La nostalgie collective du passé
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Parfois, nous ressentons de la nostalgie. Nous repensons avec le sourire à ce moment, cette situation ou cet événement passés. Nous souffrons en repensant à quelque chose qui s’est déjà passé, à quelque chose que l’on avait autrefois, mais que l’on a aujourd’hui perdu. Cette émotion peut être ressentie envers une personne, envers un groupe (nostalgie collective), envers un objet ou envers certains événements.
Cependant, il est important de souligner que la nostalgie peut donner lieu à deux sentiments bien distincts ; l’un est un sentiment positif, un bon souvenir d’un objet absent ou disparu avec le temps, et l’autre est un sentiment négatif, un sentiment de douleur, de souffrance pour ce que l’on ne peut plus récupérer, pour ce que l’on voudrait voir revenir.
Le fait d’être nostalgique
Peut-être ce qui nous rend le plus souvent nostalgique est-ce le souvenir d’une personne que l’on a aimée. Ruptures amoureuses, longs séjours à l’étranger ou décès nous plongent dans la nostalgie, et le désir de voir la personne revenir. Cependant, la nostalgie d’un lieu peut être tout aussi forte.
En français, il existe une expression servant à désigner ce type de nostalgie qui se mêle à la mélancolie que l’on peut ressentir lorsqu’on est loin de sa terre natale : le mal du pays. Le mal du pays, c’est la nostalgie de la terre natale. Manquer du lieu d’où on vient et des objets et autres situations que ce lieu évoque.
Nostalgie collective
D’autre part, des situations ou autres événements passés peuvent également être l’objet d’une certaine nostalgie. Nous vous parlons ici de la nostalgie collective : ce type de nostalgie fait référence au désir partagé de retrouver ce que la société a été, et ce qu’elle a supposé.
Nous avons tou-te-s entendu quelqu’un, à un moment ou un autre de notre vie, dire : “de mon temps, les choses étaient différentes”. Or, les comparaisons de ce type ne sont jamais justes. Les va-et-vient de la mémoire, avec toutes les déformations que cela implique, peuvent nous mener à aspirer à un passé tout aussi déformé. La mémoire sélective ne nous montera que les événements qui stimulent notre nostalgie.
Bien des personnes regrettent, de même qu’elles en font l’éloge, les régimes dictatoriaux. Elles déplorent le manque de sévérité qu’elles observent actuellement, et clament leur désir de retrouver un leader fort et charismatique qui redonne sa grandeur à leur nation. Evidemment, ces personnes oublient des épisodes importants du passé et du présent. Elles ne tiennent pas compte de toutes les libertés que suppose le fait de ne pas évoluer dans un régime autoritaire, et ne mentionnent pas les possibles crimes commis au cours de ces époques dont elles aspirent au retour.
“Il n’y a pas de nostalgie pire que celle de regretter ce qui n’a jamais existé.”
-Joaquín Sabina-
Ces personnes vivent dans leur fantasme, lequel n’est autre qu’une déformation de la réalité. Elles finissent donc par glorifier le passé et un de ses représentants. Pensez aux personnes qui vantent les mérites de personnages historiques aussi détestables qu’Hitler ou Mussolini. S’ils ont certes permis un certain progrès pour leur communauté, leurs crimes devraient enterrer toute nostalgie, et ce en tout temps.
La nostalgie comme motivation
La nostalgie collective, en tant qu’émotion groupale, peut devenir une forte motivation qui va guider la conduite d’un groupe. Quand on partage cette nostalgie pour une classe bien précise de la société avec la majorité des membres de notre groupe, l’action est plus facile. Si un grand groupe veut apporter le passé dans le présent, la violence peut devenir un moyen envisageable si les autres ne fonctionnent pas.
“C’est une douleur étrange. Mourir de nostalgie pour quelque chose que vous ne vivrez jamais.”
-Alessandro Baricco-
La nostalgie collective peut prédire, dans certains cas, l’action collective. Plus l’intensité de cette émotion dans le groupe est grande, plus il sera probable que les membres de ce groupe descendent dans la rue pour réclamer leur objet de désir, leur passé glorieux. Mais cette relation n’est pas simple, et les émotions vont la réguler. Les émotions négatives, tout particulièrement.
La haine, la colère et le mépris sont des émotions qui, dirigées vers un autre groupe, vont aider à ce que la mobilisation se produise. Quand un groupe ressent de la nostalgie pour la manière dont la société était autrefois et qu’il identifie le/la coupable du changement, un autre groupe qui empêche le retour au passé par exemple, le surgissement d’émotions négatives et d’actes de défense du désir sont plus probables. Des actes qui peuvent être considérés comme normatifs, être dans la légalité, ou au contraire transgresser ce qui est considéré comme légal et recourir au vandalisme ou à la violence.
Cependant, la nostalgie collective n’a pas à être négative. Si on regrette ce qu’était un pays autrefois, il faudrait voir comment était ce pays. Ou, encore mieux, quels sont les aspects particuliers de ce pays que l’on regrette. Si la nostalgie concerne des valeurs telles que l’ouverture et la tolérance, les futures protestations et les futurs actes seront guidés par des buts plus libéraux, même s’il est possible que les moyens mis en oeuvre pour y arriver, eux, ne le soient pas.
Si jusqu’à un certain point, on peut influencer et recréer nos désirs, on fait de la nostalgie une motivation envers un monde meilleur. Ce sont les libertés qui doivent nous manquer et pas les restrictions, la diversité et pas l’exclusion.
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