Vous donnez tout et on vous en demande encore plus : le handicap d'être le-a meilleur-e

Vous donnez tout et on vous en demande encore plus : le handicap d'être le-a meilleur-e

Dernière mise à jour : 12 mars, 2017

Être le-a meilleur-e dans un domaine n’est pas toujours aussi positif qu’on le pense. Quiconque se fait remarquer quelque part peut finir par être l’objet d’un rejet, de moqueries et même d’abus de la part des autres. Nous connaissons tou-te-s le cas des enfants qui sont d’excellent-e-s élèves à l’école et qui, au lieu d’être admiré-e-s pour cela, finissent par être victimes d’abus de la part des autres enfants.

En ce sens, nous avons tou-te-s déjà vu que quelqu’un qui réussit quelque chose n’est pas toujours épaulé par celleux qui l’entourent. Parfois, cette personne rend les gens envieux, et cela s’exprime par des critiques ou une minimisation de ce qu’elle fait.


« Ne vous embêtez pas à être meilleur que vos contemporains ou vos prédécesseurs, essayez d’être meilleur que vous-même »

–William Faulkner–


L’éventail de grands hommes et femmes qui ont été les meilleur-e-s dans leur domaine à un certain moment est très large, mais il faut se dire qu’iels ont en même temps dû lutter entre la solitude et le rejet des autres. Pourquoi cela se produit-il ? Peut-on y faire quelque chose pour que ce soit différent ?

Quand être le-a meilleur-e implique des obligations gratuites

Adriana travaillait dans l’un des centres éducatifs d’un grand programme pour enfants abandonné-e-s. Son travail était remarquable et, pour cette raison, elle reçut à la fin de la première année une nouvelle déconcertante : on lui attribuerait à elle seule 30 enfants en plus pour qu’elle s’occupe d’elleux. « Vous êtes la meilleure et nous sommes donc convaincu-e-s que vous vous en sortirez remarquablement ». Mais elle ne serait pas plus payée et ne recevrait pas d’encouragements. Comme récompense, elle avait été punie.

Cela se passe également dans les foyers. Si l’aîné-e est plus habile en dessin, il est probable que ses parents lui demandent d’aider ses frères et sœurs avec les leurs. La même chose peut se produire avec les langues étrangères, les mathématiques ou la grammaire. Si le-a petit-e dernier-ère est plus responsable, iel passera le reste de sa vie à assumer les devoirs qui demandent une plus grande responsabilité.

Nous le voyons fréquemment chez les mères. Elles travaillent en-dehors du foyer, à l’intérieur du foyer, font en sorte que tout soit prêt quand c’est nécessaire et, si elles oublient un jour quelque chose, les réclamations commencent à fuser. Les personnes tiennent pour acquis que la mère doit tout faire parfaitement, en temps et en heure. Son dévouement et son acharnement ont, pour “récompense“, plus d’exigences.

Le rejet parce qu’on est le-a meilleur-e

Dans le domaine des études, il y a également de curieuses manières de traiter le-a meilleur-e. On lui dit que c’est un-e “intello” et cela est pris pour une déficience au lieu d’être considéré comme une vertu. Si le-a premier-ère de la classe n’aide pas tou-te-s ses camarades, celleux-ci le-a rejetteront. S’iel les aide, iel deviendra l’idiot-e utile des autres. Peu importe le point de vue que l’on adopte : c’est comme si être le-a meilleur-e n’avait pas de porte de sortie.

Dans le domaine professionnel, les choses ne sont pas différentes. Celui/Celle qui en sait le plus, ou qui en fait le plus, doit toujours être là, prêt-e à collaborer avec les autres. S’iel ne les aide pas, iel sera vu comme une personne antipathique et pourra finir par être victime de discriminations ou par être isolé-e.

Cela n’arrive pas seulement avec les plus intelligent-e-s ou les plus habiles. Les plus responsables finissent aussi par faire le travail qui doit être effectué par un groupe ou une équipe. Les plus compréhensif-ve-s finissent par essayer d’arrêter tous les conflits ou deviennent le mouchoir pour sécher les larmes des autres. Les plus courageux-ses doivent effectuer les tâches qui nécessitent le plus de courage, comme s’iels étaient immunisé-e-s. Et si l’un-e d’entre elleux ne fait pas ce qu’on lui demande, on le-a traitera d’égoïste.

Y a-t-il une porte de sortie ?

Être le-a meilleur-e dans quelque chose est également, sans aucun doute, un handicap. Si le fait de compter sur des aptitudes, des compétences et des connaissances supérieures à la moyenne des gens faisant partie de son entourage entraîne bien des responsabilités, il est certain que beaucoup en profitent pour donner des charges supplémentaires à celleux qui en savent plus, peuvent faire plus de choses ou en veulent davantage.

En fait, certaines des personnes qui essayent sans cesse de tout faire brillamment, qui ne tournent pas le dos au défi de réaliser une tâche et de la réaliser du mieux possible , finissent par se sentir coupables si elles ne répondent pas aux exigences des autres. Elles apprennent à accepter l’idée folle selon laquelle elles devraient combler les carences et les limitations des autres. Elles finissent donc par se surcharger de responsabilités et par développer un niveau d’auto-exigences qui peut être très destructeur.

La sortie consiste à apprendre à fixer des limites. Chaque don que l’on reçoit dans la vie est fait pour être partagé, mais chacun de nous a la responsabilité de compenser d’une manière ou d’une autre les faveurs qu’on nous fait ou les aides que nous recevons. Que le fait d’être meilleur-e dans un domaine n’entraîne pas seulement davantage d’obligations et de responsabilités ; qu’il soit aussi compensé par de la gratitude et de la considération.

 

Images de SurrealismBlack, Al Stephert


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