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Lien par trauma : tu me fais du mal mais j'ai besoin de toi

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Le lien par trauma se nourrit d'un attachement malsain envers la figure d'un maltraitant narcissique. La victime, au lieu de fuir cette relation, la rétro-alimente. Cette réalité ressemble fortement à celle du syndrome de Stockholm.
Lien par trauma : tu me fais du mal mais j'ai besoin de toi
Valeria Sabater

Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater

Écrit par Valeria Sabater
Dernière mise à jour : 15 novembre, 2021

Les relations affectives aux allures de prison au sein desquelles l’amour fait mal et annihile tout bonheur et estime de soi sont nombreuses. En dépit de cette situation, la victime est incapable de rompre ce lien parce que l’affection et l’attraction rendent aveugles, au point de minimiser les dommages. Le lien par trauma ressemble beaucoup au syndrome de Stockholm.

Il est possible que, de l’extérieur, ce type de situation nous paraisse étrange et contradictoire. Pourquoi quelqu’un tolère-t-il l’intolérable ? Pourquoi rester avec quelqu’un qui humilie, qui maltraite et qui abuse émotionnellement de l’autre ? Dans le domaine des relations humaines, il est parfois nécessaire de devoir comprendre des processus psychologiques enfouis.

Dans un premier temps, il ne servira à rien de dire à quelqu’un qui se trouve dans cette situation de s’éloigner le plus vite possible de la personne. La codépendance peut être si intense que l’esprit cesse de fonctionner de façon rationnelle.

En effet, ce sont les émotions et l’attachement malsain qui contrôlent complètement ce lien. C’est un lien qui corrompt, mais qui continue d’alimenter des besoins aussi basiques que la peur de l’abandon.

Un lien par trauma a pour protagonistes une victime et un bourreau émotionnel ; c’est un lien dans lequel une personne veut qu’on prenne soin d’elle et l’autre cherche à afficher son pouvoir.

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Qu’est-ce que le lien par trauma ?

L’idée de lien par trauma a commencé à être étudiée pour la première fois dans les années 80. Ce sont les psychologues Donald G. Dutton et Susan L. Painter qui ont analysé les cas de centaines de femmes maltraitées qui vivaient avec leur conjoint.

La première chose qu’ils ont découverte est que, parfois, la peur n’est pas ce mécanisme qui, dans des situations normales, favoriserait la fuite ou l’affrontement de ce qui nous fait du mal. Ce que l’on voit, dans ce type de liens, est une soumission et une nette différence de pouvoir. L’un soumet l’autre.

Les victimes ont un attachement malsain, face auquel elles ne réagissent pas. Quelle est la raison de cette permissivité et de cette tolérance à la souffrance ? En réalité, ces relations suivent le schéma circulaire suivant : le bourreau offre de l’affection, puis maltraite la victime, la victime se fâche, puis le pardonne et ainsi de suite.

Le lien par trauma est le ciment qui unit la victime à son bourreau et qui nourrit ce cercle de souffrances.

Le problème de l’attachement et la personnalité narcissique

Donald Dutton et Susan Painter ont réalisé une étude dans les années 90 pour comprendre un peu mieux ce type de relations. Ils ont pu démontrer que beaucoup de ces femmes qui essayaient de quitter leur conjoint violent n’y arrivaient pas parce que leur attachement émotionnel était très intense.

À cela s’ajoutaient une faible estime de soi de la victime et la personnalité dominatrice du bourreau. Une bonne partie du lien par trauma s’établit avec un profil narcissique. Comme nous le savons bien, ces figures sont habiles pour manipuler, contrôler et drainer leurs victimes de toute résistance psychologique et émotionnelle.

Un cycle d’abus, d’addiction et d’affection qui détruit

Dans le schéma émotionnel, cognitif et comportemental de la personne qui affiche un lien par trauma, on peut rajouter un facteur indéniable : l’addiction à cet amour malsain. C’est un type d’attachement qui tolère tout. La codépendance est basée sur une faible estime de soi, une idéalisation de l’autre, une peur de la solitude et un autosacrifice.

