Pourquoi tombons-nous dans la dépendance émotionnelle ?

Pourquoi tombons-nous dans la dépendance émotionnelle ?

Dernière mise à jour : 25 juin, 2017

Nous sommes tou-te-s dépendant-e-s. Nous le devenons à partir du moment où nos vies commencent. Nous le sommes dans le ventre de notre mère. Nous le sommes quand nous pleurons pour la première fois, quand nous faisons notre première chute ou quand nous partons explorer pour la première fois des mondes inconnus. Nous le sommes sur le plan pratique et sur le plan émotionnel. Nous avons besoin que les autres fassent des choses pour nous ou, tout du moins, qu’ils nous donnent quelques indications pour apprendre à les faire. Nous avons également besoin des autres parce que nous sommes des êtres sociaux et, surtout, émotionnels. Alors, sommes-nous nécessairement victimes de la dépendance émotionnelle ?

Il n’y a rien, à part un être humain, qui puisse provoquer un tel tourbillon d’émotions. Pensez au premier baiser, à des retrouvailles après des années de séparation, à une étreinte qui vous calme enfin. Vous respirez, je respire, nous respirons.

Une fois que nous avons passé l’adolescence, après avoir essayé de conquérir coûte que coûte notre indépendance, nous nous rendons normalement compte que celle-ci n’est qu’une utopie qui n’est pas nécessairement bonne car nos besoins primaires n’y répondent pas forcément. Songez à l’amour, à l’affection, aux rencontres et aux séparations.

La dépendance émotionnelle : un fait ou des chaînes

Mais alors, si la dépendance émotionnelle est naturelle, pourquoi, dans la psychologie, représente-t-elle un ogre qu’il faut bannir ? En partie parce que la psychologie ne cesse de s’abreuver des courants sociaux et que ceux-ci sont de plus en plus individualistes. En partie parce que cette dépendance devient négative quand elle se fixe sur une personne concrète qui n’est pas nous. Quand nous remettons à l’autre la responsabilité de faire face aux caprices et aux appétits de l’enfant ou du jeune que nous portons en nous et quand nous pensons que cet autre est indispensable.

Prenons un exemple simple. Ana fait quelques changements dans la décoration de sa maison et elle aimerait changer un meuble de place. Il est beaucoup trop lourd pour qu’elle le porte toute seule et a donc besoin que quelqu’un l’aide. Elle peut s’aider elle-même si elle se met à étudier la physique et la mécanique et construit une sorte de chariot qui l’aide à déplacer le meuble. Cependant, au bout d’un moment, cette solution ne lui sera pas très rentable.

Le plus rentable est que des personnes plus fortes qu’elle l’aident. Ana pense à ses enfants mais se rend vite compte qu’ils ne peuvent pas parce qu’ils sont en vacances. Elle demande donc de l’aide à ses neveux et ceux-ci sont ravis de lui rendre ce service. Bien, Ana est donc dépendante, mais pas dépendante de ses enfants. S’ils ne peuvent pas l’aider, elle est capable de demander de l’aide à d’autres personnes. La même chose se passe avec l’indépendance/la dépendance émotionnelle.

Celle-ci devient dangereuse quand elle est placée dans une seule personne et que cette personne a la charge et la responsabilité de notre état émotionnel. Elle est dangereuse parce qu’elle nous affaiblit et, à la longue, en termine avec la relation. Cependant, le pire réside dans le fait qu’avant la fin de cette relation, nous nous serons détruit-e-s nous-mêmes en utilisant tout un tas de moyens désespérés pour ne pas perdre cette personne chez qui nous avons placé notre bonheur.

Les quatre échelons de la dépendance émotionnelle

Le chemin de la destruction émotionnelle – par la dépendance émotionnelle – est constitué de quatre échelons évidents que nous commençons à descendre quand nous avons peur de perdre quelqu’un. Une peur qui est très souvent infondée et qui contribue précisément à rendre cette dépendance plus forte.


“Si je n’ai pas réussi à me sentir aimé-e et indispensable, si tu as refusé de me plaindre et de t’occuper de moi par pitié, si je n’ai même pas réussi à faire en sorte que tu me détestes, alors tu vas devoir remarquer ma présence, que tu le veuilles ou non, parce qu’à partir de maintenant je vais tout faire pour que tu me craignes.”


Le premier échelon consiste, pour la personne dépendante, à essayer de devenir indispensable pour la personne dont elle dépend. À lui montrer tout ce qu’elle lui apporte dans sa vie, à augmenter ces apports et à les souligner : “si ce n’était pas toi…”, “qui aurait fait ça pour toi…”, “tu peux aller chercher ailleurs mais tu ne trouveras personne qui te le fera aussi bien que moi…”.

La personne dépendante peut aussi essayer de se transformer en garantie, en sorte d’assurance : “si tu restes avec moi, tu n’auras jamais besoin de cela”. Elle cherchera à ce que l’autre reste en sa présence.

Nous passons à l’échelon suivant quand le premier ne nous sert plus. Cependant, ce second échelon peut être combiné au précédent. La personne dépendante y joue le rôle de victime et essaye de provoquer de la pitié. Dans sa vie, les soucis quotidiens se transforment en authentiques tragédies qui feraient passer l’autre pour quelqu’un d’inhumain s’il voulait s’éloigner… précisément au cours de ces moments. En outre, il s’agit normalement d’une stratégie que la personne dépendante connaît très bien car elle l’a probablement déjà utilisée pour réclamer de l’attention.

Les troisièmes et quatrièmes échelons sont paradigmatiques et, à travers eux, la personne dépendante cherche à se protéger de ce qu’elle craint le plus, l’indifférence. Ces deux échelons sont interchangeables et ne sont pas franchis dans un ordre précis. Ils peuvent être passés en même temps.

Les deux font également référence à des émotions primaires : l’un à la haine, l’autre à la peur. Face à la peur de l’indifférence, la personne dépendante peut essayer de chercher la haine de l’autre. Il s’agit d’une forme d’auto-tromperie par laquelle la personne cherche à créer des sentiments qui se maintiennent, des liens, une présence dans la vie de l’autre… même si c’est en insufflant de la haine.

Le quatrième échelon est celui de la menace. “Si tu as l’intention de partir, je suis capable de tout”, “si tu disparais, je n’ai plus aucune raison de vivre”, “si tu décides de partir, je t’assure que tu ne me reverras plus jamais”, “ça ne servira à rien de pleurer quand tu te rendras compte que je ne suis plus là”. La personne dépendante essaye de transmettre sa peur de la perte à l’autre. Cette crainte est une tromperie mais, pour la personne dépendante, elle peut parfaitement fonctionner en tant que substitut à l’amour.

La personne dépendante fait souffrir… et souffre

D’une manière ou d’une autre, pour la personne dépendante, sa propre dépendance constitue une véritable torture. Si elle est victime de quelque chose, c’est bien d’avoir confié son destin et ses espoirs à quelqu’un. Cela l’oblige à s’immoler pour que ce quelqu’un ne s’en aille pas car elle a vraiment l’impression que, s’il s’en va, c’en sera fini avec la vie. Beaucoup de ses phrases constituent une véritable manipulation mais une véritable souffrance se cache derrière elles.

Malheureusement, la dépendance émotionnelle est difficile à admettre. On lui colle des étiquettes comme “peu de valeur”, “faiblesse de caractère” et même “incapacité intellectuelle”. Cependant, identifier cette dépendance est le premier pas pour la réédifier et comprendre que, même si nos besoins sont uniques, les personnes qui peuvent les satisfaire sont multiples et peuvent le faire de différentes manières.


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