Biais de normalité : quand on ne voit pas les risques
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
L’une des distorsions psychologiques les plus courantes que les gens subissent est, sans aucun doute, le biais de normalité. Il fait référence à cet acte par lequel nous pensons que les choses que nous tenons aujourd’hui pour acquises ne changeront pas, que dans la vie il n’y a ni risque, ni danger, ni fatalité. Et, si cela existe, c’est quelque chose qui, en moyenne, affecte toujours les autres et presque jamais nous-mêmes.
Cette façon de sous-estimer l’adversité ou la catastrophe agit également comme un mécanisme de défense. Admettons-le, si nous avions toujours à l’esprit l’idée que quelque chose de grave allait nous arriver, nous ne quitterions sûrement jamais notre maison et dépenserions toutes nos économies pour construire un bunker. Cependant, il convient et il est même nécessaire de laisser une place à cette probabilité.
Il ne s’agit pas d’être obsédé, non. Il n’est pas non plus nécessaire de limiter complètement notre mode de vie afin d’éviter toutes sortes de risques. Vivre, après tout, c’est prendre des risques et accepter que, dans notre quotidien, il y ait des dangers. Cela a toujours été le cas ; depuis la nuit des temps et à chaque instant de notre évolution humaine, nous avons accepté l’adversité et l’avons affrontée. Sous-estimer complètement les menaces n’est donc guère plus qu’une folie.
Nous sommes conscients que les grandes catastrophes sont rares au cours de l’histoire, mais leur apparition ne doit pas être démentie en raison de la faible probabilité de leur survenance. Car, nous le savons bien : elles arrivent. Elles surgissent du jour au lendemain et changent nos vies. Vous devez le garder à l’esprit.
Le biais de normalité, en quoi consiste-t-il ?
Le biais de normalité se manifeste, en moyenne, de deux manières. La première est simple : vous supposez que l’adversité ne frappera jamais à votre porte. Ce comportement n’est pas exclusif aux enfants ou aux adolescents ; de plus, ce n’est pas parce que vous êtes jeune que vous supposez que les difficultés sont des choses étrangères ou typiques de la population adulte.
En fait, ce biais est typique à tout âge et il est courant pour beaucoup d’entre nous de l’appliquer en priorisant d’autres choses, en nous laissant porter par le quotidien, par nos obligations, par cette pression quotidienne à travers laquelle nous nous limitons à nous focaliser sur notre propre monde. À aucun moment nous ne prenons en compte que quelque chose de négatif peut arriver parce que notre esprit fait attention à d’autres choses.
Ce biais peut également apparaître d’une autre manière : en minimisant complètement les menaces même lorsqu’elles sont déjà présentes. Dans ce cas, on distingue déjà un cadre irrationnel ou une incapacité à agir de manière ajustée. Ce comportement se produit, par exemple, lorsque le risque est déjà réel, lorsque la catastrophe ou le danger est évident, mais que la personne évite complètement ou sous-estime cette menace.
Peu importe que le contexte qui entoure la personne montre déjà des signes de cette menace, de ce risque spécifique. Son esprit continue de supposer que tout ira bien et, sinon, que la probabilité que cette adversité l’affecte est très faible, voire négligeable.
Panique négative ou biais de normalité, quelque chose de très courant
Le biais de négativité reçoit également d’autres appellations : « panique négative » ou « effet autruche ». Ce que nous devons comprendre, c’est que, selon diverses études, telles que celles menées à l’Université de Tel Aviv en Israël, environ 70 % des personnes subissent ce biais.
Lorsque vous prenez votre voiture, la probabilité d’avoir un accident ne vous traverse pas toujours l’esprit. Lorsque l’on pénètre dans un bâtiment, il est très rare d’imaginer qu’il puisse s’effondrer. Tous sont des processus tout à fait normaux dans lesquels le biais de normalité nous permet, d’une certaine manière, de minimiser la peur afin de fonctionner normalement au quotidien.
Le problème, évidemment, survient lorsqu’au milieu d’une catastrophe naturelle, d’un conflit ou d’une pandémie, la personne se conçoit comme quelqu’un d’invulnérable et sans aucune responsabilité dans ce contexte. Le « rien ne m’arrivera » ou « c’est du battage médiatique et il n’y a aucun danger » est une approche mentale dangereuse et problématique.
La destruction de Pompéi, le volcan auquel personne n’accordait d’importance
L’éruption du Vésuve et la catastrophe survenue en l’an 79 dans la région de Campanie étaient la chronique d’une catastrophe annoncée. Dix-sept ans plus tôt, un tremblement de terre avait déjà détruit une partie de Naples et de Pompéi. Pline le Jeune a également écrit dans ses chroniques que les tremblements étaient courants dans ces terres. Peu importait qu’ils soient chaque jour plus fréquents.
Un exemple notable du biais de normalité a été vécu à Pompéi. Lorsque le Vésuve est entré en éruption, les Pompéiens ont passé des heures à regarder le spectacle. Ils tenaient pour acquis qu’il n’atteindrait pas leur belle ville, que le volcan, tout au plus, toucherait les villes environnantes, Herculanum, Stabia… Et, comme nous le savons bien, cette catastrophe a enseveli des milliers de personnes et toutes les villes dans son voisinage ont été recouvertes d’une épaisse couche de lave en fusion.
Des catastrophes arrivent. L’adversité fait partie intégrante de la vie. Il ne s’agit pas de se dire qu’elle sera toujours présente, de limiter complètement notre style de vie, de toujours craindre le pire… L’essentiel est d’assumer sa présence, savoir réagir de manière responsable et comprendre qu’il est possible d’être vigilant sans tomber dans l’obsession.
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- Drabek, Thomas E. (1986). Human system responses to disaster : an inventory of sociological findings. New York: Springer Verlag. p. 72.
- Omer, Haim; Alon, Nahman (April 1994). “The continuity principle: A unified approach to disaster and trauma”. American Journal of Community Psychology. 22 (2): 275–276. doi:10.1007/BF02506866.
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