Pour que le lien par trauma se maintienne, comme nous l’avons signalé précédemment, un cycle d’abus très particulier a souvent lieu. Il suit les règles suivantes :

  • La relation accumule des tensions (disputes, maltraitances, humiliations, offenses…).
  • La victime finit par réagir face à un incident plus grave.
  • La personne qui abuse d’elle agit rapidement en changeant son comportement, en faisant preuve d’affection, en disant qu’il regrette et en affichant sa volonté expresse de changement.
  • La réconciliation a lieu et, en général, elle est intense et gratifiante. S’ensuit alors une brève période d’apparente harmonie.
  • Les abus et la maltraitance réapparaissent et le cycle recommence.

L’une des principales caractéristiques du lien par trauma est que, quand la victime est blessée par son partenaire agressif, elle espère recevoir une consolation et le pardon de ce dernier. Ce besoin malsain rétro-alimente le lien traumatique.

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Lien par trauma : comment agir dans une telle situation ?

Il y a une chose importante que nous devons comprendre sur le lien traumatique : il se nourrit du pouvoir déséquilibré qui se traduit par des périodes de punition alternant avec des moments de récompense (comme les réconciliations). Il est décisif que la personne soit capable de rompre ce schéma.

Or, cela peut être compliqué car, souvent, les victimes sont complètement isolées. Les narcissiques ont tendance à séparer leurs victimes de leur famille et de leurs amis : il leur est donc difficile de se détacher complètement de ce qui leur fait du mal.

Le soutien social est indispensable dans ces cas.L’entourage, les collègues de travail, les voisins et les services sociaux doivent être ces figures attentives et sensibles à ces réalités.

Les clés pour laisser un lien traumatique derrière soi

Pour affronter et laisser ce lien traumatique, certaines stratégies s’avèrent efficaces. En voici quelques-unes : l

  • Séparation de la victime et de l’agresseur.
  • La victime doit reconnaître et prendre conscience de l’abus émotionnel, de la maltraitance, de la codépendance et de cet attachement malsain qui débouche sur un lien nocif.
  • Développement d’un réseau de soutien. La personne doit pouvoir compter sur des figures à qui elle peut parler, avec qui elle peut partager, se sentir comprise et aidée. Cette proximité avec d’autres figures que l’agresseur lui permettra de voir sa réalité d’une autre façon afin de se sentir plus forte et de tracer de nouveaux objectifs.
  • La thérapie psychologique est, dans ces cas, indispensable pour traiter la blessure du trauma et reconstruire l’identité et l’estime de soi. Elle est aussi nécessaire pour fournir des stratégies à la personne afin qu’elle ne retombe pas dans des relations d’abus émotionnel.

Pour conclure, bien souvent, le fait qu’une personne ait une plus grande tendance à développer ce type de liens affectifs vient de son enfance et du type d’éducation qu’elle a reçue.  Le travail psychologique doit alors être plus profond et délicat pour soigner les marques d’un trauma qui persiste et qui se manifeste constamment dans chaque lien. C’est, sans aucun doute, une réalité très complexe.


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  • Dutton DG, Painter S (1993). “Emotional attachments in abusive relationships: a test of traumatic bonding theory”. Violence and Victims. 8 (2): 105–20. doi:10.1891/0886-6708.8.2.105.
  • Dutton; Painter (1981). “Traumatic Bonding: The development of emotional attachments in battered women and other relationships of intermittent abuse”. Victimology: An International Journal (7).
  • Chrissie Sanderson. Counselling Survivors of Domestic Abuse. Jessica Kingsley Publishers; 15 June 2008
  • Schwartz J (2015). “The Unacknowledged History of John Bowlby’s Attachment Theory: John Bowlby’s Attachment Theory”. British Journal of Psychotherapy. 31 (2): 251–266.

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