Le syndrome de la main étrangère
Rédigé et vérifié par le psychologue Sergio De Dios González
Le syndrome de la main étrangère (SMA) est un trouble neurologique peu fréquent mais important si nous prenons en compte le degré d’incapacité qu’il peut produire chez la personne affectée et son entourage.
L’expérience corporelle (dans son sens global) est un processus complexe. Elle requiert l’intégration de multiples signaux sensoriels. Lorsqu’un problème a lieu dans cette intégration, des troubles neurologiques divers peuvent avoir lieu, comme la sensibilisation de membres amputés ou la duplication de certaines parties du corps.
Histoire du syndrome de la main étrangère
En 1908, Goldstein a décrit le cas d’une patiente qui a souffert d’un infarctus dans l’hémisphère droit. Après cet accident cardiovasculaire, cette femme a ressenti une faiblesse dans la jambe gauche et un étrange trouble moteur dans son bras gauche. Elle avait la sensation que sa main gauche ne lui appartenait pas.
Après cela, Akelaitis (1944) a décrit le cas de deux patients à qui l’on avait sectionné le corps calleux pour contrôler leur épilepsie. L’un d’eux a alors signalé que sa main gauche réalisait des mouvements involontaires opposés à ceux que sa main droite voulait faire. L’auteur a donné le nom de dyspraxie à ce phénomène.
Ce sont Brion et Jedynak (1972) qui lui ont ensuite donné le nom de syndrome de la main étrangère. Les auteurs ont interprété le comportement erratique de la main gauche des patients comme un signe pathognomonique de lésion calleuse. Ils ont analysé le comportement de quatre patients qui présentaient une grande variété de signes de déconnexion inter-hémisphérique. Leurs déficits incluaient:
- Difficulté à nommer des objets hors du champ de vision de la main gauche
- Difficulté à exécuter des mouvements avec la main gauche après des ordres verbaux
- Apraxie constructive
- Agraphie avec la main gauche
- Héminégligence attentionnelle
- Difficulté à transférer des informations somato-sensorielles d’une main à une autre
Après ces recherches, on a pu démontrer que l’apparition de la symptomatologie du SMA pouvait accompagner divers syndromes nosologiques.
Définition du syndrome
Avec le syndrome de la main étrangère, le patient sent que sa main agit de façon autonome. Il développe donc des mouvements involontaires qui semblent être intentionnels. Ces mouvements entrent fréquemment en conflit ou rivalisent avec le membre opposé.
Les personnes affectées par ce syndrome ont tendance à avoir la sensation que leur main est dissociée de leur être physique. D’une certaine façon, c’est comme si elle ne leur appartenait pas. Qui plus est, dans de nombreux cas, ils craignent ses mouvements et essayent d’être constamment attentifs pour les empêcher.
Occasionnellement, les personnes touchées par ce syndrome peuvent se contrôler de façon intermittente et volontaire. L’auteur Biran et ses collaborateurs (2006) ont affirmé qu’il existe trois éléments dans le SMA:
- Le membre est désinhibé et a tendance à être dirigé par des stimulus environnementaux rationnels, ce qui mène à des comportements d’utilisation.
- Le séquençage des fragments moteurs dans le membre incontrôlé dote son mouvement d’une fausse apparence de contrôle.
- Il existe une conscience claire du comportement du membre étranger.
Ainsi, dans des situations de stress, de fatigue ou d’anxiété, les mouvements du SMA peuvent s’intensifier.
Actuellement, on considère que le syndrome de la main étrangère se base sur deux hypothèses fondamentales :
- Les symptômes éclatent à cause d’objets proches
- Le comportement s’intensifie lorsque l’on est moins attentif
Quelles sont ses causes ?
Les causes du syndrome de la main étrangère sont chirurgicales. Il s’agit de :
- Callosotomies pour les épilepsies résistantes (elles ne se pratiquent plus)
- Extirpation de tumeurs
Deux sous-genres du syndrome de la main étrangère
SMA frontal
Le syndrome frontal de la main étrangère résulte des dommages dans diverses aires cérébrales :
- Aire motrice supplémentaire
- Gyrus cingulaire
- Cortex préfrontal
- Partie antérieure du corps calleux de l’hémisphère dominant
Avec les lésions fronto-médiales, l’altération se produit dans la main contraire à l’hémisphère endommagé. Par ailleurs, des reflets primaires émergent.
SMA calleux
- Il se manifeste dans la même main que l’hémisphère dominant
- Dans ce sous-genre, on décrit des patients qui souffrent de lésions impliquant le corps calleux
- Ainsi, il peut y avoir ou non des associations de lésions frontales de l’hémisphère non dominant, surtout dans l’aire motrice supplémentaire
- Un affrontement entre les deux mains et une apraxie se produisent
Au cours de la dernière décennie du XXème siècle, divers auteurs ont opté pour une nouvelle forme sous-syndromique du SMA. Dans ce cas, elle se présente comme un autre sous-genre du nom de SMA postérieur. Ce sous-genre est moins fréquent que les précédents et est associé à des comportements autonomes ainsi qu’à la personnification de l’extrémité affectée. Par ailleurs, étant donné que le syndrome n’est pas suffisamment étudié, il est compliqué d’établir des sous-genres clairs.
Traitement
Le traitement de ce syndrome consiste en certaines techniques comme :
- L’augmentation de la perception et du contrôle
- L’affrontement du stress
- Des stratégies compensatoires
Références cinématographiques
En 1964, Stanley Kubrick a réalisé un film intitulé Docteur Folamour ou : comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer la bombe (Dr. Strangelove or: How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb), basé sur le roman Red alert de Peter George. Le roman relate la tentative d’un général dément d’initier une guerre atomique.
Dans le film, le docteur Folamour est décrit comme un personnage extravagant qui réalise des mouvements anormaux et étranges. La main droite du docteur semble avoir une vie différente et ses mouvements inopportuns et involontaires sont notoires dans le film. Qui plus est, nous voyons la façon dont il essaye de contrôler ces mouvements avec son autre main. Cette oeuvre souligne très justement les difficultés que rencontrent les patients touchés par le SMA.
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