Naît-on droitier-ère ? Être gaucher-ère, est-ce un hasard ?

Naît-on droitier-ère ? Être gaucher-ère, est-ce un hasard ?
Sara Clemente

Rédigé et vérifié par Psychologue et journaliste Sara Clemente.

Dernière mise à jour : 27 décembre, 2022

Aujourd’hui, presque neuf personnes sur dix sont droitières. Cela donne donc un pourcentage de 10% de gaucher-ère-s dans le monde. Qu’est-ce qui détermine cette répartition ? Est-ce le fruit du hasard ? Y a-t-il un lien avec la génétique ? L’acquérons-nous avec la pratique ? Puis-je devenir gaucher-ère ? Cela dépend-il des goûts de la personne ?

L’explication n’est pas si simple. Les recherches menées sur ce thème ont été très nombreuses et aucune n’a été très concluante. Cependant, derrière cette ambiguïté, il existe deux hypothèses qui semblent bénéficier d’un plus grand soutien scientifique.

Pour ces deux explications, les causes qui déterminent si l’on est droitier-ère ou gaucher-ère sont neurologiques ; en d’autres termes, ce serait la conséquence d’un processus d’évolution de notre système nerveux. Ainsi, nous savons avec certitude que nous ne naissons pas avec cette condition et que ce n’est pas non plus le fruit du hasard ; nous devenons droitier-ère-s ou gaucher-ère-s au cours de notre première enfance. Mais comment se passe ce processus ?

Le responsable est le cerveau

La première de ces théories a prédominé pendant des années et fournit une explication neurologique d’origine cérébrale ; ainsi, pour elle, le fait d’être droitier-ère ou gaucher-ère est déterminé par le cerveau et dépend de la “latéralité” de la personne. La latéralité est la préférence d’usage d’une des parties symétriques du corps : main, œil, pied, oreille…

mécanismes du cerveau

Au niveau anatomique, ce concept est symétrique ; au niveau fonctionnel, en revanche, il est asymétrique. Il y a une latéralité quand l’un des côtés du corps est celui qui prédomine sur l’autre au moment où la personne réalise des activités (écrire, ouvrir des portes, jouer au tennis…). Les gaucher-ère-s ont une latéralité gauche et les droitier-ère-s, droite.

La latéralité se met en place entre 3 et 6 ans et est complètement formée à 7 ans. Si, à l’âge de 5 ans, l’enfant ne l’a pas développée, il est nécessaire de consulter un-e spécialiste.

Latéralisation

Pour comprendre cette première théorie, il est nécessaire d’expliquer le concept de latéralisation, un processus qui dépend de la dominance hémisphérique du sujet. On pourrait ainsi dire, pour faire court, que l’hémisphère droit du cerveau “dirige” les mouvements du côté gauche du corps et, au contraire, que l’hémisphère gauche commande le côté droit. On peut donc en déduire que :

  • Les personnes droitières ont une dominance hémisphérique gauche et une latéralité droite.
  • Les personnes gauchères ont une dominance hémisphérique droite et une latéralité gauche.

La moelle épinière est déterminante

Récemment, des chercheur-se-s de l’Université Ruhr de Bochum (Allemagne) ont assuré que ce qui détermine le choix d’une latéralité ou d’une autre n’est pas le cerveau mais la moelle épinière. Iels ont détecté qu’au bout de huit semaines de gestation, il existait déjà des différences génétiques marquées entre les gaucher-ère-s et les droitier-ère-s.

En d’autres termes, à partir du moment où le fœtus se trouve dans le ventre maternel, les gènes de sa moelle épinière chargés de contrôler le mouvement des extrémités sont déjà différents. Par exemple, les petit-e-s choisissent déjà de sucer le pouce d’une main ou d’une autre. Comment est-ce possible ?

Le processus est le suivant : le cortex cérébral envoie des ordres moteurs à la moelle épinière et celle-ci, à son tour, contrôle les mouvements des jambes et des bras du bébé. La découverte des chercheur-se-s est celle-ci : à huit mois, le cortex cérébral et la moelle épinière du bébé ne communiquent pas encore, ce qui signifie que seule la moelle épinière peut être responsable des mouvements.

Ainsi, l’explication de la latéralité (la préférence d’usage) se trouverait dans l’épigénétique. C’est-à-dire dans les influences de l’environnement sur les gènes, qui affectent de différentes façons le côté droit ou gauche de la moelle épinière.

enfant gaucher

Et des personnes comme Rafael Nadal ? Sont-elles droitières, gauchères, ambidextres ?

Si vous ne vous êtes pas encore identifié-e en tant que droitier-ère ou gaucher-ère, il est probable que votre latéralité ne se soit pas correctement développée. Quand cela se produit, les enfants peuvent être ambidextres, présenter une latéralité croisée ou contrariée.

  • Être ambidextre signifie ne pas avoir de latéralité définie ; il n’y a pas de dominance hémisphérique et, par conséquent, il y a un usage indifférent des deux parties symétriques du corps. Les enfants peuvent donc réaliser des activités avec la main gauche ou la main droite, indistinctement.
  • La latéralité croisée ou mixte existe quand il y a un échange des latéralités. Par exemple, le cas de Rafael Nadal, dont l’œil dominant est le droit (il est droitier) et dont la main dominante est la gauche.
  • La latéralité contrariée se produit chez les enfants qui ont été influencés de manière externe pour changer de latéralité (le cas le plus commun est celui de l’enfant gaucher que l’on force à écrire de la main droite). Ainsi, pour des activités non médiatisées par la culture, il se sert de sa main “naturelle”, pour par exemple se brosser les dents, saluer ou pousser quelque chose.

Cette latéralité contrariée garde un lien avec la mauvaise relation qu’a eu, traditionnellement, le langage avec les gaucher-ère-s. Faire les choses du côté droit signifie bien les faire et “être droitier-ère” veut dire être habile, mais l’évolution du latin sinister vers l’espagnol “siniestro”, par exemple, n’a pas été aussi flatteuse. En fait, dans de nombreux pays, comme en Chine, on continue de mal voir celleux qui se servent de leur main gauche et les enfants sont corrigés en continu.

Il y a encore beaucoup de points d’ombre à résoudre au niveau de la façon dont nous devenons droitier-ère-s ou gaucher-ère-s. Malgré tout, les recherches neurologiques qui attribuent la cause au cerveau et à la moelle épinière sont plus proches de l’explication scientifique irréfutable.

 

 


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