Le laxisme, ou le mépris de la dignité

Le laxisme, ou le mépris de la dignité
Gema Sánchez Cuevas

Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas.

Dernière mise à jour : 20 septembre, 2017

Nous sommes aujourd’hui passé-e-s du fait de briser les barrières de la difficulté à une démocratisation du laxisme. L’être humain a eu besoin, a besoin, de rendre certaines tâches plus faciles pour parvenir à réaliser certains de ses objectifs et de ses projets. La roue, par exemple, a permis le déplacement de poids importants d’un endroit à un autre. Une grande partie de l’histoire humaine est celle de la lutte pour faciliter les processus. Le point négatif est que cela a fini par générer une armée de facilitateurs.

Tout d’abord, la révolution industrielle puis ensuite la révolution informatique. Ces deux phénomènes ont rendu la vie quotidienne beaucoup plus rapide pour l’être humain. En d’autres termes, ils ont réussi à minimiser les efforts nécessaires pour effectuer de nombreuses activités quotidiennes qui nécessitaient auparavant plus d’énergie et plus de temps. Par exemple, s’informer. Le bouche à oreille a été remplacé par la grande presse, puis par l’information en temps réel via Internet.

Il vaudrait la peine de se demander si tout cela a rendu la vie plus facile. Il est peut-être plus exact de dire qu’elle est aujourd’hui plus rapide et nécessite moins de dépense d’énergie physique. Or, l’existence a été compliquée à l’extrême de sorte que les maladies mentales sont celles dont l’incidence augmente le plus. Dans le même temps, le laxisme s’est installé comme moyen de faire face à une complexité.

De la facilité au laxisme

L’objectif de l’industrialisation et de l’informatisation n’était pas exactement de rendre la vie humaine plus facile. Le but ultime est de rendre la production plus rapide et plus simple. De cette façon, elles ont en outre fini par simplifier de nombreuses tâches de la vie quotidienne, mais leur essence-même ne correspond pas à celle-ci. Une grande partie des avancées s’explique plus par la notion d’argent que par la notion de bien-être.
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Quoi qu’il en soit, la vérité, c’est que ce principe selon lequel tout fonctionne facilement a été assimilé par notre conscience de différentes manières. Le pire d’entre elles est de nous faire croire que la facilité et la rapidité sont des attributs désirables. A l’inverse, que la complexité et la lenteur sont des défauts. Cette manière de penser est le substrat du laxisme.

Dans leur expression la plus positive et bénéfique, la science et la technologie ont voulu nous libérer des tâches mécaniques et de celles exigeant la force brute. Nous supposions qu’en accélérant certaines tâches, comme laver rapidement des vêtements ou transporter plus facilement des objets lourds, nous disposerions de plus de temps à consacrer à des tâches plus louables, favorisant notre épanouissement. Mais cela n’a pas été le cas, ou seulement en partie et pour quelques-un-e-s d’entre nous. Ce qui en revanche s’est propagé est une attitude de mépris envers l’effort.


Le laxisme et la dignité

Nous avons construit un idéal erroné : éliminer les problèmes. L’idée selon laquelle nous ne pouvons rien en retirer de positif s’est démocratisée. Pire encore, certain-e-s croient fermement qu’il existe un modèle de vie sans difficultés, un monde dépourvu d’obstacles.

Ces personnes y croient tellement qu’elles finissent par se frustrer de ne pas y parvenir. Le grand paradoxe résulte du fait que nous n’avions jamais eu la sensation de devoir affronter autant de problèmes.  Presque tout est devenu une difficulté. Manger beaucoup ou un peu. Avoir du travail ou ne pas en avoir. Former ou non un couple. Et un très long etcétera.

aliénation et laxisme

Au regard de la psychologie, le laxisme peut présenter deux visages. D’un côté, il correspondra à la réponse défensive à ce qui apparaît comme un cumul de difficultés ne pouvant être résolues. D’autre part, cela pourrait aussi être assimilé à une attitude infantile dans laquelle l’individu souhaite se maintenir dans la mesure où elle ne nécessite pas d’engagements, d’efforts ou de responsabilités, comme lorsqu’il était bébé. Ce que ce types de comportements n’admet pas, c’est le fait que la réalité et la difficulté vont de pair. Par ailleurs, ils ne comprennent pas que c’est précisément l’existence de difficultés qui permet à une personne, à l’humanité elle-même, de chercher, de trouver et d’évoluer. Même l’invention du feu résulte d’une initiative visant à résoudre un problème. En le résolvant, ils jetèrent les bases nécessaires au passage définitif vers l’homo sapiens.

Cela nous empêche également de profiter de l’une des plénitudes de l’existence : se sentir digne de ce que nous sommes, de ce que nous avons et de ce que nous sommes capable de faire. Il existe évidemment certaines difficultés impossibles à résoudre, comme la faim dans le monde. Mais il en existe aussi beaucoup d’autres qui peuvent l’être. Ce qui manque c’est la confiance en soi. L’amour propre. Ou les deux.


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