Exprimer ses émotions négatives de façon intelligente signifie gagner en santé
Rédigé et vérifié par Psychologue Valeria Sabater
Exprimer des émotions négatives quand nous les ressentons ne signifie pas perdre la raison. Car se fâcher, dire “ça suffit, je n’en peux plus”, réagir face à quelqu’un qui veut nous voir soumis, prévisibles et silencieux est une réaction saine, voire même nécessaire. Notre tempérament, en fin de compte, a parfaitement le droit de déborder de temps en temps pour nous permettre de nous exprimer et de canaliser ces émotions négatives.
Les biographes de Winston Churchill racontent que le célèbre Premier Ministre britannique avait hérité de la faculté à diriger et de l’aplomb victorien de son père. Sa mère, de son côté, lui avait légué son obstination, son énergie et une capacité de séduction innée. Cependant, comme l’expliqua plus d’une fois le politicien, sa famille se caractérisait par une chose que lui-même dû porter avec résignation jusqu’au fond de son esprit : la dépression.
La colère n’est problématique que si elle est très intense, fréquente et irrationnelle. Si elle est gérée avec intelligence, elle peut devenir notre meilleur canal pour résoudre certaines situations.
Son “chien noir”, comme Churchill l’appelait, était présent dans les parties les plus intimes de sa vie. Quand on le regardait de l’extérieur, le politicien était un homme énergique, au caractère d’acier, qui fut capable d’éviter que la Grande-Bretagne ne succombe au nazisme. Il était connu pour un être un grand journaliste, qui a même reçu un Prix Nobel de littérature. Cependant, au fond de lui, toute la tension accumulée, les contradictions et les angoisses s’encastraient comme des roches et des dalles dans un silence rigoureux.
Le politicien avait parfaitement le droit de perdre son sang-froid de temps en temps et de se mettre en colère, mais l’homme se cacha toujours derrière son “chien noir”, ses livres et ses innombrables bouteilles de brandy…
On peut exprimer les émotions négatives sans perdre son calme
S’il y a bien quelque chose que nous a enseigné notre société de façon erronée, c’est qu’il y a des bonnes et des mauvaises émotions. En fait, si nous disions à cet instant que la colère et la rage sont des émotions saines, beaucoup de personnes verraient une certaine contradiction dans l’énoncé. Comment une série d’émotions traditionnellement liées à l’agression, la dispute ou même la violence peut-être elle bonne ?
En fait, ce type d’attributions si communes au sein de la population n’est qu’un exemple supplémentaire de notre manque de capacités au niveau émotionnel. Car nous devons bien avoir en tête qu’il “n’y a pas de bonnes et de mauvaises émotions”. Qui plus est, à long terme, si nous commettons l’erreur de réprimer, d’intérioriser ou de dissimuler notre colère, nous ne réussirons qu’à faire perdre leur intensité aux émotions dites “positives”, en plus d’attraper une indigestion émotionnelle.
Nous avons entièrement le droit d’exprimer nos émotions négatives. Mais il vaut mieux le faire avec intelligence et assertivité. Autorisons-nous à laisser éclater notre rage et notre colère face à tout ce qui nous provoque une gène ou des contradictions. Car le fait que ces émotions soient associées au mal-être ne signifie pas du tout qu’elles “soient mauvaises”. En outre, ce que nous atteignons grâce à elles est nécessaire à notre bien-être psychologique : nous faire entendre et résoudre des conflits pour pouvoir mieux nous adapter à nos contextes.
En tant qu’êtres humains, nous sommes né-e-s avec la capacité d’être agressif-ve-s. Cependant, cela ne fait pas de nous des mauvaises personnes. La rage nous a accompagné-e-s depuis notre enfance et notre responsabilité ultime envers cette dernière est de l’utiliser de façon fonctionnelle pour nous défendre et fixer des limites.
La rage adaptative et la bonne colère
Ana est professeure au collège et donne des cours de mathématiques à plusieurs classes de troisième. En plus d’être une excellente pédagogue, elle a d’extraordinaires capacités de leadership, très utiles dans sa profession. Elle sait comment communiquer avec ses élèves quand celleux-ci ne l’écoutent pas ou n’obéissent pas comme iels le devraient. Elle est agile en communication, rapide dans ses réactions et sait comment utiliser ses émotions pour qu’elles aient une influence positive sur ses élèves. Avec l’énergie qu’elle tire de ses propres émotions, elle réussit à les motiver, à les faire écouter et, en même temps, à les inspirer.
Malgré tout, ces qualités dont Ana fait preuve dans sa salle de classe disparaissent dans le domaine privé, avec sa famille et son conjoint. C’est elle qui se plie en quatre pour satisfaire tout le monde, elle qui trouve du temps pour les autres, elle qui est incapable de dire “non” à une faveur, demande ou caprice de ses proches. Notre protagoniste ressent une telle accumulation de rage et de frustration qu’elle devine que, à tout moment, cela affectera son travail.
Nous vous proposons maintenant de réfléchir à quelques principes simples qui seraient d’une grande utilité à Ana et à toute autre personne qui se trouverait dans la même situation.
Les clés d’une expression émotionnelle intelligente
En premier lieu, il est nécessaire de se souvenir d’un détail : pour manifester nos émotions négatives sans perdre la raison, nous devons faire usage de la colère fonctionnelle, adaptée et contrôlée. Nous faisons ici référence à cette communication à travers laquelle la personne ne se sert pas de cris, d’insultes ou de reproches inutiles. Celle à travers laquelle chaque mot passe par le filtre du respect, du calme et de la fermeté.
Les sentiments ne se répriment pas et ne se maquillent pas non plus. S’il y a des choses qui nous dérangent, nous rendent vulnérables et nous font du mal, nous ne pourrons pas avaler ces émotions de la même façon que nous ingérons un plat que nous n’aimons pas en nous pinçant le nez.
Cependant, il ne s’agit pas non plus de répondre “à la seconde” à ce qui ne nous plaît pas, juste quand la colère s’empare de nous. Si nous réagissons de la sorte, il est très probable que cette colère nous conduise jusqu’à son côté le plus dysfonctionnel et que nous résolvions la situation de la pire des manières.
Le plus adéquat, dans ces cas, est de planifier ce que nous allons dire (de quelle façon, à quel moment…). Ce plan nous donnera la possibilité d’être plus intelligent-e-s et pas nécessairement d’être faux/fausses ou artificiels.
Pour conclure, comme nous avons pu le voir, la rage bien gérée a la capacité de nous donner la force nécessaire pour résoudre de nombreuses situations. Par conséquent, perdre son calme de façon intelligente, respectueuse et assertive nous offre la possibilité de nous défaire de ce nœud dans l’estomac, de cette boule dans la gorge et même de ce “chien noir” qui répond au nom de dépression, avec lequel Winston Churchill s’est tant de fois promené en secret pendant une bonne partie de sa vie.
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