Le drame des réfugié-e-s : le no man's land

Le drame des réfugié-e-s : le no man's land
Gema Sánchez Cuevas

Rédigé et vérifié par Psychologue Gema Sánchez Cuevas.

Dernière mise à jour : 07 octobre, 2017

Il y a eu une attaque. Une mère prend la main de son petit. C’est ainsi qu’il expira son ultime souffle, dans les bras de celle qui lui a donné la vie. Aujourd’hui, un garçon se sépare également de sa famille, il ne sait pas quand il pourra la revoir. Il dit au revoir avec des larmes qui abritent l’espoir d’un avenir meilleur. Les réfugié-e-s.

Le drame des réfugié-e-s parle de la douleur de milliers de personnes. De personnes qui rêvent, qui ont des souhaits comme nous. Des enfants qui ne savent déjà plus rire à force de souffrir.

Qui sont les réfugié-e-s ?

Nous pouvons en parler comme d’immigrant-e-s forcé-e-s car iels sont persécuté-e-s pour des raisons de race ou d’idéologie dans leur pays d’origine. Egalement car leur pays ne leur procure pas un approvisionnement suffisant ou des garanties de sécurité leur permettant de vivre dignement.

Les réfugié-e-s ne viennent pas nous prendre notre travail. Ils ne viennent pas par caprice. Ce ne sont pas des terroristes.

“Vous devez comprendre,

que personne ne met ses enfants sur un bateau

sauf si l’eau est plus sûre que la terre

personne ne se brûle les paumes des mains

sous les trains

sous des châssis

Personne ne passe des jours et des nuits dans le ventre d’un camion

se nourrissant de journaux à moins que les kilomètres

ne signifient plus qu’un simple voyage”

-Extrait de “Home”, Magazine Fogal-

 

réfugié-e-s

Quelles sont les conséquences psychologiques de la vie de réfugié-e ?

Vivre en tant que réfugié-e , c’est vivre dans un no man’s land. L’impossibilité de développer une vie normale dans cet endroit qui est habituellement votre maison et se retrouver, en même temps, confronté-e au refus d’asile de nombreux pays potentiels, génère des niveaux exorbitants d’anxiété ou de dépression… tout en suscitant des sentiments de vengeance.

A cela nous devons ajouter les bombardements constants. Ainsi se développe un état d’hyper-vigilance et de stress chronique. Ceci est souvent le détonateur de troubles de nature et de gravité plus importantes tels que : la schizophrénie ou le syndrome de stress post-traumatique.

Il n’est donc pas surprenant qu’une personne avec une instabilité sociale et psychologique réalise des actes illégaux ou non éthiques, ou qu’elle s’allie à un groupe prétendant assurer la sécurité, le salut et la justice à ses proches. Qui donc ne chercherait pas un-e allié-e lorsque tout s’effondre ?

Cela nous surprend néanmoins. Avec quelle rapidité sommes-nous capable de distinguer la paille dans l’œil du voisin sans pouvoir apercevoir la poutre qui se trouve dans le notre ! Les dernières nouvelles montrent une augmentation de l’extrême droite, surtout en Europe. Ne sont-elles pas également des personnes recherchant la sécurité dans un contexte social et psychologique d’incertitude ?

réfugié-e-s

Quel est notre rôle dans le drame de réfugié-e-s ?

Lorsque une très infime possibilité de survivre à un voyage infernal dans une embarcation, à travers un désert ou après des années de pèlerinage entre les mains de mafias, est préférable au fait de rester sur le propre territoire…ni les barrières, ni les frontières, ni les décrets, ni la police, ni la mer Méditerranée elle-même ne seront suffisants pour arrêter une famille qui cherche une vie meilleure, une vie digne.

Regarder ailleurs ne va pas résoudre le problème. Le financement du conflit ne résoudra pas le problème non plus. Sommes-nous peu solvables pour accueillir, mais non pour fournir des armes ? Cette dualité morale nous incombe.

Pourquoi ? Parce qu’il s’agit d’un voyage aller-retour ; plus nous lançons loin le boomerang, plus fort sera le coup lorsqu’il reviendra. Si nous nions la dure réalité de l’existence de cet exode massif. Ou si nous ne nions pas son existence, mais refusons l’accueil dans nos pays, comme c’est le cas pour les États-Unis. Ou plus tard, si nous acceptons le drame et l’accueil, mais que nous n’incluons pas les réfugiés dans notre société.

Si l’une de ces hypothèses se concrétisent, nous construirions alors des bombes à retardement. Que feriez-vous si votre maison avait été démolie, que votre enfant avait été enlevé ou que votre famille avait été bombardée ? Que feriez-vous si vous aviez tout perdu et n’aviez aucune perspective d’amélioration ? Que feriez-vous si vous vous sentiez impuissant-e et que vous aviez le sentiment que tout ce qui vous arrive l’est avec la complicité de celleux qui pourraient l’éviter ?

La réponse est assez simple. Dans la mesure où votre vie n’a aucun sens : vous vous détruisez vous-même, vous cherchez la vengeance ou le salut. C’est à ce stade que notre intervention est transcendantale.

Il a été démontré que la plupart des attaques terroristes n’ont pas été perpétrées par de “terribles Syrien-ne-s venu-e-s pour tou-te-s nous tuer”, mais par des habitant-e-s natif-ve-s du pays. Ces deuxièmes générations qui ne se sont pas senties accueillies par leur pays d’adoption. Doublement rejeté-e-s pour ne pas être reconnu-e-s français-es ou allemand-e-s de pur droit, mais non plus syrien-ne-s ou irakien-ne-s. Pour n’être rien d’autre que les ami-e-s de celleux qui veulent les utiliser comme armes.

C’est ici, dans ce no man’s land, dans ce manque d’identité et d’appartenance à un groupe de référence qu’est né le “sauve qui peut”.

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Nous ne sommes pas mieux que quiconque…et parfois nous l’oublions

Il semble que nous avons déjà oublié. Il y a seulement 76 ans, 465 000 espagnol-e-s ont traversé la frontière française pour demander l’asile lorsqu’iels voulaient échapper à la guerre civile. Parmi elleux, 220 000 ne reviendront jamais.

 

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Comme l’a écrit Neruda : “L’amour est si court, et l’oubli est si long”

 

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Migrant-e-s illégaux-ales espagnol-e-s, arrivant aux côtes du Venezuela (1949)

Ceci est d’autant plus frappant si nous prenons le temps regarder un peu autour de nous. Nos jeunes partent. Iels vont aux États-Unis, en Chine, en France, en Irlande…iels partent à la recherche d’un avenir meilleur. Les fragments de la situation décrite préalablement pourraient les concerner, tout comme vous ou l’un d’entre nous.

C’est à nous qu’il appartient d’élever la voix en lieu et place de celleux qui se sont étouffé-e-s dans leurs cris et leurs pleurs. Pour les plus de 10 000 enfants disparus en terres européennes, partis avec l’espoir retrouver un jour leurs familles. Et pour beaucoup d’autres encore qui vendent leur corps dans des camps de réfugié-e-s en échange de la vie.

UNICEF ​​a reconnu, en 2015, près de 1 500 violations graves à l’égard des enfants, comprenant notamment le meurtre, la mutilation, le recrutement ou l’enlèvement. Parmi eux, nous comptons 400 cas d’enfants tués et près de 500 mutilés. Et déjà deux ans se sont écoulés. Sont-ils devenus des terroristes ? Accordez-moi le bénéfice du doute.

Le moyen le plus simple pour aider est d’ouvrir son esprit et son cœur à nos semblables.



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