L'art sain et désintéressé de penser à soi avant de penser aux autres
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Penser à soi est une pratique saine, utile et nécessaire. Mener à bien un tel artisanat n’est pas un acte d’égoïsme, car aimer cette personne dont on voit le reflet dans le miroir sans excuses, fissures ou délais, cela en revient à prendre soin de soi : investir dans le bien-être personnel et la qualité de vie. Plus encore, quiconque s’occupe de soi comme il le mérite peut aussi offrir le meilleur de lui-même aux autres.
Par exemple, il résulte curieux de savoir que Socrate lui-même a centré une part de ses enseignements sur le concept de l’attention que l’on se porte à soi, ou sur ce qui était défini à ce moment-là comme “epimeleia heautou”. Plus tard, Michel Foucault reprendra cette idée pour la morceler un peu plus et conclure la chose suivante : ce n’est que lorsqu’une personne parvient à se connaître vraiment en s’occupant d’elle-même et en s’accordant de la valeur qu’elle peut atteindre la véritable liberté.
“Si tu n’as pas d’amour propre, à quel amour peux-tu donc aspirer ?”
-Walter Riso-
La vérité, c’est que nous ne savons pas à quel point ni pour quelle raison on a inculqué à la plupart d’entre nous le fait de mettre en pratique une stratégie similaire qui était un peu plus qu’un acte intéressé et égoïste. Les termes ont été confondus, jusqu’au point de nous faire croire que l’altruisme et le respect de l’autre ne s’harmonisent pas du tout avec l’attention portée sur soi ou avec le pouvoir de penser à nous-même comme nous le méritons. Et c’est totalement faux.
Ainsi, et presque sans nous en rendre compte, nous avons construit des relations où réside ce sacrifice dévoué nous menant à penser que plus on offre aux autres, plus iels nous aimeront et plus iels auront d’estime pour nous. Des liens où ce que l’on fait en réalité, c’est abandonner notre amour propre dans un fossé sans regarder derrière nous et en nous disant que l’on fait ce qu’il faut, que c’est ce que tout le monde attend de nous.
Evitons cette pratique malsaine qui en essence est le déclencheur de bien des problèmes, des frustrations, des anxiétés, des nuits d’insomnie voire même des douleurs physiques.
Celleux qui cessent de penser à elleux-mêmes s’épuisent
Quand on cesse de penser à soi pour remplir son agenda, son esprit et ses volontés avec des phrases telles que “je dois faire ceci et cela”, “on attend de moi que j’aille plus loin” ou “je dois faire cela pour cette personne”, ce qu’on fait en réalité, c’est se drainer. On se vide de notre énergie, de notre identité, de nos désirs et surtout de notre estime de nous-même. Le plus complexe dans tout cela, c’est que parfois, on mène à bien ces actes sans même y penser, sans se demander l’espace d’un instant si on veut vraiment faire cette faveur, cet acte, cette action.
Les psychologues nous expliquent que l’on tombe dans l’automatisme du “faire, faire, faire” en rationalisant ces actes comme quelque chose de naturel et de nécessaire. Car si nous sommes utiles aux autres, nous serons précieux-ses, et si nos êtres chers ont besoin de nous, alors nous serons aimé-e-s. Cependant, cette règle de trois ne donne pas toujours le résultat escompté ; pas toujours, voire même très rarement.
Ce qui arrive dans ces cas-là, c’est quelque chose d’aussi triste que dévastateur. En percevant que nos efforts et nos sacrifices perpétuels ne sont pas valorisés, nous développons une vision très critique de nous-mêmes, nous nous culpabilisons d’avoir été si naïf-ve-s, si dévoué-e-s, si confiant-e-s. Cette voix intérieure peut parfois être très cruelle et quand cela arrive, ne tarde alors pas à apparaître la somatisation, qui se traduit par cette douleur musculaire, cette fatigue qui nous paralyse, ces problèmes digestifs, ces infections, ces maux de tête, cette chute de cheveux préoccupante…
S’abandonner à la satisfaction exclusive des besoins des autres nous trouble en tant que personnes, nous efface et nous draine jusqu’à nous laisser vides de toute motivation, de tout espoir et de toute identité. Quand cela arrive, la première chose que l’on expérimente, c’est une profonde fatigue physique ainsi qu’une brume mentale dense…
Apprendre à s’occuper de soi
Il y a beaucoup de personnes comme ça, incrustées dans les itinéraires des autres, comme des locomotives qui transitent sur les rails d’autres territoires, d’autres mondes étrangers au leur. Elles portent des charges qui ne leur appartiennent pas et ne disposent pas d’un seul jour de vacances ; un jour pour être elles-mêmes et prendre soin d’elles, pour satisfaire exclusivement leurs propres désirs. Maintenir cette situation pendant longtemps met en péril notre équilibre et notre santé, et c’est pour cela que nous vous recommandons un changement d’approche pour remédier à cette inertie.
4 étapes pour apprendre à penser à soi avant de penser aux autres
- Le temps : les personnes qui ont cessé de penser à elles ont fait un automatisme du mot “oui”. Face à n’importe quelle demande, le mot magique est énoncé comme une ressource impossible à contrôler. Il est nécessaire de mettre un frein à cette impulsion : c’est pourquoi lorsque quelqu’un nous demande, nous suggère ou nous ordonne quelque chose, il est préférable, avant toute chose, de garder le silence. Ainsi, on évitera de donner une réponse immédiate et on prendra le temps de réfléchir quelques minutes et de valoriser avec sincérité si on veut ou non faire ce qu’on nous demande. Apprenons à dire “NON”.
- La perspective : pour apprendre à prendre soin de nous, à nous occuper de nous, il est nécessaire de gérer la distance – en l’amplifiant ou la réduisant – avec tout ce qui nous entoure. Arrive un moment où la personne fait tellement un automatisme du besoin de “faire, faire, faire” qu’elle en perd toute perspective. En ce sens, dire “je ne veux pas, je ne peux pas, aujourd’hui je pense à moi avant tout”, ce n’est pas la fin du monde.
- Les phrases auxiliaires : il n’est jamais de trop que d’avoir une petite collection de phrases qui peuvent nous aider à certains moments à protéger nos besoins propres, notre identité ou notre temps personnel. “Je suis désolé-e, mais ce que tu me demandes là ne me convient pas”, “Je te remercie d’avoir pensé à moi, mais je préfère prendre du temps pour moi”, “Je n’ai pas envie de faire ce que tu me demandes, j’ai besoin de me retrouver seul-e avec moi-même”.
- Le fait de mettre fin à certaines conversations : nous savons tou-te-s comment commencent
- ces conversations qui, au bout du compte, finissent par une demande. Ces conversations qui culminent avec la proposition et où souvent, on expose ce que l’on va accomplir. Puisque nous sommes déjà plus qu’entraîné-e-s à ces stratégies, apprenons alors à les arrêter au plus tôt. Ainsi, nous éviterons de nous épuiser et nous pratiquerons l’assertivité.
Pour conclure, ces 4 étapes ne s’apprennent pas du jour au lendemain. Si on y met de la volonté et qu’on prend la ferme décision de prendre davantage soin de nous et de comprendre que penser à soi avant tout est en réalité un acte désintéressé, nécessaire et vital, jour après jour nous serons plus efficaces dans ces stratégies : en maintenant notre attention sur l’autre, mais aussi sur nous.
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