées à prendre trop de choses pour acquises, laissant peu de place au facteur chaos qui, de temps en temps, vient altérer tous les domaines de notre réalité.
Un cygne noir est, par exemple, une crise économique ou sanitaire et également une perte personnelle, un échec inattendu, etc.
Accepter que nous ne pouvons pas tout contrôler a sans doute été la première leçon qu’il nous a donnée avec son livre mythique. Cinq ans après, il nous a surpris avec un autre terme, une autre idée qui venait compléter la proposition précédente.
Pour nous mouvoir dans ce lac aux eaux incertaines où l’on aperçoit parfois un cygne noir, le mieux est d’apprendre à être antifragile. Pourquoi ? C’est très simple : pour gérer le stress suscité par l’imprévu, pour développer un point de vue modéré, attentif et habile qui nous permettra de survivre à n’importe quelle situation chaotique, à n’importe quelle expérience exigeante, inattendue et complexe.
Vous pouvez être fragile, robuste ou antifragile
Nassim Taleb nous explique dans son essai que l’être humain peut montrer trois types de comportements face à n’importe quel événement représentant un défi :
- Nous pouvons, par exemple, agir en étant fragiles. En fait, c’est un état par lequel nous sommes tous passés à plusieurs reprises et que nous connaissons à la perfection. Il s’agit de vivre avec une angoisse permanente et insupportable. L’auteur lui-même prend l’exemple de Damoclès et de cette épée qui était toujours au-dessus de sa tête, menaçant de le tuer. Le stress ressenti face à la sensation que quelque chose va mal se passer et le fait de ne pas savoir comment réagir nous plongent dans un état de souffrance permanent
- Il est possible d’agir en étant forts, lumineux et robustes. L’exemple ici donné est celui du phénix. Quelqu’un renaît après avoir été détruit et le fait en étant plus fort… Mais pas en faisant preuve d’une plus grande intelligence ou d’une plus grande sagesse
- Enfin, Nassim Taleb souligne l’importance d’apprendre à être antifragile. D’être comme une hydre, quelqu’un à qui l’on peut couper la tête pour ensuite en voir surgir deux autres. Il s’agit de réagir avec beaucoup d’ingéniosité au milieu du chaos et de transformer cette situation de stress ou de difficulté en une opportunité pour nous surpasser, grandir et retrouver notre pouvoir
Être résilient et être antifragile : est-ce la même chose ?
Le champ de l’antifragilité part en fait de la sphère économique. La résilience, de son côté, vient du monde de la physique.
Malgré cela, ces types de concepts se sont projetés de manière décisive dans le domaine de la psychologie et, surtout, dans celui du développement personnel. C’est pour cela que beaucoup de personnes se demandent si ces deux idées ne nous décriraient pas la même réalité. La réponse est non.
La résilience définit notre capacité d’adaptation aux situations adverses, à en tirer des leçons et à en sortir plus forts. Être antifragile va bien au-delà de la simple adaptation aux moments compliqués, incertains ou exigeants. Il s’agit d’en tirer profit, de se positionner avec habileté en regardant l’incertitude comme une opportunité de croissance et de pouvoir.
Par ailleurs, l’antifragilité part indéniablement de la fragilité elle-même. Ce n’est que quand nous avons vécu dans notre propre chair les effets du chaos du destin que nous parvenons à endurcir notre peau, notre cœur et notre point de vue mental pour comprendre qu’il faut réagir. Et il ne suffit pas seulement de nous défendre face aux difficultés. Il faut agir avec intelligence pour pouvoir fleurir dans ces moments de tempête.
Comment apprendre à être antifragile
Nous le savons bien : personne, parmi nous, n’est une hydre ou aimerait l’être. Apprendre à être antifragile ne signifie pas nous transformer en monstres à la peau dure et au cœur froid. En fait, ce concept n’a pas non plus de rapport avec une agressivité quelconque. Il faudrait plutôt travailler les dimensions suivantes :
- Apprendre à gérer le stress
- Comprendre et accepter toutes nos émotions
- Tirer profit de notre anxiété au lieu de devoir l’affronter, en l’activant pour nous injecter de la motivation et une capacité à nous dépasser jusqu’à ce que nous réussissions
- Être créatif pour définir de multiples réponses face à un même problème
- Accepter l’incertitude, comprendre que la vie peut changer, que ce que nous tenons aujourd’hui pour acquis peut cesser d’exister dès demain
- Cela suppose de réduire la peur face aux changements
- Nous devons aussi savoir ce dont nous avons besoin à chaque instant et nous le fournir, en sachant aussi voir les opportunités de croissance autour de nous et en tirer profit sans hésiter
Pour conclure, apprendre à être antifragile pourrait être une stratégie de survie idéale pour beaucoup de moments de notre existence. Apprenons de ces différentes propositions pour avancer un peu plus dans notre projet de vie.
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Taleb, Nassim (2012) Antifragil, las cosas que se benefician del desorden. Paidós: Madrid
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