Le miracle d'Hudson : les 10 ans d'une histoire sur l'intuition et l'adresse
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
“Le capitaine vous parle, placez tout le monde en position d’impact.” C’est ainsi que Chesley B. Sullenberger (surnommé “Sully”) s’est adressé à ses 150 passagers avant de réaliser ce que l’on connaît sous le nom du “miracle d’Hudson”. Après avoir percuté un banc d’oiseaux et perdu le contrôle des moteurs, ce pilote expérimenté a ignoré les ordres donnés et suivi sa propre intuition. Il a ainsi amerri avec succès sur le fleuve Hudson.
Reste dans la mémoire collective cet incident qui s’est produit il y a maintenant 10 ans. Pour beaucoup, ça a été le débarquement le plus réussi de l’histoire de l’aviation. Pour d’autres, en revanche, il s’agit d’une imprudence. Même si certains pensent qu’il aurait été plus pertinent de revenir à l’aéroport et ne pas prendre le risque que cette prouesse ayant connu une fin heureuse ne devienne une tragédie new-yorkaise.
Or, c’est précisément là que, d’un point de vue psychologique, s’ouvre l’aspect le plus intéressant de cette histoire, de ce miracle d’Hudson. Des experts du champ du sixième sens, de l’intelligence et de l’intuition comme Malcolm Gladwell ont étudié ce cas pour nous prouver qu’en réalité, il ne s’agit pas d’un “miracle”.
Selon Gladwell, il faudrait plutôt parler de la prouesse d’un grand expert. L’équipage lui-même a décrit peu après l’évènement que le capitaine a agi à chaque instant avec une sérénité hors du commun. Malgré le fait que les moteurs de son Airbus 320 étaient hors service, il se comportait comme s’il avait un contrôle total de son avion. Et en fait, c’était bel et bien le cas.
Le miracle d’Hudson s’est produit en un peu plus de 3 minutes. Sur une si courte période, l’esprit de Sully a évalué la situation, analysé les options et mené à la décision qui était la plus idéale.
Depuis le poste de contrôle aérien de LaGuardia, on a pu assister à un fait terrifiant : en effet, les personnes qui s’y trouvaient ont vu passer l’Airbus à moins de 270m au-dessus du pont George Washington.
L’histoire du miracle d’Hudson
C’est le 15 janvier 2009 à 15h25 que tout a commencé. Nous sommes à l’aéroport LaGuardia, à New-York. Il faisait froid, le temps était dégagé et rien ne pouvait laisser penser que l’avion du vol 1549 d’US Airways aurait des difficultés à décoller.
Aux commandes, le capitaine Sullenberger, “Sully”, un ex-pilote de la United States Air Force de 57 ans. Il avait alors plus de 20 000 heures de vol à son actif, mais jamais il n’aurait pu imaginer qu’il aurait à vivre une telle expérience : deux minutes après le décollage, un banc d’oiseaux a heurté la cabine de l’Airbus.
Il s’agissait de bernaches du Canada. La cabine a été plongée dans l’obscurité et les passagers ont commencé à entendre le bruit de l’impact de coups très forts. En quelques secondes seulement, il est arrivé quelque chose d’inhabituel. Le fait que des oiseaux heurtent de temps en temps les avions est quelque chose de tristement fréquent. Pour autant, ce qui ne l’est pas, c’est que les moteurs en arrivent à se désactiver.
Et c’est exactement ce qui est arrivé.
Evaluer quelle est la meilleure option
Après l’impact, l’aéronef a commencé à descendre, atteignant alors une vitesse de 390 km/h à une altitude de 500 m. Les contrôleurs aériens de LaGuardia se concentrent alors sur le vol 1549 afin que l’avion revienne. Cependant, à la surprise de tous, le capitaine Sully avertit la tour de contrôle qu’il ne reviendra pas. Il désobéit alors aux autres.
Quelques secondes plus tard, on l’avertit que l’aéroport le plus proche est celui de Teterboro dans le comté de Bergen. Cependant, Sully et son copilote refusent également de s’y poser.
Nous ne pouvons pas le faire, nous ne rejoindrons aucun aéroport. Nous allons atterrir sur le fleuve Hudson.
Sully a évalué quelle était la meilleure option en un peu plus d’une minute. Sans moteurs, revenir à l’aéroport de LaGuardia aurait été beaucoup trop risqué. Atterrir à celui de Teterboro n’était pas non plus la stratégie la plus adaptée ; c’est un aéroport disposant de pistes très courtes, trop courtes pour un avion grand comme l’Aribus 320. La meilleure solution était donc pour lui le fleuve Hudson.
Dans toute l’histoire de l’aviation jusque 2009, seul un avion de grande taille avait réussi à y amerrir avec succès ; il s’agissait du Tupolev Tu-124 en 1963. Or, le capitaine Sully a réussi à le faire avec une adresse hors du commun, donnant ainsi lieu au miracle d’Hudson.
Le miracle d’Hudson, un exemple d’intuition, d’expérience et d’adresse
Herbert Simon, célèbre expert en sciences sociales, a signalé que les personnes expérimentées dans un domaine particulier développent un esprit hautement efficace et intuitif. Le capitaine Sully est sans aucun doute un bon exemple de cette théorie. Or, aussi curieux que cela puisse paraître, les mois ayant suivi cette expérience réussie ont représenté un véritable enfer pour la capitaine de l’Airbus 320.
De même que nous le montre Clint Eastwood dans son film Sully, les études réalisés sur cet évènement ont donné lieu à de sérieux doutes : s’agissait-il vraiment d’une manoeuvre judicieuse ? Finalement, après un processus rigoureux, il a été prouvé que le capitaine a fait usage de sa grande expérience pour exécuter la meilleure réponse qui soit, celle qui sauvé la vie de 150 passagers et de tout l’équipage.
Il ne s’agit pas d’un miracle, mais de la manoeuvre d’un expert
Effectivement, parler de miracle, c’est ôter tout le mérite du protagoniste. Ainsi, Malcolm Gladwell nous explique que ces personnes sont capables de réagir avec une grande efficacité lorsque cela est nécessaire. Elles font alors usage de diverses stratégies :
- Reconnaissance de schémas : même si elles ne vivent pas toujours les mêmes situations, elles savent reconnaître les stimuli similaires à ceux d’expériences précédents ainsi que faire usage de réponses qui, dans le passé, les ont aidées
- Ce sont des profils faisant montre d’une assurance personnelle élevée ainsi que d’un grand calme dans les moments difficiles
- Ces personnes appliquent l’intuition experte. Gary Klein, célèbre psychologue comportementalisme, a réalisé une étude intéressante pour démonter quelque chose de frappant. Il nous signale en effet que les esprits experts ne se demandent pas comment agir lorsqu’ils font face à une difficulté. Ainsi, ils ne doutent pas. Ils se contentent de comprendre la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils l’analysent et savent alors exactement quoi faire
Chesley B. Sullenberger, “Sully”, est un bel exemple de ce type de profil.
Pour conclure, cela va faire 10 ans que s’est produit le célèbre miracle d’Hudson. Le fait d’entretenir la mémoire de cette histoire nous montre l’existence de véritables héros. Mais aussi de personnes qui ont pleinement confiance en leur expérience, leur intuition et leur sixième sens pour mener à bien de vraies prouesses.
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- Sources of Power, How People Make Decisions, by Gary Klein. The MIT Press. 1999.
- Zaslow. Jeffrey (2009) My Search for What Really Matters, by Captain Chesley “Sully” Sullenberger Harper-Collins.
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