Projection : pourquoi mesure-t-on les autres à notre aune ?
Relu et approuvé par Psychologue Gema Sánchez Cuevas
Personne n’est plus infidèle que quelqu’un de jaloux. Il peut même être infidèle seulement par la pensée, sans avoir à agir. Pourtant, pour lui, il est impossible que son partenaire soit fidèle, c’est pourquoi il le questionne sans cesse même s’il n’y a pourtant aucune raison de le faire. Par de telles actions et de tels schémas de pensée, on dit que l’on mesure les autres à notre aune.
Et cela ne vaut pas que pour les personnes jalouses ; on mesure les autres à notre aune à chaque fois qu’on attribue à quelqu’un des caractéristiques que l’on peut en réalité s’attribuer à soi-même. En d’autres termes, lorsque l’on voit en les autres ce que l’on est soi-même, comme s’ils étaient le reflet que l’on pouvait voir dans le miroir en s’y regardant. On note alors chez eux la présence de traits de caractère et de personnalité qui nous définissent nous-mêmes ; on attribue ainsi aux autres ses propres défauts, ou ses propres qualités.
“Nous traitons les autres de la manière dont nous nous traitons nous-mêmes.”
-Miguel Ruiz-
Lorsque l’on dit que l’on mesure les autres à son aune, en réalité, nous parlons d’un mécanisme de défense inconscient portant le nom de “projection”, et consistant précisément à voir chez les autres ce que l’on ne veut pas admettre chez nous.
Les mécanismes de défense
Les mécanismes de défense sont des stratégies en grande partie inconscientes. Leur but est de protéger la conscience de pensées ou d’émotions pouvant résulter désagréables ou intolérables. C’est comme s’il y avait un bouton qui s’activait automatiquement, et qui faisait alors tomber un voile sur ce que l’on ne veut pas voir. Ainsi, on cesse donc de voir toutes ces choses, même si elles sont encore là.
Nous avons tous des mécanismes de défense. Certains se forment à des âges très précoces, et d’autres, plus tard. Ils nous aident à maintenir l’équilibre et ne sont bons ou mauvais en soi. Certaines personnes ont tout à fait conscience des mécanismes de défense qu’ils emploient, alors que pour d’autres il est plus difficile de les reconnaître.
La projection fait partie de ces mécanismes de défense. Elle ne permet pas d’éviter le mal-être que l’on peut ressentir du fait de réalités personnelles que l’on rejette consciemment, c’est pourquoi, involontairement, nous mettons de côté des réalités au point de ne plus les voir. Nous les attribuons aux autres ; c’est ainsi que nous mesurons les autres à notre aune.
Comment mesure-t-on les autres à son aune ?
D’une manière ou d’une autre, nous projetons continuellement des choses sur les autres. Nous voyons le monde à notre manière. Nous faisons une lecture particulière de la réalité, aussi objectifs puissions-nous prétendre être. Nous voyons certains aspects et nous cessons d’en voir d’autres. Quand nous parlons du monde qui nous entoure, en réalité, nous parlons en grande partie de nous-mêmes.
Le mécanisme de projection opère de différentes manières. Voici quelques exemples :
- Projection affective : nous disons d’une personne qu’elle nous déteste, alors qu’en réalité c’est nous qui détestons cette personne. Il en va de même avec l’amour ainsi que tous les autres sentiments.
- Projection émotionnelle : on parle de cette projection lorsque l’on dit que la lune est romantique ou que la mer est silencieuse ; en réalité, la lune est un satellite qui n’a en elle-même aucun sentiment, et il en va de même pour la mer. C’est nous qui les voyons ainsi, nous qui leur donnons une autre connotation.
- Projection d’un besoin : celle-ci est un peu plus difficile à détecter. Elle se produit quand, par exemple, une personne donne des conseils à tout le monde, sans que pourtant personne ne lui demande rien. Probablement cette personne cherche-t-elle une personne qui puisse l’orienter.
- Projection des traits personnels : on parle de cette projection lorsque l’on récrimine les conduites des autres, conduites que nous avons pourtant nous aussi. C’est par exemple le cas du père fumeur qui réprimande ses enfants lorsqu’il les voit avec une cigarette à la bouche. Il s’agit là typiquement d’une personne qui mesure les autres à son aune.
La projection ne s’opère pas que dans des cas isolés. Parfois, nous construisons de véritables théories qui ne mettent en lumière que des traits très particuliers. C’est ce qui est arrivé à l’humanité égocentrique, qui ne parvenait pas à accepter que la Terre tourne autour du Soleil.
Prendre conscience des projections que l’on fait
Si on parvient à prendre conscience des projections que l’on fait, on augmente alors significativement notre connaissance de nous-mêmes. Pour y arriver, le plus efficace consiste à prendre une certaine distance et à essayer de s’observer tel que l’on est. L’idée consiste à capter ce que l’on ressent réellement.
Lorsque vous émettez un jugement spontanément sur une personne, essayez de faire une pause. Examinez quel est le contenu de ce jugement et ce que vous ressentez par rapport à ce contenu. Evaluez les raisons que vous avez de juger de cette manière. Essayez de déchiffrer quels sont les sentiments négatifs qui accompagnent ce raisonnement.
Il est fort probable qu’en faisant ce petit exercice, vous commenciez à vous rendre compte de la manière dont vous vous projetez, ainsi qu’à comprendre ce que cela signifie que de mesurer les autres à son aune. Trouvez en vous ce qui vous semble insupportable chez les autres.
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